TA Guadeloupe, 10/05/2024, n°2400493


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 19 et 29 avril, 2, 4 et 6 mai 2024, sous le n° 2400493, la SA Pajamandy, représentée par Me Orier, demande au juge des référés, statuant sur le fondement de l'article L.551-1 du code de justice administrative :

1°) d'annuler la procédure de passation du lot n° 11 du marché public relatif à l'exécution de prestations de services de transport public de voyageurs à vocation scolaire situés sur le périmètre du syndicat mixte des transports du Petit Cul de Sac Marin ;

2°) d'enjoindre au syndicat mixte des transports du Petit Cul de Sac Marin, si elle entend maintenir la procédure de passation, de relancer la procédure de passation du lot n° 11 ;

3°) de mettre à la charge du syndicat mixte des transports du petit Cul de Sac Marin la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a intérêt à agir, en sa qualité de candidat évincé ;

- la société Sofavita ne dispose pas des capacités économiques, financières et professionnelles lui permettant d'assumer la réalisation du lot n°11 ; le syndicat mixte des transports du Petit Cul de Sac Marin n'a demandé les attestations fiscales sociales des attributaires des différents lots du marché public en question qu'au moment de la notification du rejet des offres des autres candidats ; ces éléments confirment qu'aucun contrôle de la capacité des entreprises n'a été réalisé au stade de la candidature ;

- les capacités techniques n'ont pas été contrôlées ;

- elle n'a pas obtenu de réponse à sa demande de communication des notes obtenues pour chaque sous-sous-critère ;

- le sous-critère n°3 de la valeur technique se rapporte aux matériels nécessaires à l'exécution du marché alors que ces éléments doivent être appréciés en phase de candidature et n'ont pas à être analysés en phase d'offre ;

- les attestations fiscales et sociales ont été délivrées postérieurement à l'attribution du lot litigieux ;

- l'offre présentée par l'attributaire du lot n°11 est 30% moins élevée que la sienne et 45% moins élevée que les prix pratiqués par le précédent titulaire de ce marché ; ce simple constat aurait dû conduire le syndicat mixte des transports du PCSM à mettre en œuvre la procédure de détection et de rejet des offres anormalement basses.

Par des mémoires en défense et de transmission de pièces, enregistrés les 1er, 3 et 6 mai 2024, le syndicat mixte des transports du petit Cul de Sac Marin, représenté par le cabinet Taithe Panassac associés, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la SA Pajamandy de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les moyens ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 6 mai 2024, la société Sofavita mandataire solidaire du GMES SYNERGIE BUS, représentée par Me Durand, conclut à l'irrecevabilité de la requête, à son rejet et à la mise à la charge de la société requérante de la somme de 4000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la société requérante ne démontre aucune lésion ;

- les moyens ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée, le 22 avril 2024, à l'entreprise Pajamandy Eric EPE qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'arrêté du 22 mars 2019 fixant la liste des impôts, taxes, contributions ou cotisations sociales donnant lieu à la délivrance de certificats pour l'attribution des contrats de la commande publique ;

- le code de la commande publique ;

- le code de justice administrative.

Le président du tribunal a désigné Mme Mahé, vice-présidente, en application de l'article L.551-1 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique du 6 mai 2024 à 9 heures.

Ont été entendus aux cours de l'audience publique, en présence de Mme Cétol, greffière :

- le rapport de Mme Mahé, juge des référés ;

- les observations de Me Orier, avocat de la SARL Pajamandy, qui reprenant ses écritures, soutient que la société Sofavita n'a pas les capacités techniques et financières pour assurer l'exécution du marché, qu'il n'y a pas eu de notation des sous-sous-critères qui ont été pondérés et que les attestations fiscales et sociales ont été vérifiées après que son offre ait été rejetée ;

- les observations de Me Panassac, avocat du syndicat mixte des transports du PCSM qui précise que les sous-sous-critères ont fait l'objet d'une notation, que les attestations fiscales et sociales ont été délivrées avant la signature du marché et qu'elles sont régulières ;

- les observations de Me Neveu, substituant Me Durand, avocat de la société SOFAVITA mandataire solidaire du GMES SYNERGIE BUS dans le dossier 2400493 qui souligne qu'elle a les capacités techniques et financières pour assurer l'exécution du marché.

