TA Orléans, 05/04/2023, n°2002125

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 29 juin 2020, des pièces enregistrées le 30 juin 2020 et des mémoires complémentaires, enregistrés les 29 juillet 2021 et 23 mai 2022, l'université de Tours, représentée par Me Bouthors-Neveu, demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures :

1°) de condamner solidairement, ou à défaut chacun pour son fait et sa faute, la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés tant pour son compte qu'en qualité de mandataire solidaire du Groupement conjoint de maîtrise d'œuvre et la société Anvolia 37 à lui verser en réparation des désordres et non conformités affectant l'installation de ventilation du bâtiment E du site Jean Luthier de son institut universitaire de technologie :

- la somme de 10 800,00 euros TTC correspondant au coût des travaux de reprise du câblage et des sondes CO² dans la salle E 0070 et les autres salles de microbiologie du rez-de-chaussée du bâtiment E, somme indexée sur le dernier indice du coût de la construction publié au jour du dépôt du rapport d'expertise judiciaire ;

- la somme de 467 647, 97 euros TTC correspondant au coût des travaux de reprise de l'installation de la ventilation afin de la rendre conforme au cahier des clauses techniques particulières (CCTP), somme indexée sur le dernier indice du coût de la construction publié au jour du dépôt du rapport d'expertise judiciaire ;

- la somme de 9 840,00 euros TTC au titre des frais d'expert technique pris en charge pour l'assister dans le cadre des opérations d'expertise judiciaire ;

- la somme de 4 000 euros au titre des frais d'avocat exposés pour son assistance pendant l'expertise ;

- sommes assorties des intérêts au taux légal à compter de l'introduction de la requête en référé expertise et de la capitalisation de ces intérêts ;

2°) de mettre à la charge solidaire de la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés tant pour son compte qu'en qualité de mandataire solidaire du Groupement conjoint de maîtrise d'œuvre et la société Anvolia 37, ou à défaut chacun pour son fait et sa faute, la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

3°) de dire que le jugement à intervenir sera commun et opposable à la société MJA - Mandataires judiciaires associés, en qualité de liquidateurs judiciaires de la société Nox Ingénierie, de déclarer la société Nox Ingénierie venant aux droits de la société ICR LBE Fluides responsable des désordres et non conformités affectant l'installation de ventilation, à titre principal sur le fondement de sa responsabilité contractuelle, à titre subsidiaire sur le fondement de la garantie décennale, et de mettre à la charge du passif de la société Nox Ingénierie venant aux droits de société ICR LBE Fluides au titre de la créance de l'université de Tours à son égard :

- la somme de 10 800,00 euros TTC correspondant au coût des travaux de reprise du câblage et des sondes CO² dans la salle E 0070 et les autres salles de microbiologie du rez-de-chaussée du bâtiment E ;

- la somme de 467 647, 97 euros TTC correspondant au coût des travaux de reprise de l'installation de la ventilation afin de la rendre conforme au CCTP ;

- la somme de 9 840,00 euros TTC au titre des frais d'expert technique pris en charge pour l'assister dans le cadre des opérations d'expertise judiciaire ;

- la somme de 4 000 euros au titre des frais d'avocat exposés pour son assistance pendant l'expertise ;

- la somme de 19 293,36 euros TTC correspondant aux dépens dont les frais d'expertise ;

- et la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés et la société Anvolia 37 sont responsables des désordres affectant l'installation de ventilation dans le cadre de travaux de réfection du bâtiment E sur le site Jean Luthier de l'IUT de Tours relevés par l'expert ;

- l'expert judiciaire n'a pas retenu un certain nombre de non-conformités ;

- la société Anvolia 37 est responsable de ces non-conformités, à titre principal, du fait de la mise en œuvre de la garantie de parfait achèvement, à titre subsidiaire, du fait de sa responsabilité contractuelle de droit commun, à titre infiniment subsidiaire, du fait de la garantie décennale ;

- la maîtrise d'œuvre est responsable, à titre principal, du fait de la non-conformité de la ventilation au CCTP, à titre subsidiaire, du fait du défaut de conseil à la réception imputable à la maîtrise d'œuvre, à titre infiniment subsidiaire, du fait de la garantie décennale.

