TA Montpellier, 01/03/2023, n°2300812
Vu la procédure suivante :
Par une requête et deux mémoires, enregistrés respectivement les 10, 20 et 28 février 2023, la société Sylamed, représentée par Me Perois et Me Cuzzi, demande au juge des référés statuant en application de l'article L. 551-1 du code de justice administrative :
1°) avant-dire-droit, d'enjoindre au Groupement de Coopération Sanitaire (GCS) "Achats en Santé d'Occitanie" de communiquer, dans un délai de cinq jours, les motifs détaillés du rejet de son offre pour les 21 lots n° 55, 156, 174, 176, 181, 187, 188, 208, 209, 214, 216, 217, 219, 231, 236, 237, 239, 240, 241, 244, 245, pour chacun des critères sous-critères et des éléments d'appréciation, ainsi que les notes attribuées aux offres des attributaires et les caractéristiques et avantages des offres retenues dont le prix du marché public lancé par le GCS Achats en Santé d'Occitanie pour l'attribution d'accords-cadres de fourniture de produits pharmaceutiques ;
2°) d'annuler la procédure d'attribution des lots n° 55, 156, 174, 176, 181, 187, 188, 208, 209, 214, 216, 217, 219, 231, 236, 237, 239, 240, 241, 244, 245 dudit marché public ;
3°) d'enjoindre au GCS Achats en Santé d'Occitanie de reprendre intégralement la procédure d'attribution desdits lots ;
4°) de mettre à la charge du GCS Achats en Santé d'Occitanie la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle est recevable, en sa qualité de soumissionnaire, à saisir le juge des référés précontractuels dès lors qu'elle a intérêt à conclure le contrat dont elle conteste la procédure de passation ;
- en application de l'article R. 2181-3 du code de la commande publique, elle a sollicité la communication des motifs détaillés de rejet de ses offres, or, le courrier du GCS du 10 février 2023, qui ne précise pas les justifications des notes attribuées pour chaque critère et sous-critère pour elle-même et les attributaires, ce qui notamment l'empêche de s'assurer de l'absence de dénaturation de son offre, d'offres anormalement basses ou encore de la réalité de l'absence de prise en compte de la "variante", ne respecte pas les obligations imposées par le code de la commande publique en termes de transparence et d'information des candidats évincés ;
- dans le cadre de l'analyse des offres, le GCS a indiqué que celles-ci seraient appréciées au regard "d'éléments d'appréciation" mais ceux-ci, qui sont constitutifs de sous-critères, disposant d'une pondération nécessairement différenciée, n'ont pas été préalablement annoncés aux candidats ;
- la méthode d'analyse des solutions alternatives, lesquelles constituent des variantes et non des prestations supplémentaires, est manifestement irrégulière dès lors qu'elle aboutit à conférer au GCS la liberté de retenir ou non ces variantes prévues à l'article 3.4.1 du règlement indépendamment de toute analyse basée sur les critères de jugement des offres ;
- la procédure souffre d'une insuffisance de définition précise des besoins du GCS, du fait, d'une part, de l'utilisation des variantes, d'autre part, qu'il n'est pas indiqué, dans les documents de la consultation, les quantités réelles des produits susceptibles d'être commandés à partir du "catalogue complet des produits disponibles du candidat accompagné du tarif général complet et des conditions générales de vente " exigé au règlement et, enfin, que le sous-critère relatif à la responsabilité sociale des entreprises est défini de façon trop générale ;
- le GCS a établi un sous-critère relatif à la responsabilité sociale des entreprises ne concernant pas les conditions dans lesquelles les opérateurs économiques exécuteraient l'accord-cadre mais portant sur l'ensemble de leur activité et ayant pour objectif d'évaluer leur politique générale en matière sociale, environnementale, ce qui est dépourvu de lien avec l'objet du marché ; et ce manquement a été de nature à léser la requérante, dans la mesure où elle a obtenu, systématiquement et pour chacun des lots auxquels elle a soumissionné, la note de 5/20 à ce sous-critère ;
- son offre a été manifestement dénaturée, d'une part, s'agissant de l'appréciation au regard du sous-critère 1.4 "garantie d'approvisionnement", pour lequel elle a remis des éléments identiques pour chaque lot concernés, dès lors qu'elle a obtenu des notes très différentes, variant de 10 à 18, sur la base d'éléments d'appréciation pourtant identiques ; d'autre part, s'agissant de l'évaluation au regard du critère 1.5 " Présentation de la démarche en matière de responsabilité sociétale des entreprises ", elle n'a obtenu que la note de 5/20 alors qu'elle s'est conformée en tout point aux exigences de l'article 5.2.2 du règlement en ayant fourni des éléments identiques pour l'ensemble des lots soumissionnés ; enfin, s'agissant du lot n° 237, il apparaît que l'offre qu'elle a remise n'a tout simplement pas été analysée alors qu'elle a été classée ;
- le GCS n'établit pas que les attributaires des 21 lots auxquels elle a soumissionné ont produit les pièces prévues à l'article 7.5 du règlement de la consultation et qui sont nécessaires à l'attribution du marché, ce qui constituerait une méconnaissance des articles R. 2143-7, R. 2143-8 et R. 2144-7 du code de la commande publique ;
- ces irrégularités, qui l'ont nécessairement lésée, justifient l'annulation de la procédure.