La clôture de l'instruction a été fixée à l'issue de l'audience à 13 heures après que les mémoires et requête aient été communiqués, avant l'audience, aux parties.

La SARL Sofavita (mandataire solidaire du GMES Synergie Bus), représentée par Me Durand, a produit une note en délibéré, enregistrée le 7 mai 2024 et une lettre, enregistré le 10 mai 2024.

La SARL Pajamandy, représentée par Me Orier, a présenté une note en délibéré enregistrée le 7 mai 2024.

Le syndicat Mixte des transports du PCSM a présenté une note en délibéré enregistrée le 7 mai 2024.

Considérant ce qui suit :

1. Par un avis public d'appel à la concurrence publié le 7 janvier 2024, le syndicat mixte des transports du Petit Cul de Sac Marin (PCSM) a lancé une procédure d'appel d'offres ouvert portant sur des prestations de services de transport public de voyageurs à vocation scolaire situés sur le périmètre de ce syndicat comportant 24 lots passés sous la forme d'accord cadre mono-attributaire à bons de commande pour une valeur totale de 13 000 000 euros HT. La

SA Pajamandy a présenté une offre visant au gain du lot n° 11. Par une lettre du 8 avril 2024, le syndicat mixte des transports du PCSM l'a informé que son offre n'avait pas été retenue, celle-ci n'ayant pas été jugée économiquement la plus avantageuse au regard des critères de choix définis dans le règlement de consultation. Par la présente requête, la SA Pajamandy demande au juge des référés, statuant par application de l'article L. 551-1 du code de justice administrative, d'annuler la procédure d'attribution des marchés concernant le lot n°11 et d'enjoindre au pouvoir adjudicateur la reprise de la procédure de passation de ces marchés.

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 551-1 du code de justice administrative :

2. Aux termes de l'article L. 551-1 du code de justice administrative : " Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu'il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation par les pouvoirs adjudicateurs de contrats administratifs ayant pour objet l'exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d'exploitation, ou la délégation d'un service public. / Le juge est saisi avant la conclusion du contrat ". Aux termes de son article L. 551-3 : " Le président du tribunal administratif ou son délégué statue en premier et dernier ressort en la forme des référés ".

3. En vertu de ces dispositions, les personnes habilitées à agir pour mettre fin aux manquements du pouvoir adjudicateur à ses obligations de publicité et de mise en concurrence sont celles qui sont susceptibles d'être lésées par de tels manquements. Il appartient dès lors au juge des référés précontractuels de rechercher si l'entreprise qui le saisit se prévaut de manquements qui, eu égard à leur portée et au stade de la procédure auquel ils se rapportent, sont susceptibles de l'avoir lésée ou risquent de la léser, fût-ce de façon indirecte en avantageant une entreprise concurrente. Le juge saisi peut ordonner à l'auteur d'un manquement aux dispositions auxquelles ces dispositions se réfèrent, de se conformer à ses obligations, suspendre la passation du contrat ou l'exécution de toute décision qui s'y rapporte, annuler ces décisions et supprimer des clauses ou des prescriptions destinées à figurer dans le contrat. Toutefois, les pouvoirs conférés au juge des référés précontractuels par l'article L. 551-1 du code de justice administrative ne peuvent plus être exercés après la conclusion du contrat.