Par des mémoires en défense enregistrés les 25 août 2020, 11 octobre 2021, 25 octobre 2021 et 14 juin 2022, la société MJA - Mandataires judiciaires associés, prise en la personne de Me Julia Ruth, et Me Marie Danguy, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Nox Ingénierie, venant aux droits de la société ICR LBE Fluides, représentées par Me Gauvin, concluent, dans le dernier état de leurs écritures, au rejet des conclusions présentées par l'université de Tours et par la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés à son encontre et demande au tribunal de condamner la société Anvolia 37 à garantir la société Nox Ingénierie, venant aux droits de la société ICR LBE Fluides, de toutes les condamnations qui viendraient à être inscrites au passif de sa liquidation judiciaire et de mettre à la charge de l'université de Tours 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

Elles soutiennent que :

- l'installation est conforme au CCTP ;

- aucun dysfonctionnement de l'installation n'a été démontré, qui serait de nature à la rendre impropre à sa destination ;

- le tribunal administratif n'est pas compétent pour se prononcer sur les appels en garantie entre les constructeurs et en tout état de cause, la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés est défaillante au stade de l'exécution du chantier et devra supporter une part de responsabilité au titre de laquelle elle ne saurait être garantie.

Par des mémoires en défense enregistrés le 29 octobre 2020, le 8 décembre 2021 et le 7 juin 2022, et un mémoire déposé le 28 juin 2022, la société Anvolia 37, représentée par Me d'Audiffret, demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures :

- de rejeter, à titre principal, les demandes de l'université de Tours relatives aux travaux de reprise de l'installation de ventilation, à titre subsidiaire, de retenir la responsabilité de la société Nox Ingénierie et de condamner la société AXA en qualité d'assureur de la société ICR LBE Fluides à laquelle la société Nox Ingénierie vient aux droits, à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre et de toutes sommes qui pourraient être mises à sa charge au titre de travaux de reprise de l'installation, à titre infiniment subsidiaire, de condamner la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre et de toutes sommes qui pourraient être mises à sa charge au titre de travaux de reprise de l'installation ;

- de fixer sa part de responsabilité au titre des travaux de reprise des câblages et de sondes CO² à hauteur de 80 % et celle de la société Nox Ingénierie à 20 %, ou à défaut, celle de la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés à 20 % ;

- de condamner, à titre principal, la société AXA à la garantir de toute somme supérieure à 80% qui pourraient être mise à sa charge au titre des travaux de reprise du câblage et des sondes CO², à titre subsidiaire, la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés à la garantir de toutes sommes supérieures à 80 % qui pourraient être mise à sa charge au titre des travaux de reprise du câblage et des sondes CO² ;

- de rejeter, à titre principal, la demande de l'université de Tours de prise en charge de l'intégralité des frais d'expertise et de laisser à sa charge 90 % des frais d'expertise, à titre subsidiaire, de condamner la société AXA à la garantir à hauteur de 90 % de toute condamnation prononcée à son encontre et de toutes sommes mises à sa charge au titre des frais d'expertise judiciaire, à titre infiniment subsidiaire, de condamner la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés à la garantir à hauteur de 90 % de toute condamnation prononcée à son encontre et de toutes sommes mises à sa charge au titre des frais d'expertise judiciaire ;

- de rejeter toutes les autres demandes de l'université de Tours ;

- de rejeter les demandes, fins et conclusions présentées à son encontre par la société MJA - Mandataires judiciaires associés ;

- de condamner la société MMA à la garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son égard.

