TA de de Rennes, 05 octobre 2023, n° 2101701
Vu la procédure suivante :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 1er avril et 18 mai 2021, Mme B A et l'association pour la Protection et la Promotion de la Côte des Légendes (APPCL), représentées par Me Samuel Delalande, demandent au tribunal :
1°) d'annuler l'ordre de service du 1er février 2021 fixant au 15 mars 2021 la reprise des travaux du lot n° 1 du marché public de travaux portant sur la restructuration des eaux traitées de la station d'épuration des eaux usées de Saint-Dénec à Porspoder ;
2°) d'annuler la décision du président de la communauté de communes du Pays d'Iroise de procéder à l'exécution des travaux d'assainissement ;
3°) de mettre à la charge de la communauté de communes du Pays d'Iroise une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- l'ordre de service litigieux est intervenu en méconnaissance de l'arrêté préfectoral autorisant les travaux de modification du système d'assainissement de Porspoder, devenu caduc ;
- l'ordre de service ne comporte ni signature, ni mention du nom et prénom de son auteur en méconnaissance de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 juillet 2023, la communauté de communes du Pays d'Iroise, représentée par Me Loïc Prieur et Me Alix Voisin (Selarl Le Roy, Gourvennec, Prieur), conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme A et de l'association pour la Protection et la Promotion de la Côte des Légendes au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la requête est irrecevable, faute pour Mme A comme pour l'association pour la Protection et la Promotion de la Côte des Légendes de justifier d'un intérêt à agir ;
- les conclusions de la requête sont irrecevables, en ce qu'elles sont dirigées contre l'ordre de service du 1er février 2021 signifiant à l'entreprise Liziard la reprise des travaux, lequel ne constitue pas un acte détachable de l'exécution du marché public de travaux dont les tiers peuvent demander l'annulation ;
- les conclusions de la requête sont irrecevables, en ce qu'elles sont dirigées contre la décision du président de la communauté de communes de procéder à l'exécution des travaux ;
- la requête est manifestement irrecevable et pourra être rejetée en application des dispositions de l'article R. 222-1 du code de justice administrative ;
- aucun des moyens soulevés par les requérantes n'est fondé.
Vu :
- l'ordonnance n° 2101735 du 19 avril 2021 du juge des référés du tribunal administratif de Rennes ;
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Thalabard,
- les conclusions de M. Blanchard, rapporteur public,
- et les observations de Me Delalande, représentant Mme A et l'association pour la Protection et la Promotion de la Côte des Légendes et de Me Voisin, représentant la communauté de communes du Pays d'Iroise.
Considérant ce qui suit :
1. La communauté de communes du Pays d'Iroise a entrepris de procéder à la restructuration de la station de traitement des eaux usées située à Saint-Dénec, sur le territoire de la commune de Porspoder (Finistère). La maîtrise d'œuvre de cette opération a été confiée au cabinet Bourgeois et le lot n° 1 de ce marché public de travaux, relatif aux réseaux, a été attribué à l'entreprise Liziard. Opposées aux modifications que ce projet de réhabilitation prévoit,
Mme A et l'association pour la Protection et la Promotion de la Côte des Légendes (APPCL) demandent l'annulation de l'ordre de service du 1er février 2021 par lequel le maître d'œuvre a pris acte de l'arrêt des travaux au 29 janvier 2021 avec une reprise de ces travaux au 15 mars 2021 ainsi que de la décision par laquelle le président de la communauté de communes du Pays d'Iroise a décidé d'entreprendre de tels travaux.
Sur la recevabilité des conclusions à fin d'annulation :
2. Indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l'excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d'un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. La légalité du choix du cocontractant, de la délibération autorisant la conclusion du contrat et de la décision de le signer ne peut être contestée qu'à l'occasion du recours ainsi défini. Toutefois, dans le cadre du contrôle de légalité, le représentant de l'Etat dans le département est recevable à contester la légalité de ces actes devant le juge de l'excès de pouvoir jusqu'à la conclusion du contrat, date à laquelle les recours déjà engagés et non encore jugés perdent leur objet.
3. Il en résulte que l'existence d'un recours contre le contrat, ouvert notamment à tout tiers au contrat susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine mais également aux représentants de l'organe délibérant de la collectivité territoriale concernée, rend irrecevables les recours déposés contre la délibération approuvant l'attribution du contrat à un candidat et autorisant le président de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à le signer, alors même que la légalité de cette délibération peut être contestée à l'occasion du recours en contestation de validité du contrat. Par suite, les conclusions présentées par Mme A et l'association pour la Protection et la Promotion de la Côte des Légendes, en ce qu'elles tendent à l'annulation de la décision par laquelle le président de la communauté de communes du Pays d'Iroise a décidé de signer le marché public de travaux permettant la réhabilitation de la station de traitement des eaux usées de Porspoder, sans être, au surplus, assorties du contrat qui a été effectivement signé par l'EPCI, sont irrecevables et doivent être rejetées.
4. De même, l'ordre de service du 1er février 2021 donné par le maître d'œuvre du marché de réhabilitation de la station de traitement des eaux usées de Porspoder à l'entreprise attributaire du lot n° 1, d'interrompre les travaux à la date du 29 janvier 2021 et de les reprendre à la date du 15 mars 2021 constitue une simple mesure d'exécution de ce marché de travaux, insusceptible de faire l'objet d'un recours en excès de pouvoir. Il s'ensuit que les conclusions tendant à l'annulation de cet ordre de service sont également irrecevables.
Sur les frais liés au litige :
5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté de communes du Pays d'Iroise, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme A et l'APPCL demandent au titre des dépenses exposées et non comprises dans les dépens. Les conclusions présentées à ce titre par les requérantes doivent dès lors être rejetées.
6. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A et de l'APPCL une somme de 800 euros au titre des frais exposés par la communauté de communes du Pays d'Iroise et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A et de l'association pour la Protection et la Promotion de la Côte des Légendes est rejetée.
Article 2 : Mme A et l'association pour la Protection et la Promotion de la Côte des Légendes verseront à la communauté de communes du Pays d'Iroise la somme globale de
800 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à Mme B A, à l'association pour la Protection et la Promotion de la Côte des Légendes et à la communauté de communes du Pays d'Iroise.
Copie en sera adressé pour information au préfet du Finistère.
Délibéré après l'audience du 21 septembre 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Grenier, présidente,
Mme Plumerault, première conseillère,
Mme Thalabard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 octobre 2023.
La rapporteure,
signé
M. Thalabard
La présidente,
signé
C. GrenierLa greffière,
signé
I. Le Vaillant
La République mande et ordonne au préfet du Finistère en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.