En ce qui concerne le moyen tiré de l'absence de contrôle de l'acheteur des capacités professionnelles, économiques et financières des candidats et de l'inaptitude de la société Sofavita à réaliser les prestations :

4.Aux termes de l'article L. 2142-1 du code de la commande publique : " L'acheteur ne peut imposer aux candidats des conditions de participation à la procédure de passation autres que celles propres à garantir qu'ils disposent de l'aptitude à exercer l'activité professionnelle, de la capacité économique et financière ou des capacités techniques et professionnelles nécessaires à l'exécution du marché. / Ces conditions sont liées et proportionnées à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution. ". Aux termes de l'article R. 2142-1 du même code : " Les conditions de participation à la procédure de passation relatives aux capacités du candidat mentionnées à l'article L. 2142-1, ainsi que les moyens de preuve acceptables, sont indiqués par l'acheteur dans l'avis d'appel à la concurrence ou dans l'invitation à confirmer l'intérêt ou, en l'absence d'un tel avis ou d'une telle invitation, dans les documents de la consultation. ". Aux termes de l'article R. 2143-3 de ce code : " Le candidat produit à l'appui de sa candidature : / () 2° Les renseignements demandés par l'acheteur aux fins de vérification de l'aptitude à exercer l'activité professionnelle, de la capacité économique et financière et des capacités techniques et professionnelles du candidat. ". Aux termes de l'article R. 2144-3 du code de la commande publique : " La vérification de l'aptitude à exercer l'activité professionnelle, de la capacité économique et financière et des capacités techniques et professionnelles des candidats peut être effectuée à tout moment de la procédure et au plus tard avant l'attribution du marché. ".

5.Il résulte de ces dispositions que le pouvoir adjudicateur doit contrôler les garanties professionnelles, techniques et financières des candidats à l'attribution d'un marché public. Les documents ou renseignements exigés à l'appui des candidatures doivent être objectivement rendus nécessaires par l'objet du marché et la nature des prestations à réaliser. Le juge du référé précontractuel ne peut censurer l'appréciation portée par le pouvoir adjudicateur sur les niveaux de capacité technique exigés des candidats à un marché public, ainsi que sur les garanties, capacités techniques et références professionnelles présentées par ceux-ci que dans le cas où cette appréciation est entachée d'une erreur manifeste.

6. La société requérante soutient que la société Sofavita aurait présenté un chiffre d'affaires de 295 000 en 2020 soit un montant inférieur au montant estimatif annuel des lots en litige. Elle ajoute que le chiffre d'affaires de cette société est en baisse depuis 2016. Toutefois, de telles circonstances qui s'appuient sur des recherches internet sont, à les supposer établies, insuffisantes pour démontrer l'inaptitude de cette société à réaliser les prestations du lot n°11 alors que la crise sanitaire a mis à l'arrêt l'activité des entreprises de transport sur une majeure partie de l'année. En outre, le lot en litige a été attribué à un groupement constitué entre les entreprises Société SOFAVITA, mandataire et l'entreprise PAJAMANDY ERIC, cotraitant, dont il est constant qu'en 2022, les deux candidats présentaient un chiffre d'affaires sur l'exercice 2022 représentant près de 1,4 millions d'euros HT, soit quasiment le double du chiffre d'affaires des trois lots additionnés qu'ils ont obtenus. En outre la société Sofavita verse au dossier une attestation de son expert-comptable du 28 juillet 2023 selon laquelle, elle a réalisé un chiffre d'affaires de 781 996,77 euros au titre de l'exercice 2022. Par suite, le moyen tiré de l'absence de contrôle de l'acheteur des capacités professionnelles, économiques et financières des candidats et de l'inaptitude de la société Sofavita à réaliser les prestations du lot n° 11 doit être écarté.

En ce qui concerne le moyen tiré de l'absence de communication des notes obtenues par sous-sous critères :