Elle soutient que :

- les installations qu'elle a réalisées ont été déclarées conformes par l'expert judiciaire et fonctionnaient parfaitement ;

- les seuls travaux à envisager pour une remise en état des installations déclarées non-conformes par l'expert s'élèvent, selon ce dernier, à 10 800 euros ;

- l'absence de non-conformité des installations ne permet pas à l'université de Tours de refuser d'effectuer une réception sans réserve de l'ensemble des ouvrages, la date de réception doit être fixée au 24 juillet 2017 ;

- elle n'est pas tenue, à titre principal, de réaliser des travaux de reprise de l'installation de ventilation ni de prendre à sa charge les frais d'expert technique engagés par l'université de Tours, à titre subsidiaire, la responsabilité intégrale revient à la société ICR LBE Fluides à laquelle la société Nox Ingénierie vient aux droits et elle pourra solliciter la garantie intégrale de toute condamnation de la société AXA ès qualité d'assureur de la société ICR LBE Fluides, à titre infiniment subsidiaire, elle pourrait solliciter la garantie intégrale de la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés de toute condamnation prononcée à son encontre et de toutes sommes qui pourraient être mises à sa charge au titre de travaux de reprise de l'installation de ventilation ;

- elle n'est tenue, à titre principal, que pour 80 % de la somme de 10 800 euros correspondant au coût des travaux de reprise des câblages et des sondes CO², la société ICR LBE Fluides, à laquelle la société Nox Ingénierie vient aux droits, étant tenue des 20 % restant, à titre subsidiaire, elle pourra solliciter la garantie intégrale de la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés pour tout pourcentage supérieur à 80 % ;

- à titre principal, tous les désordres n'étant pas avérés, elle ne saurait être tenue de prendre à sa charge plus de 10 % des frais d'expertise, les 90 % restants devant rester à la charge de l'université de Tours, à titre subsidiaire, la société AXA ès qualité d'assureur de la société ICR LBE Fluides à laquelle la société Nox Ingénierie vient aux droits devra la garantir à hauteur de 90 % de toute condamnation prononcée à son encontre au titre des frais d'expertise judiciaire, à titre infiniment subsidiaire, la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés devra la garantir à hauteur de 90 % de toute condamnation prononcée à son encontre au titre des frais d'expertise judiciaire ;

- l'expert judiciaire n'ayant pas retenu la non-conformité de l'installation obligeant un changement complet, la société ne saurait être tenue de prendre à sa charge les frais d'avocat exposés par l'université de Tours pour son assistance pendant les opérations d'expertise ;

- elle ne saurait être tenue de verser à l'université de Tours la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'université aurait dû se contenter des sommes exigées pour les travaux réparatoires des dysfonctionnements des câblages et des sondes CO² et pouvait s'en tenir à un paiement à l'amiable ;

- elle a respecté le cahier des charges et s'est conformée aux documents et prescriptions donnés par le bureau d'études et ne saurait être tenue de garantir la société Nox Ingénierie ;

- la société MMA IARD est tenue de la garantir.

Par des mémoires en défense enregistrés les 11 et 13 octobre 2021, la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés, représentée par Me Meunier, conclut, dans le dernier état de ses écritures, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à sa mise hors de cause, à titre très subsidiaire à la condamnation des sociétés Anvolia 37 et Nox Ingénierie à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre elle, et en toute hypothèse demande au tribunal de mettre à la charge de l'université de Tours ou de toute partie perdante la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'université de Tours n'est pas fondée à demander la condamnation des constructeurs pour une non-conformité alléguée des installations de ventilation ;

- à titre principal, elle n'a pas participé à la conception technique du lot de ventilation, ce qui était la mission de la société ICR LBE Fluides, et ne saurait être tenue pour responsable des défauts de conception, à titre subsidiaire, elle n'a commis aucune faute dans son devoir de surveillance, à titre infiniment subsidiaire, elle pourra solliciter la garantie de la société Nox Ingénierie contre toute condamnation susceptible d'être prononcée contre elle et le cas échéant celle de la société Anvolia 37.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 octobre 2021, la société Mutuelles du Mans Assurance (MMA), représentée par Me de la Ruffie, conclut au rejet des demandes présentées par la société Anvolia 37 et toute autre partie, et demande au tribunal de mettre à la charge de la société Anvolia 37 et de l'université de Tours la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à titre principal, la juridiction administrative est incompétente pour connaître des actions tendant au paiement des sommes dues par un assureur au titre de ses obligations de droit privé, alors même que l'appréciation de la responsabilité de l'assuré dans la réalisation du fait dommageable relèverait de la compétence de la juridiction administrative ;

- à titre subsidiaire, les désordres relevés par l'expert ne compromettant pas la solidité de l'ouvrage, ni ne le rendant impropre à sa destination, elle ne saurait être tenue d'indemniser la société Anvolia 37.

