TA Amiens, 02/08/2023, n°2102206

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 25 juin 2021, la société NTI Solutions, représentée par

Me Lafay, demande au tribunal :

1°) d'annuler le marché de travaux d'installation du dispositif de vidéosurveillance incluant des prestations de maintenance, conclu par la commune de Villers Saint-Sépulcre le

30 novembre 2020 ou, à défaut, sa résiliation ;

2°) de condamner la commune de Villers Saint-Sépulcre à lui verser la somme de 81 554, 62 euros au titre de l'indemnisation du manque à gagner subi du fait de son éviction de la procédure d'attribution du marché ou, à titre subsidiaire, à lui verser une somme de 10 000 euros au titre de l'indemnisation des frais engagés pour présenter son offre ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Villers Saint-Sépulcre une somme de

5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son offre a été déclarée irrégulière à tort, dès lors que le choix technique qu'elle proposait pour le site n° 11 n'était pas contraire aux stipulations du cahier des clauses techniques particulières (CCTP) ;

- l'irrégularité de son éviction l'a empêchée de conclure le marché, dès lors que son offre, qui était la moins chère, aurait été classée première ;

- les frais engagés pour présenter son offre s'élèvent à 10 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 novembre 2021, la commune de Villers Saint-Sépulcre, représentée par Me Andrieu, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société NTI solutions, sur le fondement de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions présentées à fin d'indemnisation sont irrecevables, d'une part, en raison de leur tardiveté et, d'autre part, du fait que son offre était irrégulière ;

- les conclusions présentées à fin d'annulation et de résiliation du contrat sont tardives ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

La clôture d'instruction a été fixée au 8 novembre 2022, par ordonnance du même jour.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la commande publique ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rondepierre, rapporteure,

- les conclusions de Mme Minet, rapporteure publique,

- et les observations de Me Lafay, représentant la société NTI Solutions, ainsi que celles de Me Andrieu, représentant la commune de Villers Saint-Sépulcre.

Considérant ce qui suit :

1. Le 23 juin 2020, la commune de Villers Saint-Sépulcre a lancé une procédure adaptée en vue de la conclusion d'un marché de travaux d'installation du dispositif de vidéosurveillance incluant également des prestations de maintenance. Par une lettre du 30 novembre 2020, la commune de Villers Saint-Sépulcre a informé la société NTI Solutions du rejet de son offre, en raison de son irrégularité, pour défaut de conformité au cahier ces clauses techniques particulières (CCTP). La société NTI Solutions demande l'annulation du marché ou, à défaut, sa résiliation, et la condamnation de la commune de Villers Saint-Sépulcre à l'indemniser en raison de l'irrégularité de son éviction.

2. Indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l'excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d'un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. Ce recours doit être exercé dans un délai de deux mois à compter de l'accomplissement des mesures de publicité appropriées, notamment au moyen d'un avis mentionnant à la fois la conclusion du contrat et les modalités de sa consultation dans le respect des secrets protégés par la loi.

3. Un concurrent évincé ne peut invoquer, outre les vices d'ordre public dont serait entaché le contrat, que des manquements aux règles applicables à la passation de ce contrat en rapport direct avec son éviction. Au titre de tels manquements, le concurrent évincé peut contester la décision par laquelle son offre a été écartée comme irrégulière.

4. Aux termes de l'article L. 2152-1 du code de la commande publique : " L'acheteur écarte les offres irrégulières, inacceptables ou inappropriées ". Selon l'article L. 2152-2 du même code : " Une offre irrégulière est une offre qui ne respecte pas les exigences formulées dans les documents de la consultation, en particulier parce qu'elle est incomplète, ou qui méconnaît la législation applicable notamment en matière sociale et environnementale ".

5. Sans interdire le recours à une alimentation par batteries, l'article 2.1 du CCTP, qui précisait que la solution la plus économique sur le long terme devait être proposée, en réservait cependant le recours à la condition d'une recharge nocturne des accus compatible avec les périodes d'alimentation de l'éclairage public de la commune. Il résulte de l'instruction, d'une part, que l'offre technique de la société NTI Solutions proposait d'équiper le site n°11 de la commune de Villers Saint-Sépulcre par l'installation, sur un candélabre d'éclairage public existant, d'une caméra alimentée par batteries nécessitant sept heures consécutives de charge. D'autre part, lors de la visite technique obligatoire du site, le 2 juillet 2020, il avait été indiqué à l'ensemble des candidats que la période d'alimentation de l'éclairage public en été se limitait à une heure quotidienne. Il est constant, enfin, que l'offre technique de la société NTI Solutions, qui se bornait à indiquer que l'alimentation était à la charge de la commune, ne présentait aucune évaluation des travaux induits par la solution qu'elle proposait et dont elle proposait au surplus la prise en charge par la commune. Dans ces conditions, et alors que la commune ne pouvait se dispenser d'équiper le site n°11, identifié lors des études préalables au lancement de la procédure, parmi les implantations du maillage nécessaire à la protection globale du territoire communal, le pouvoir adjudicateur a pu, sans méconnaitre les dispositions citées précédemment ni les conditions d'exécution prévues du marché, écarter l'offre de la société NTI Solutions comme étant irrégulière.

6. Il résulte de ce qui précède que la société NTI Solutions n'est pas fondée, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées par la commune de Villers Saint-Sépulcre, à rechercher la responsabilité de la commune de Villers Saint-Sépulcre.

Sur les frais liés au litige :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société NTI Solutions la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Villers Saint-Sépulcre au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de la commune de Villers Saint-Sépulcre, qui n'est pas la partie perdante.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société NTI Solutions est rejetée.

Article 2 : La société NTI Solutions versera à la commune de Villers Saint-Sépulcre la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la société NTI Solutions, à la commune de Villers Saint-Sépulcre et à la société Citéos.

Délibéré après l'audience du 7 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Thérain, président,

- Mme Rondepierre, première conseillère,

- M. Richard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 août 2023.

La rapporteure,

signé

A. Rondepierre

Le président,

signé

S. Thérain

La greffière,

signé

S. Chatellain

La République mande et ordonne à la préfète de l'Oise en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent jugement.

No 2102206