TA Nîmes, 24/05/2024, n°2401774


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 6 mai 2024, la société Exo Santé, représentée par Me Cazeaux, demande au juge des référés, sur le fondement des dispositions de l'article L. 551-1 du code de justice administrative :

1°) d'annuler la procédure de passation du lot n° 2 " Bornes de téléconsultation " d'un marché de fournitures, relatif à la mise en œuvre d'une solution de télémédecine, engagée par la communauté d'agglomération du Gard Rhodanien ;

2°) d'annuler les décisions consécutives à la procédure de passation ;

3°) d'enjoindre à la communauté d'agglomération du Gard Rhodanien d'organiser une nouvelle procédure de passation.

Elle soutient que :

- elle justifie d'un intérêt pour agir en sa qualité de candidate évincée à ce lot n°2 du marché ;

- son offre a été déclarée à tort et illégalement comme étant irrégulière au motif qu'elle n'aurait pas proposé d'offre de reprise de la borne de téléconsultation au terme du contrat, dès lors qu'elle s'est bornée à proposer un prix de zéro euro et que ce rachat n'apparaît pas comme étant un élément déterminant du marché.

Par un mémoire en observations, enregistré le 16 mai 2024, la société Numérisat, représentée par Me Moutrous, soutient que :

- le bordereau des prix unitaires des deux lots du marché en cause réclamait l'indication du prix de rachat des équipements ;

- le cahier des clauses techniques particulières exigeait du titulaire du marché qu'il soit en capacité de racheter les équipements acquis lors de l'exécution de ce marché et qu'il aurait utilisé pendant une période donnée ;

- la société Exo Santé n'a indiqué aucun prix de rachat et a précisé expressément que son offre ne prévoyait pas de rachat du dispositif.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 mai 2024, la communauté d'agglomération du Gard Rhodanien, représentée par Me Cros, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la société Exo Santé en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que l'offre de la société Exo Santé s'est avérée irrégulière en application des dispositions de l'article L. 2152-1 du code de la commande publique et pouvait être éliminée conformément à ce que prévoit l'article R. 2152-1 de ce code, dès lors qu'elle ne mentionnait aucun prix de rachat des équipements et a clairement porté la mention " pas de rachat du dispositif " alors que cette prestation était exigée du cahier des clauses techniques particulières et du bordereau des prix unitaires.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la commande publique ;

- le code de justice administrative.

Le président du tribunal administratif de Nîmes a désigné M. Roux, vice-président, pour statuer sur les demandes de référés présentées sur le fondement de l'article L. 551-1 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Au cours de l'audience publique tenue le 21 mai 2024 à 14 heures en présence de Mme Paquier, greffière d'audience, ont été entendus :

- le rapport de M. Roux, juge des référés ;

- les observations de Me Cazeaux, représentant la société Exo Santé, qui a repris les moyens invoqués dans ses écritures en précisant que son offre ne prévoit pas le rachat du matériel qu'elle laisse gratuitement à la disposition du client, ce service étant déjà inclus dans le prix global de ses prestations ; de Me Cros, représentant la communauté d'agglomération du Gard Rhodanien et de Me Moutrous, représentant la société Numérisat qui ont repris et précisé leurs écritures.

La clôture de l'instruction a été prononcée à l'issue de l'audience.

Considérant ce qui suit :

1. La communauté d'agglomération a, par un avis publié le 5 octobre 2023, lancé une procédure d'appel d'offres ouvert pour un marché de " Mise en œuvre d'une solution de télémédecine " comprenant deux lots. La société La Box médicale, aujourd'hui dénommée Exo santé, a présenté un dossier de candidature et une offre pour le n° 2, relatif aux " Bornes de téléconsultation ". Elle s'est vue notifier, le 26 avril 2024 un courrier l'informant que son offre avait été déclarée irrégulière et n'avait pas été analysée faute d'avoir proposé un rachat des dispositifs. La société Exo santé demande au juge des référés, sur le fondement de l'article L. 551-1 du code de justice administrative, d'annuler la procédure d'appel d'offre pour ce lot de ce marché et toutes les décisions qui s'y rapportent et d'enjoindre à la communauté d'agglomération du Gard Rhodanien d'en organiser une nouvelle.