Par une ordonnance du 13 juin 2022, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 30 juin 2022.

Vu :

- le rapport de l'expert enregistré le 25 février 2020 au greffe du tribunal ;

- l'ordonnance du 29 mai 2020 par laquelle la présidente du tribunal a liquidé et taxé les frais et honoraires de l'expertise à la somme de 19 293,36 euros TTC ;

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 approuvant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A ;

- les conclusions de Mme Best-De Gand, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Tournier, représentant l'université de Tours.

Une note en délibérée présentée par l'université de Tours a été déposée le 10 mars 2023.

Considérant ce qui suit :

1. L'université de Tours a engagé des travaux de réfection du bâtiment E du site Jean Luthier de son institut universitaire de technologie (IUT). La maîtrise d'œuvre a été confiée le 21 novembre 2014 à un groupement conjoint composé de la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés et de la société ICR LBE Fluides. Le mandataire solidaire de ce groupement était la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés. Le lot n° 7 " ventilation " a été confié, par un acte d'engagement du 29 octobre 2015, à la société Anvolia 37 pour la réalisation d'une ventilation double flux. Le 10 novembre 2016, estimant que les prestations n'avaient pas été réalisées en conformité avec le cahier des clauses techniques particulières (CCTP), l'université de Tours a réceptionné les travaux sous réserve de l'exécution des travaux et prestations de mise en conformité des installations de ventilation double flux conformément aux dispositions dudit CCTP. Elle a saisi le juge des référés du Tribunal administratif d'Orléans qui, par ordonnance en date du 8 octobre 2018, a désigné un expert. Par décision en date du 13 septembre 2019, la garantie de parfait achèvement a été prolongée. L'expert a déposé son rapport le 25 février 2020.

2. Par la présente requête, l'université de Tours demande au tribunal de condamner la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés et la société Anvolia 37 à lui verser la somme totale de 499 287,97 euros en lien avec la réparation des désordres affectant les travaux de ventilation dans le cadre des travaux de réfection. La société Anvolia 37 conclut, à titre principal au rejet de la requête et demande au tribunal de condamner à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre la société AXA en qualité d'assureur de la société ICR LBE Fluides à laquelle la société Nox Ingénierie vient aux droits, à titre subsidiaire, la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés. La société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés conclut au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à sa mise hors de cause et demande, à titre très subsidiaire au tribunal, de condamner les sociétés Anvolia 37 et Nox Ingénierie à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre. La société MJA - Mandataires judiciaires associés conclut au rejet de la requête de l'université de Tours et de l'appel en garantie de la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés et demande au tribunal de condamner la société Anvolia 37 à garantir la société Nox Ingénierie de toutes les condamnations qui viendraient à être inscrites au passif de sa liquidation judiciaire. La société MMA conclut au rejet des demandes présentées par la société Anvolia 37 et toute autre partie.

Sur les responsabilités recherchées par l'université :

3. Ainsi qu'il a été dit au point 1, la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés et la société ICR LBE Fluides étaient maître d'œuvre du marché en litige, dont le lot " ventilation " a été exécuté par la société Anvolia 37, les réserves relatives à l'exécution des travaux et prestations de mise en conformité des installations de ventilation n'ont pas été levées et par décision en date du 13 septembre 2019, la garantie de parfait achèvement, qui ne pèse que sur l'entrepreneur à l'exclusion des autres constructeurs, a été prolongée.