7.Aux termes de l'article L. 2181-1 du code de la commande publique : " Dès qu'il a fait son choix, l'acheteur le communique aux candidats et aux soumissionnaires dont la candidature ou l'offre n'a pas été retenue, dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat ". Aux termes de l'article R. 2181-1 du code de la commande publique : " L'acheteur notifie sans délai à chaque candidat ou soumissionnaire concerné sa décision de rejeter sa candidature ou son offre ". L'article R. 2181-3 du même code énonce que : " La notification prévue à l'article R. 2181-1 mentionne les motifs du rejet de la candidature ou de l'offre. / Lorsque la notification de rejet intervient après l'attribution du marché, l'acheteur communique en outre : / 1° Le nom de l'attributaire ainsi que les motifs qui ont conduit au choix de son offre ; / 2° La date à compter de laquelle il est susceptible de signer le marché dans le respect des dispositions de l'article R. 2182-1 ". Aux termes de l'article R. 2181-4 de ce code : " A la demande de tout soumissionnaire ayant fait une offre qui n'a pas été rejetée au motif qu'elle était irrégulière, inacceptable ou inappropriée, l'acheteur communique dans les meilleurs délais et au plus tard quinze jours à compter de la réception de cette demande : () / 2° Lorsque le marché a été attribué, les caractéristiques et les avantages de l'offre retenue ".

8.L'information sur les motifs du rejet de son offre dont est destinataire la société évincée de la procédure de conclusion d'un marché public, en application des dispositions citées au point précédent, a notamment pour objet de lui permettre de contester utilement le rejet qui lui est opposé devant le juge des référés précontractuels saisi en application de l'article L. 551-1 du code de justice administrative. Par suite, l'absence de respect de ces dispositions constitue un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence. L'absence de communication par le pouvoir adjudicateur de l'une des informations mentionnées par les dispositions du code de la commande publique citées au point précédent doit conduire le juge du référé précontractuel à enjoindre à ce dernier de communiquer les informations manquantes au candidat dont l'offre, bien que recevable, a été rejetée. Cependant, un tel manquement n'est plus constitué si l'ensemble des informations, mentionnées aux articles du code de la commande publique précités, a été communiqué au candidat évincé à la date à laquelle le juge des référés statue sur le fondement de l'article L. 551-1 du code de justice administrative, et si le délai qui s'est écoulé entre cette communication et la date à laquelle le juge des référés statue a été suffisant pour permettre à ce candidat de contester utilement son éviction.

9.Il résulte de l'instruction que, par lettre du 8 avril 2024, la SARL Pajamandy a été informée par le syndicat mixte des transports du Petit-Cul-de-Sac-Marin du rejet de son offre pour le lot en litige au motif qu'elle avait été classée 2ème avec une note globale de 67,22 sur 100. Elle a eu communication de ses notes sur le critère technique noté sur 40 et sur le critère prix noté sur 60. Elle a également été informée, sous la forme d'un tableau, des notes obtenues sur chacun de ces critères par la société attributaire. La société requérante disposait ainsi de suffisamment d'informations, en particulier le nom de l'attributaire du lot, le classement des offres, les notes qui lui ont été attribuées et celles qu'a reçue l'offre retenue supérieure à la sienne sur les deux critères de sorte que les motifs de rejet de son offre et les caractéristiques et avantages de l'offre retenue se déduisaient suffisamment des termes de cette notification, et ce qui rendait au demeurant inutile de communiquer le détail de sa notation par sous-sous-critères. Par ailleurs, cette lettre précisait, qu'en application de l'article R. 2182-1 du code de la commande publique, le syndicat mixte des transports du Petit-Cul-de-Sac-Marin était susceptible de signer le marché, à compter du 11ème jour suivant la date d'envoi du courrier. En outre, dans le cadre de la présente instance, le syndicat mixte des transports du PCSM lui a communiqué les extraits du rapport d'analyse des offres, par critères et sous-critères, concernant l'ensemble des lots qu'elle avait soumissionnés. Dans ces conditions, eu égard aux informations transmises dès le 8 avril 2024 et des compléments d'information apportés par le syndicat mixte des transports du PCSM en cours d'instruction, le moyen tiré de ce que ce syndicat a méconnu son obligation d'information des candidats évincés doit être écarté.