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 551-1 du code de justice administrative :

2. Aux termes de l'article L. 551-1 du code de justice administrative : " Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu'il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation par les pouvoirs adjudicateurs de contrats administratifs ayant pour objet l'exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d'exploitation, la délégation d'un service public ou la sélection d'un actionnaire opérateur économique d'une société d'économie mixte à opération unique. / Le juge est saisi avant la conclusion du contrat. ".

3. Aux termes de l'article L. 2152-1 du code de la commande publique : " L'acheteur écarte les offres irrégulières, inacceptables ou inappropriées. ". Selon l'article L. 2152-2 de ce code : " Une offre irrégulière est une offre qui ne respecte pas les exigences formulées dans les documents de la consultation, en particulier parce qu'elle est incomplète, ou qui méconnaît la législation applicable notamment en matière sociale et environnementale. ". Enfin, les dispositions de l'article R. 2152-1 de ce même code prévoient que " Dans les () procédures d'appel d'offres, les offres irrégulières, inappropriées ou inacceptables sont éliminées. ".

4. L'article 4 du cahier des clauses techniques particulières du marché en cause stipule que : " L'acheteur demande au titulaire d'être en capacité de racheter les équipements acquis lors de l'exécution de ce marché et qu'il aurait utilisé pendant une période donnée. ". Le règlement de consultation stipule en son article 5.2, que " pour le choix de l'offre, les candidats doivent produire, pour chaque lot : le bordereau des prix unitaires comprenant un devis quantitatif estimatif non contractuel servant uniquement au jugement des offres. ". Le bordereau des prix unitaires de ce marché comporte trois lignes correspondant à l'indication des prix de rachat de chacun des dispositifs de téléconsultation.

5. Il résulte de l'instruction que l'offre déposée par la société Exo santé comportait un bordereau des prix unitaires n'indiquant aucun prix pour le rachat des équipements des dispositifs de téléconsultation et portant, dans le cadre destiné à accueillir le " commentaire éventuel du candidat ", la mention : " Pas de rachat du dispositif ". La société requérante ne saurait soutenir que le prix de cette prestation aurait été inclus dans le prix d'acquisition dès lors, d'une part, que, pour chacune des autres prestations où elle n'a indiqué aucun prix pour ce motif, le bordereau qu'elle a fourni mentionne expressément les termes : " inclus dans le prix d'acquisition " et, d'autre part, qu'elle a tout aussi expressément confirmé lors de l'audience publique qu'elle ne rachetait pas les équipements acquis qu'elle laisse gratuitement à la disposition du client. La société Exo santé, dont l'offre n'a ainsi pas respecté les exigences formulées dans les documents de la consultation, n'est donc pas fondée à soutenir qu'elle aurait été illégalement rejetée par la communauté d'agglomération du Gard Rhodanien comme irrégulière au sens des dispositions précitées du code de la commande publique.

6. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de la société Exo santé tendant à l'annulation de la procédure de passation du lot n° 2 du marché en cause et de l'ensemble des décisions qui s'y rattachent doivent être rejetée.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Les présent jugement qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par la société Exo santé n'appelle aucune mesure d'exécution. Ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à la communauté d'agglomération du Gard Rhodanien d'organiser une nouvelle procédure d'appel d'offres doivent donc être également rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Exo santé une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au titre des frais exposés par la communauté d'agglomération du Gard Rhodanien et non compris dans les dépens.

O R D O N N E

Article 1er : La requête de la société Exo santé est rejetée.

Article 2 : La société Exo santé versera la somme de 1 000 euros à la communauté d'agglomération du Gard Rhodanien en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Exo santé, à la communauté d'agglomération du Gard Rhodanien et à la société Numérisat.

Fait à Nîmes, le 24 mai 2024.

Le juge des référés,

G. ROUX

La République mande et ordonne au préfet du Gard en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.