4. En premier lieu, il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise, d'une part, qu'un désordre affecte le fonctionnement de la ventilation des salles de microbiologie localisées au rez-de-chaussée du bâtiment qui en empêche la ventilation, alors que la règlementation exige que les locaux de microbiologie à pollution spécifique soient ventilés, notamment lorsqu'ils sont occupés pour permettre l'élimination complète des pollutions de l'air, ces non-conformité et désordre rendant impossible l'usage de ces salles. D'autre part, que ce désordre est lié à l'installation de sondes CO² de type " appliques " à la place de sondes CO² installées à l'intérieur des gaines des conduits de reprise d'air et, s'agissant de la salle E 0070 à un câblage incohérent.

5. Par suite, l'université de Tours est fondée à rechercher sur le fondement de la garantie de parfait achèvement la seule responsabilité de la société Anvolia 37, qui a installé les mauvaises sondes et effectué le câblage défectueux, aux titre du désordre affectant le fonctionnement de la ventilation des salles de microbiologie localisées au rez-de-chaussée du bâtiment.

6. En second lieu, l'université recherche la responsabilité des intervenants à la construction s'agissant de l'installation de la ventilation de l'ensemble du bâtiment afin de la rendre " conforme au CCTP ". Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction et notamment du rapport de l'expert que les travaux réalisés ne sont pas conformes au CCTP. En effet, alors qu'il est constant que le marché a été attribué à la société Anvolia 37 sur la base de l'option ventilation mécanique contrôlée (VMC) " double flux " sur l'ensemble du bâtiment, l'expert indique, d'une part, que si la société LBE qui a rédigé l'avant-projet définitif et le dossier de consultation des entreprises a, à ce stade, entaché ces documents d'imprécisions quant à la définition des équipements à mettre en œuvre, la conception des installations envisagée par ce bureau d'études est cohérente et en corrélation avec les besoins de l'établissement, d'autre part, que l'entreprise Anvolia 37 a installé un dispositif de ventilation conformément aux prescriptions du cahier des charges, à l'exception ainsi qu'il a été dit précédemment, de la mise en place, dans les salles de microbiologie du rez-de-chaussée, d'un capteur d'ambiance au lieu du type de sonde de détection de CO² dit " de gaine " prévu et de la réalisation incorrecte des câblages et des asservissements du système de ventilation de la salle E 0070.

7. Par suite et alors que le système mis en place est un système de ventilation double flux, conformément au CCTP, et quand bien même ce système est un système composé de détecteurs déclenchant la ventilation dès qu'un seuil préprogrammé est dépassé et non un système permettant la gestion technique du bâtiment recherchée par l'université, celle-ci n'est pas fondée à rechercher la responsabilité des intervenants à la construction s'agissant de l'installation de la ventilation de l'ensemble du bâtiment.

Sur la réparation des désordres :

8. Il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que les prestations à réaliser pour mettre fin aux désordres sont la révision du câblage des installations de ventilation de la salle E 0070 et le remplacement des sondes de détection de CO² pour toutes les autres salles de microbiologie localisées au rez-de-chaussée du bâtiment et que le montant de ces travaux réparatoires s'élève à un total de 9 000 euros HT soit 10 800 euros TTC, estimation de l'expert non contestée.

9. Il résulte de ce qui précède que la société Anvolia 37 doit être condamnée à verser à l'université de Tours la somme totale de 10 800 euros TTC au titre de la réparation des désordres affectant les salles de microbiologies localisées au rez-de-chaussée du bâtiment Jean Luthier.

Sur la demande d'indexation à l'indice du coût de la construction :

10. L'université de Tours, qui sollicite l'actualisation de la somme demandée en fonction de la variation de l'indice du coût de la construction, n'établit ni même n'allègue avoir été dans l'impossibilité d'effectuer les travaux prescrits par l'expert après le dépôt du rapport d'expertise. Sa demande doit, par suite, être rejetée.

Sur le préjudice financier en lien avec la constatation des désordres :

11. Il résulte de l'instruction que l'université de Tours a exposé la somme de 9 840,00 euros TTC au titre des frais d'expert technique pris en charge pour l'assister dans le cadre des opérations d'expertise judiciaire ainsi que 4 000 euros au titre des frais d'avocat exposés pour son assistance pendant l'expertise, utile à la solution du litige. Par suite, la société Anvolia 37 doit être condamnée à verser à l'université de Tours la somme totale de 13 840 euros TTC au titre de la réparation de ce préjudice.