Par un mémoire enregistré le 24 février 2023, le Groupement de Coopération Sanitaire (GCS) " Achats en Santé d'Occitanie ", représentée par Me Rayssac, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société Sylamed la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- les moyens de la requête doivent être regardés comme inopérants dès lors que la requérante, qui ne se classe en deuxième position que sur sept des vingt et un lots dont elle conteste l'attribution, et ne détaille à aucun moment de quelle manière elle aurait été susceptible d'être lésée par les manquements qu'elle invoque ;
- la société Sylamed a reçu notification des motifs du rejet de l'offre, le nom de l'attributaire, ainsi que les motifs qui ont conduit aux choix de son offre, comme le prévoit l'article R. 2181-3 du CCP et, par courrier du 10 février 2023, il lui a été également indiqué, à la suite de sa demande, des éléments complémentaires permettant de bien comprendre les aspects véritablement différenciant ayant amené son offre à ne pas être attributaire sur les lots qu'elle n'a pas remporté comme l'exige l'article R. 2181-4 du même code, en outre s'agissant du sous-critère relatif à la responsabilité sociale des entreprise, lui sont précisés les éléments qui ont conduit à ne lui accorder qu'une note de 5/20 pour tous les lots en cause ;
- les items visés dans la grille d'analyse des offres sont, comme le démontre leur présentation, de simples éléments d'appréciation des sous-critères et il n'est pas nécessaire que chaque élément fasse l'objet d'une notation, donc d'une pondération ; au surplus, ces éléments n'avaient pas nécessairement à être portés à la connaissance des candidats ; la requérante, en se bornant à soutenir qu'elle aurait été en mesure de modifier son offre " en conséquence pour l'optimiser et avoir une chance de remporter la consultation ", alors qu'elle n'avait pas user de la faculté de questionner le pouvoir adjudicateur, n'établit pas que le manquement allégué l'aurait lésée ;
- l'article 3.4.1 du règlement de la consultation prévoit la possibilité pour les candidats de proposer des prestations supplémentaires éventuelles, facultatives, en complément de l'offre de base et non en substitution de celle-ci, et celles-ci n'entrent pas en compte dans l'analyse des offres, de sorte qu'aucune lésion ne peut être invoquée à cet égard ;
- s'agissant de la définition de ses besoins, la demande de catalogue et de conditions générales de vente, qui est une constante des marchés conclus par des groupements de coopération sanitaire, permet de servir de base de renseignements au GCS tout en figeant des tarifs en cas de besoin spécifique durant l'exécution du marché, aucune définition du besoin, s'agissant du catalogue, n'est attendue, les quantités estimatives figurent à l'annexe 3 du CCTP ;
- le pouvoir adjudicateur a bien apprécié de quelle manière le critère de la responsabilité sociale des entreprises est mis en œuvre dans le cadre de l'exécution du marché, l'article 5.2.2 précise que l'attente du GCS consiste à obtenir de la part des candidats non pas des éléments génériques, mais bien une description de la manière dont les soumissionnaires entendent mettre en œuvre les différents " items " mentionnés dans le cadre de l'exécution du marché et qui sont directement en lien avec son objet ; par ailleurs si sont demandées les éventuelles certifications que le soumissionnaire justifie, les certifications ISO mentionnées expressément étant accompagnées de la mention " ou équivalent " ;
- si la société Sylamed soutient que l'analyse de ses offres, au titre du sous-critère " garantie d'approvisionnement ", aurait conduit à une dénaturation de celles-ci dès lors qu'elle a eu des notes différentes en fonction des lots alors qu'elle a remis des " éléments identiques ", les offres étant appréciées lot par lot, il n'existe aucun principe selon lequel une offre identique ne pourrait obtenir une note différente en fonction des lots ; il était attendu une annexe personnalisée par lot, dès lors que les tensions d'approvisionnement ne sont pas les mêmes en fonction des produits concernés ; au surplus, et en tout état de cause, la requérante ne décrit aucune lésion au titre du manquement qu'elle invoque, alors même qu'elle s'est vu attribuer des notes très correctes au titre de ce sous-critère ;