En ce qui concerne le moyen tiré de l'irrégularité des sous-critères d'attribution de la valeur technique :

10. Aux termes de l'article L. 2152-7 du code de la commande publique : " Le marché est attribué au soumissionnaire ou, le cas échéant, aux soumissionnaires qui ont présenté l'offre économiquement la plus avantageuse sur la base d'un ou plusieurs critères objectifs, précis et liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution. Les modalités d'application du présent alinéa sont prévues par voie réglementaire. () ". Aux termes de l'article R. 2152-7 du même code : " Pour attribuer le marché au soumissionnaire (), l'acheteur se fonde : 1° Soit sur un critère unique qui peut être : () 2° Soit sur une pluralité de critères non-discriminatoires et liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution, parmi lesquels figure le critère du prix ou du coût et un ou plusieurs autres critères comprenant des aspects qualitatifs, environnementaux ou sociaux. Il peut s'agir des critères suivants : a) La qualité, y compris la valeur technique et les caractéristiques esthétiques ou fonctionnelles, l'accessibilité, l'apprentissage, la diversité, les conditions de production et de commercialisation, () ; b) Les délais d'exécution, () les caractéristiques opérationnelles ; c) L'organisation, les qualifications et l'expérience du personnel assigné à l'exécution du marché lorsque la qualité du personnel assigné peut avoir une influence significative sur le niveau d'exécution du marché. D'autres critères peuvent être pris en compte s'ils sont justifiés par l'objet du marché ou ses conditions d'exécution. () ".

11. D'une part, pour assurer le respect des principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, l'information appropriée des candidats sur les critères d'attribution d'un marché public est nécessaire dès l'engagement de la procédure d'attribution. Dans le cas où le pouvoir adjudicateur souhaite retenir d'autres critères que celui du prix, l'information appropriée des candidats doit alors porter également sur les conditions de mise en œuvre de ces critères. Il appartient au pouvoir adjudicateur d'indiquer les critères d'attribution du marché et les conditions de leur mise en œuvre selon les modalités appropriées à l'objet, aux caractéristiques et au montant du marché concerné. En outre, si le pouvoir adjudicateur décide, pour mettre en œuvre ces critères de sélection des offres, de faire usage de sous-critères, il doit porter à la connaissance des candidats leurs conditions de mise en œuvre dès lors que ces sous-critères sont susceptibles d'exercer une influence sur la présentation des offres par les candidats ainsi que sur leur sélection et doivent en conséquence être eux-mêmes regardés comme des critères de sélection.

12. D'autre part, si les dispositions de l'article L. 2142-1 du code de la commande publique imposent au pouvoir adjudicateur de vérifier les capacités des candidats au moment de l'examen des candidatures, ces dispositions ne lui interdisent pas, s'il est non discriminatoire et lié à l'objet du marché, de retenir un critère ou un sous-critère relatif aux moyens en personnel et en matériel affectés par le candidat à l'exécution des prestations du marché afin d'en garantir la qualité technique.

13.En application de l'article 8 du règlement de consultation, le critère technique comprend 6 sous-critères dont le 3 noté sur 5 points concerne " Qualité du parc (âge, kilomètres au compteur) et énergie propre du parc de véhicules ". La société requérante soutient que l'appréciation des moyens matériels au stade de l'offre est irrégulière dès lors que cette appréciation a déjà été faite au stade de la sélection des candidatures. Toutefois, compte tenu de la nature des prestations à réaliser qui concernent les transports scolaires, l'acheteur pouvait, sans méconnaître les dispositions précitées au point 12, retenir un sous-critère relatif à la qualité du parc en véhicules affecté par le candidat à l'exécution des prestations du marché afin d'en garantir la qualité technique. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de ce sous-critère ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des articles L.2141-2 et R. 2144-7 du code de la commande publique :