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

12. Les sommes mises à la charge de la société Anvolia 37 au titre de la réparation des préjudices de l'université de Tours porteront intérêts au taux légal à compter du 29 juin 2020, date d'enregistrement de la requête. Les intérêts seront capitalisés à compter du 29 juin 2021.

Sur les dépens :

13. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre les frais et honoraires de l'expertise, liquidés et taxés à la somme de 19 293,36 euros par une ordonnance de la présidente du tribunal du 29 mai 2020, à la charge définitive de la société Anvolia 37.

Sur les appels en garantie :

14. La société Anvolia 37 demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures, d'une part, de condamner à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre et de toutes sommes qui pourraient être mises à sa charge au titre de travaux de reprise de l'installation et des frais d'expertise, la société AXA en qualité d'assureur de la société ICR LBE Fluides à laquelle la société Nox Ingénierie vient aux droits, à titre subsidiaire, la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés, d'autre part, de condamner la société Mutuelles du Mans Assurance (MMA), avec laquelle elle a conclu un contrat d'assurance responsabilité civile décennale à la garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son égard.

15. En premier lieu, le contrat qui unit la société Anvolia 37 et la société MMA est un contrat de droit privé et, ainsi que cette dernière l'oppose, il appartient aux seules juridictions judiciaires de connaître de telles demandes. Dans ces conditions, les conclusions de la société Anvolia 37 tendant à la mobilisation des garanties de la société MMA, ne peuvent qu'être rejetées comme présentées devant une juridiction incompétente pour en connaître.

16. En second lieu, quand bien même il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert que le groupement de maîtrise d'œuvre, chargé d'une mission complète, a manqué à son obligation de surveillance des travaux, il y a lieu de rejeter dans les circonstances de l'espèce les conclusions d'appel en garantie des condamnations prononcées à son encontre par la société Anvolia 37, seule responsable au titre de la garantie de parfait achèvement, qui par sa mauvaise exécution du lot qui lui a été confié est responsable de la survenance des désordres.

Sur les frais liés au litige :

17. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société Anvolia 37 la somme de 2 000 euros à verser à l'université de Tours sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font obstacle à ce que les conclusions présentées par la société Anvolia 37 soient accueillies et, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées par la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés et la société MMA au même titre.

D E C I D E :

Article 1er : La société Anvolia 37 est condamnée à verser à l'université de Tours la somme totale de 10 800 euros TTC au titre des travaux de reprise des désordres. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 29 juin 2020, date d'enregistrement de la requête. Les intérêts seront capitalisés à compter du 29 juin 2021.

Article 2 : La société Anvolia 37 est condamnée à verser à l'université de Tours la somme totale de 13 840 euros TTC au titre de son préjudice financier. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 29 juin 2020, date d'enregistrement de la requête. Les intérêts seront capitalisés à compter du 29 juin 2021.

Article 3 : Les dépens à hauteur totale de 19 293,36 euros TTC sont mis à la charge définitive de la société Anvolia 37.

Article 4 : La société Anvolia 37 versera à l'université de Tours la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent jugement sera notifié à l'université de Tours, à la société Boille, Lavat, Suquet, Architectes associés, à la société Anvolia 37, à la société MJA et à la société AXA ès qualité d'assureur de la société ICR LBE Fluides à laquelle la société Nox Ingénierie vient aux droits et à la société MMA IARD.

Délibéré après l'audience du 7 mars 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Lefebvre-Soppelsa, présidente,

Mme Defranc-Dousset, première conseillère,

M. Joos, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 avril 2023

La présidente-rapporteure,

Anne A

L'assesseure la plus ancienne,

Hélène DEFRANC-DOUSSETLa greffière,

Sarah LEROY

La République mande et ordonne au préfet d'Indre-et-Loire en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.