- si la requérante soutient qu'elle s'est conformée en tout point aux attentes du GCS s'agissant du sous-critère " Présentation de la démarche en matière de responsabilité sociétale des entreprises " et qu'elle n'aurait ainsi pas dû obtenir la note de 5/20, cette critique porte sur la notation de l'offre, laquelle n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'aucun effort de présentation, de personnalisation ou d'explication n'a été fourni par la requérante, de telle sorte que son offre a été jugée très insuffisante sur ce sous-critère, à juste titre ;
- l'offre proposée par la société Sylamed pour le lot n°237 porte sur des compresses 16 plis, au lieu de compresses gaze stérile 12 plis, en conséquence, son offre a été éliminée comme irrégulière, comme cela lui a été indiqué en réponse à sa demande d'informations ;
- la société Sylamed se prévaut de l'absence de production par les attributaires des 21 lots des attestations sociales et fiscales exigées à l'article 7.5 du règlement de la consultation, mais, en application de l'article L. 2141-2 du code de la commande publique le candidat auquel il est envisagé d'attribuer le marché ne doit attester notamment qu'il est à jour de ses obligations fiscales et sociales qu'avant la signature du marché ; en tout état de cause, sont produits les certificats sociaux et fiscaux de tous les attributaires des 21 lots.
Par un mémoire enregistré le 28 février 2023, la Sas Raffin Médical, représentée par Me Apelbaum, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société requérante en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés sont soit inopérants soit non fondés en droit.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la commande publique,
- le code de justice administrative.
Le président du tribunal a désigné M. Eric Souteyrand, vice-président, pour statuer sur les demandes de référé.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 28 février 2023 :
- le rapport de M. A ;
- les observations de Me Perois, représentant la société Sylamed ;
- les observations de Me Camus représentant le Groupement de Coopération Sanitaire (GCS) " Achats en Santé d'Occitanie " ;
- et les observations de Me Apelbaum, représentant la Sas Raffin Médical.
L'instruction a été close à 15 heures 30, à l'issue de l'audience.
Considérant ce qui suit :
1. Par un avis en date du 27 mai 2022, le Groupement de Coopération Sanitaire " Achats de Santé en Occitanie " (GCS ASO) a lancé une procédure d'appel d'offres ouvert en vue de la conclusion d'un accord-cadre à bons de commande sans minimum mais avec maximum, ayant pour objet la fourniture de de dispositifs médicaux standard décomposée en 409 lots. La société Sylamed, dont les offres pour les lots 155, 218, 222, 233, 234, 238, 246 et 335 ont été retenues, demande au juge des référés précontractuels l'annulation de la procédure de passation concernant 21 lots : n° 55, 156, 174, 176, 181, 187, 188, 208, 209, 214, 216, 217, 219, 231, 236, 237, 239, 240, 241, 244, et 245, pour lesquels elle avait également soumissionné.
2. Aux termes de l'article L. 551-1 du code de justice administrative : " Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu'il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation par les pouvoirs adjudicateurs de contrats administratifs ayant pour objet l'exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d'exploitation () / Le juge est saisi avant la conclusion du contrat ". Aux termes de l'article L. 551-2 de ce code : " I. Le juge peut ordonner à l'auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre l'exécution de toute décision qui se rapporte à la passation du contrat, sauf s'il estime, en considération de l'ensemble des intérêts susceptibles d'être lésés et notamment de l'intérêt public, que les conséquences négatives de ces mesures pourraient l'emporter sur leurs avantages. Il peut, en outre, annuler les décisions qui se rapportent à la passation du contrat et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations () ". Et, aux termes de l'article L. 551-10 du même code : " Les personnes habilitées à engager les recours prévus aux articles L. 551-1 et L. 551-5 sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d'être lésées par le manquement invoqué () ".