14. D'une part, aux termes de l'article L. 2141-2 du code de la commande publique : " Sont exclues de la procédure de passation des marchés les personnes qui n'ont pas souscrit les déclarations leur incombant en matière fiscale ou sociale ou n'ont pas acquitté les impôts, taxes, contributions ou cotisations sociales exigibles. () ". Aux termes de l'article R. 2143-7 du même code : " L'acheteur accepte comme preuve suffisante attestant que le candidat ne se trouve pas dans un cas d'exclusion mentionné à l'article L. 2141-2, les certificats délivrés par les administrations et organismes compétents. La liste des impôts, taxes, contributions ou cotisations sociales devant donner lieu à délivrance d'un certificat ainsi que la liste des administrations et organismes compétents figurent dans un arrêté () ". Aux termes de l'article 2 de l'arrêté du 22 mars 2019 susvisé : " I.- Sans préjudice du III, le certificat prévu aux articles R. 2143-7, () du code de la commande publique susvisé est l'attestation mentionnée à l'article L. 243-15 du code de la sécurité sociale. () ". Aux termes de l'article R. 2144-4 du code de la commande publique : " L'acheteur ne peut exiger que du seul candidat auquel il est envisagé d'attribuer le marché qu'il justifie ne pas relever d'un motif d'exclusion de la procédure de passation du marché. ". Enfin, aux termes de l'article R.2144-7 du même code : " Si un candidat ou un soumissionnaire se trouve dans un cas d'exclusion, ne satisfait pas aux conditions de participation fixées par l'acheteur, produit, à l'appui de sa candidature, de faux renseignements ou documents, ou ne peut produire dans le délai imparti les documents justificatifs, les moyens de preuve, les compléments ou explications requis par l'acheteur, sa candidature est déclarée irrecevable et le candidat est éliminé. Dans ce cas, lorsque la vérification des candidatures intervient après la sélection des candidats ou le classement des offres, le candidat ou le soumissionnaire dont la candidature ou l'offre a été classée immédiatement après la sienne est sollicité pour produire les documents nécessaires. Si nécessaire, cette procédure peut être reproduite tant qu'il subsiste des candidatures recevables ou des offres qui n'ont pas été écartées au motif qu'elles sont inappropriées, irrégulières ou inacceptables. ".

15. D'autre part, aux termes de l'article 9 du règlement de consultation : " L'offre la mieux classée sera retenue à titre provisoire en attendant que le candidat produise les certificats et attestations des articles R. 2143-6 à R. 2143-10 du code de la commande publique () Le délai imparti par le pouvoir adjudicateur pour remettre ces documents ne pourra être supérieur à 10 jours () ". Ce même article précise que " En application de l'article R.2144-7 (), si le candidat retenu ne peut produire ces documents dans le délai imparti, sa candidature sera déclarée irrecevable et le candidat sera éliminé. Le candidat dont l'offre a été classée immédiatement après la sienne est sollicité pour produire les certificats et attestations nécessaires avant le que le marché ne lui soit attribué. ().

16. La société requérante soutient que le syndicat mixte des transports du PCSM n'a demandé les attestations fiscales sociales des attributaires du lot n°11 qu'au moment de la notification de la décision de rejet de son offre du 8 avril 2024 et après avoir désigné l'attributaire du lot. Il résulte, en effet, de l'instruction que la vérification des candidatures est intervenue après la sélection des candidats ou le classement des offres ainsi qu'il en résulte de la date des attestations fiscales et sociales produites qui sont postérieures au 8 avril 2024 à l'exception de l'attestation URSSAF. Toutefois, si le syndicat mixte des transports du PCSM n'a vérifié les motifs d'exclusion de la procédure de passation qu'après avoir attribué le marché au groupement d'entreprises GMes Synergie Bus, SARL Sofavita, tel que cela résulte de la décision du 8 avril 2024, la société Pajamandy ne justifie pas avoir été lésée par la mise en œuvre de cette procédure dès lors que le groupement a délivré, à la demande du pouvoir adjudicateur, des attestations en cours de validité justifiant qu'il ne relevait ainsi d'aucun motif d'exclusion dans les délais fixés par le pouvoir adjudicateur. Par suite, le moyen tiré de ce qu'une irrégularité aurait été commise au stade de la vérification des cas d'exclusion de l'entreprise attributaire doit être écarté.