3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 2181-4 du code de la commande publique : " A la demande de tout soumissionnaire ayant fait une offre qui n'a pas été rejetée au motif qu'elle était irrégulière, inacceptable ou inappropriée, l'acheteur communique dans les meilleurs délais et au plus tard quinze jours à compter de la réception de cette demande : 1° Lorsque les négociations ou le dialogue ne sont pas encore achevés, les informations relatives au déroulement et à l'avancement des négociations ou du dialogue ; 2° Lorsque le marché a été attribué, les caractéristiques et les avantages de l'offre retenue. ".
4. Il résulte de l'instruction, d'une part, que la société Sylamed, informée le 31 janvier 2023 du rejet de ses offres pour 21 lots, a, en application de l'article R. 2181-3 du code de la commande publique, sollicité la communication des motifs détaillés de rejet de ses offres, d'autre part, que, le 10 février 2023, le GCS ASO lui a transmis, pour chacun des lots, les notes obtenues par elle-même et l'attributaire pour chaque critère et sous-critère, ainsi que les caractéristiques et les avantages de l'offre de l'attributaire et les justifications correspondantes ayant motivé le rejet de ses propres offres. En outre, s'agissant du sous-critère de la " présentation de la démarche en matière de responsabilité sociale des entreprises ", pondéré à 5%, et pour lequel la société requérante n'a obtenu que la note de 5/20 pour chacun des lots en cause, le GCS ASO a, dans son mémoire en défense (p. 25 n° 35) enregistré le 24 février 2023, précisément exposé les éléments de nature à justifier cette note. Par suite, le moyen tiré de ce que le pouvoir adjudicateur a méconnu les dispositions précitées du code de la commande publique doit être écarté.
5. En deuxième lieu, d'une part, pour assurer le respect des principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, l'information appropriée des candidats sur les critères d'attribution d'un marché public est nécessaire, dès l'engagement de la procédure d'attribution du marché, dans l'avis d'appel public à concurrence ou le cahier des charges tenu à la disposition des candidats. Dans le cas où le pouvoir adjudicateur souhaite retenir d'autres critères que celui du prix, il doit porter à la connaissance des candidats la pondération ou la hiérarchisation de ces critères. Il doit également porter à la connaissance des candidats la pondération ou la hiérarchisation des sous-critères dès lors que, eu égard à leur nature et à l'importance de cette pondération ou hiérarchisation, ils sont susceptibles d'exercer une influence sur la présentation des offres par les candidats ainsi que sur leur sélection et doivent en conséquence être eux-mêmes regardés comme des critères de sélection. Il n'est, en revanche, pas tenu d'informer les candidats de la méthode de notation des offres.
6. D'autre part, le pouvoir adjudicateur définit librement la méthode de notation pour la mise en œuvre de chacun des critères de sélection des offres qu'il a définis et rendus publics. Il peut ainsi déterminer tant les éléments d'appréciation pris en compte pour l'élaboration de la note des critères que les modalités de détermination de cette note par combinaison de ces éléments d'appréciation. Une méthode de notation est toutefois entachée d'irrégularité si, en méconnaissance des principes fondamentaux d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, les éléments d'appréciation pris en compte pour noter les critères de sélection des offres sont dépourvus de tout lien avec les critères dont ils permettent l'évaluation ou si les modalités de détermination de la note des critères de sélection par combinaison de ces éléments sont, par elles-mêmes, de nature à priver de leur portée ces critères ou à neutraliser leur pondération et sont, de ce fait, susceptibles de conduire, pour la mise en œuvre de chaque critère, à ce que la meilleure note ne soit pas attribuée à la meilleure offre, ou, au regard de l'ensemble des critères pondérés, à ce que l'offre économiquement la plus avantageuse ne soit pas choisie. Il en va ainsi alors même que le pouvoir adjudicateur, qui n'y est pas tenu, aurait rendu publique, dans l'avis d'appel à concurrence ou les documents de la consultation, une telle méthode de notation.
7. En l'espèce, selon l'article 7.3 du règlement de la consultation, le critère de la valeur technique, pondéré à 60%, se décompose en cinq sous-critères, eux-mêmes pondérés, auxquels correspondent, pour chacun, des éléments d'appréciation que le pouvoir adjudicateur, a choisi de détailler et de révéler, alors qu'il n'y était pas tenu. En se bornant à soutenir que les notes obtenues sur trois sous-critères révèlerait une pondération " cachée " des éléments d'appréciation, alors qu'il n'est pas contesté que cette méthode de notation, d'une part, est en lien avec chacun de ces sous-critères correspondants, d'autre part, n'est pas de nature à priver de leur portée ces sous-critères ou à neutraliser leur pondération, la société requérante n'établit pas l'irrégularité de la méthode de notation.
8. En troisième lieu, l'article 3.4.1 du règlement de la consultation prévoit des variantes à l'initiative des candidats qui sont " entendues comme des prestations supplémentaires (PSE) " " proposées en complément de l'offre, et non en substitution de celle-ci ", et qui " sont facultatives et rentrent pas en compte dans l'analyse des offres ".
9. Par suite, dès lors qu'il résulte de l'instruction que ces " prestations supplémentaires " n'ont effectivement pas été prises en compte dans les offres, la société requérante n'établit pas que son intérêt est lésé au seul motif qu'elles puissent être regardées, eu égard aux éléments visés au règlement sur lesquels elle portent, comme des solutions alternatives à l'offre de base.
10. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 2152-7 du code de la commande publique : " Le marché est attribué au soumissionnaire ou, le cas échéant, aux soumissionnaires qui ont présenté l'offre économiquement la plus avantageuse sur la base d'un ou plusieurs critères objectifs, précis et liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution () ".
11. Le sous-critère " Responsabilité sociétale des entreprises RSE " est définit à l'article 5.2.2 du règlement de la consultation , aux termes duquel : " La responsabilité sociétale des entreprises est entendue dans le cadre du présent marché selon la définition retenue par la Commission européenne comme l'intégration volontaire, par les entreprises, de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations avec leurs parties prenantes.() Le candidat présente ainsi dans son offre : 1- Sa démarche RSE : • Visant la réduction des gaz à effet de serre (GES) ; • Ses actions visant la diminution de sa consommation d'électricité ; • Le contrôle de sa production des déchets. Il fournira des informations complémentaires concernant les produits de calage dans ses colis (qualité (chips, papier, coussin, frisure), matière première, mode d'élimination requis) ; • Les principaux publics intégrés affectés à l'exécution du marché (Parité homme / femme ; catégorie d'âge, personnel handicapé). 2- Les éventuelles certifications qu'il justifie, notamment dans les domaines suivants : () Il est rappelé au candidat qu'au titre des éléments ci-dessous, il n'est pas attendu une liste d'éléments génériques sur la politique RSE de l'entreprise sans lien avec l'objet de l'accord-cadre, mais bien la manière dont celui-ci entend mettre en oeuvre ces différents éléments pour l'exécution de l'accord-cadre. ". Il résulte de la rédaction de ce sous-critère que le pouvoir adjudicateur a bien entendu fixer des conditions, directement en lien avec l'objet du marché, dans lesquelles les opérateurs économiques exécuteraient l'accord-cadre, contrairement à ce que soutient la société requérante.
12. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 2111-1 du code de la commande publique : " La nature et l'étendue des besoins à satisfaire sont déterminées avec précision avant le lancement de la consultation en prenant en compte des objectifs de développement durable dans leurs dimensions économique, sociale et environnementale ". Il en résulte que le pouvoir adjudicateur doit définir ses besoins avec suffisamment de précision pour permettre aux candidats de présenter une offre adaptée aux prestations attendues, compte tenu des moyens nécessaires pour les réaliser. Pour permettre l'élaboration de cette offre et pour en déterminer le prix, les candidats doivent disposer, notamment dans le cadre d'une procédure de passation formalisée ne permettant pas de négociation avec le pouvoir adjudicateur, d'informations relatives à la date d'achèvement du marché. Le juge du référé précontractuel exerce sur le choix que fait le pouvoir adjudicateur, lorsqu'il procède à la définition de son besoin, de l'objet même de la commande qui donne lieu à la passation du marché, un contrôle de l'erreur manifeste d'appréciation.