En ce qui concerne le moyen tiré de l'absence de contrôle des offres anormalement basses :

17. Aux termes de l'article L.2152-5 du code de la commande publique : " Une offre anormalement basse est une offre dont le prix est manifestement sous-évalué et de nature à compromettre la bonne exécution du marché ". Aux termes de l'article L.2152-6 du même code : " L'acheteur met en œuvre tous moyens lui permettant de détecter les offres anormalement basses. Lorsqu'une offre semble anormalement basse, l'acheteur exige que l'opérateur économique fournisse des précisions et justifications sur le montant de son offre.

Si, après vérification des justifications fournies par l'opérateur économique, l'acheteur établit que l'offre est anormalement basse, il la rejette dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat. ".

18. Le fait, pour un pouvoir adjudicateur, de retenir une offre anormalement basse porte atteinte à l'égalité entre les candidats à l'attribution d'un marché public. Il résulte des dispositions précitées que, quelle que soit la procédure de passation mise en œuvre, il incombe au pouvoir adjudicateur qui constate qu'une offre paraît anormalement basse de solliciter auprès de son auteur toutes précisions et justifications de nature à expliquer le prix proposé. Si les précisions et justifications apportées ne sont pas suffisantes pour que le prix proposé ne soit pas regardé comme manifestement sous-évalué et de nature, ainsi, à compromettre la bonne exécution du marché, il appartient au pouvoir adjudicateur de rejeter l'offre. Toutefois, pour estimer que l'offre de l'attributaire est anormalement basse, le pouvoir adjudicateur ne peut se fonder sur le seul écart de prix avec l'offre concurrente, sans rechercher si le prix en cause est lui-même manifestement sous-évalué et, ainsi, susceptible de compromettre la bonne exécution du marché. Enfin, si le moyen tiré de ce que le pouvoir adjudicateur aurait dû rejeter une offre anormalement basse est utilement invocable dans le cadre du référé précontractuel, le juge du référé précontractuel exerce sur un tel refus un contrôle limité à l'erreur manifeste d'appréciation.

19. La société requérante soutient que l'offre présentée par l'attributaire du lot n°11 est 30% moins élevée que son offre et 45% moins élevée que les prix pratiqués par le précédent titulaire de ce marché. Toutefois, ce seul constat, à le supposer établi, n'est pas, à lui seul, susceptible de démontrer que le pouvoir adjudicateur aurait dû mettre en œuvre la procédure de détection d'une offre anormalement basse. En outre, la société requérante ne démontre pas que les prix proposés par la société attributaire du lot n° 11 révèlent des coûts manifestement sous-évalués. Par suite, le moyen doit être écarté.

20. Il résulte de tout ce qui précède que la société Pajamandy n'est pas fondée à soutenir que le pouvoir adjudicateur a manqué à ses obligations de publicité et de mise en concurrence en ce qui concerne le lot n°11, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la société Sofavita. Par suite, les conclusions de la requête n° 2400493 doivent être rejetées en toutes ses conclusions.

Sur les frais du litige :

21. Aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

22. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SARL Pajamandy une somme de 1 500 euros à verser respectivement au syndicat mixte des transports du PCSM et à la SARL Sofavita (mandataire solidaire du GMES Synergie Bus SARL) au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens. Par ailleurs, les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce qu'une somme soit mise à la charge du syndicat mixte des transports du PCSM, qui n'est pas la partie perdante, la somme demandée par la SARL Pajamandy.

ORDONNE :

Article 1er : Les conclusions de la requête n° 2400493 présentées par la SARL Pajamandy sont rejetées.

Article 2 : La SARL Pajamandy versera au syndicat mixte des transports du PCSM la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative

Article 3 : La SARL Pajamandy versera à la SARL Sofavita (mandataire solidaire du GMES Synergie Bus SARL) la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à la SARL Pajamandy, au syndicat mixte des transports du PCSM, à la SARL Sofavita, mandataire solidaire de la société Gmes Synergie Bus et à la société Pajamandy Eric EPE.

Fait à Basse Terre, le 10 mai 2024.

Le Juge des référés,

Signé

N. MAHE

La République mande et ordonne au préfet de la Guadeloupe en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

L'adjointe de la greffière en chef,

Signé

A. Cétol

N°2400493