13. D'une part, la seule circonstance que des prestations supplémentaires facultatives soient prévues au règlement de la consultation n'est pas de nature à établir, en soi, une insuffisante détermination des besoins à satisfaire dans l'offre de base. D'autre part, contrairement à ce que soutient la société Sylamed, le pouvoir adjudicateur a fixé, comme cela résulte de l'annexe 3 du réglement, non seulement les quantités maximales pour chaque lot, mais aussi les quantités estimatives demandées ; par suite, la seule circonstance que soient exigés, au règlement de la consultation, le catalogue et les conditions générales de vente des entreprises soumissionnaires, n'a pas été de nature à faire obstacle à la détermination du prix dans l'élaboration des offres. Par ailleurs, ainsi qu'il l'a dit au point 11, l'article 5.2.2 définit avec suffisamment de précisions les attentes du GCS ASO s'agissant du sous-critère de la responsabilité sociale des entreprises. En conséquence, il y a lieu d'écarter, en toutes ses branches, le moyen tiré de l'insuffisante définition des besoins.
14. En sixième lieu, il n'appartient pas au juge du référé précontractuel, qui doit seulement se prononcer sur le respect, par le pouvoir adjudicateur, des obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation d'un contrat, de se prononcer sur l'appréciation portée sur la valeur d'une offre ou les mérites respectifs des différentes offres. Il lui appartient, en revanche, lorsqu'il est saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le pouvoir adjudicateur n'a pas dénaturé le contenu d'une offre en en méconnaissant ou en altérant manifestement les termes et procédé ainsi à la sélection de l'attributaire du contrat en méconnaissance du principe fondamental d'égalité de traitement des candidats.
15. D'une part, dès lors que les 21 lots en litige concernent des produits différents et que l'appréciation des offres se fait lot par lot, la seule circonstance que le pouvoir adjudicateur a donné, pour des garanties identiques proposées par la société Sylamed, des notes différentes dans chaque lot au titre du sous-critère " garanties d'approvisionnement ", n'est pas de nature à révéler une dénaturation des offres. D'autre part, et inversement, dès lors qu'eu égard aux éléments que le compose, tels que sus-décrits au point 11, l'appréciation du sous-critère " Responsabilité sociétale des entreprises RSE " n'est pas différenciée selon chaque lot de produits, mais porte sur les pratiques sociales et environnementales de l'entreprise candidate pour l'exécution de l'accord-cadre, la circonstance que la requérante a obtenu, dans chaque lot, la même note de 5/20, au titre de ce sous-critère, n'est pas plus de nature à établir la dénaturation de ses offres. Enfin, et dès lors que l'offre proposée par la société Sylamed pour le lot n°237 porte sur des compresses 16 plis, au lieu de compresses gaze stérile 12 plis telles qu'exigées au règlement, c'est sans dénaturation que son offre a été éliminée comme irrégulière, comme cela lui a été indiqué en réponse à sa demande d'informations.
16. En septième et dernier lieu, si la société Sylamed se prévaut de l'absence de production, par les attributaires des 21 lots en litige, des attestations sociales et fiscales exigées à l'article 7.5 du règlement de la consultation, il résulte des pièces produites que le moyen, à le supposer même opérant, manque, en toute état de cause, en fait.
17. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de la requête de la société Sylamed aux fins d'annulation de la procédure de passation pour les lots n° 55, 156, 174, 176, 181, 187, 188, 208, 209, 214, 216, 217, 219, 231, 236, 237, 239, 240, 241, 244, 245 du marché passé par le Groupement de Coopération Sanitaire (GCS) " Achats en Santé d'Occitanie " doivent être écartées. Et il va de même, par voie de conséquence, des conclusions aux fins d'injonction.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du Groupement de Coopération Sanitaire (GCS) " Achats en Santé d'Occitanie ", qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que sollicite la société Sylamed au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Et, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société Sylamed une somme de 2 500 à verser au Groupement de Coopération Sanitaire (GCS) " Achats en Santé d'Occitanie " et de 2 000 à verser à la société Raffin Médical au titre des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Sylamled est rejetée.
Article 2 : La société Sylamed versera les sommes de 2 500 au Groupement de Coopération Sanitaire (GCS) " Achats en Santé d'Occitanie " et 2 000 à la société Raffin Médical en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Sylamed, au Groupement de Coopération Sanitaire (GCS) " Achats en Santé d'Occitanie " et à la Sas Raffin Médical.
Fait à Montpellier, le 1er mars 2023,
Le juge des référés,
E. A
La greffière
A. FarellLa République mande et ordonne au préfet de la région Occitanie en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.
Pour expédition conforme,
Montpellier, le 1er mars 2023.
La greffière,
A. Farell