TA Orléans, 07/02/2023, n°2003917
Vu la procédure suivante :
Par une requête enregistrée le 30 octobre 2020, la société AIR 9, représentée par Me Derec, demande au tribunal :
1°) de condamner la commune de Saint-Péravy-La-Colombe à lui verser la somme de 41 478,82 euros en réparation des préjudices subis en raison de la résiliation d'un marché ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Péravy-La-Colombe la somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la commune a justifié sa décision de rompre les trois contrats nés de l'approbation des devis de travaux n° DE00000001 en date du 9 janvier 2019 et nos DE00000002 et DE00000003 en date du 14 janvier 2019 "par un motif d'intérêt général" mais n'a donné aucune précision relative au motif allégué ni justification de sa réalité ; en conséquence, elle ne peut être regardée comme ayant régulièrement rompu les contrats pour un motif d'intérêt général et en ayant décidé unilatéralement et arbitrairement de rompre les contrats, elle a commis une faute de nature à engager sa responsabilité l'obligeant à réparer le préjudice subi ;
- subsidiairement, si un contrat administratif peut être résilié avant terme unilatéralement par l'administration pour des motifs d'intérêt général, le co-contractant a droit, en l'absence de toute faute de sa part, à la réparation intégrale du préjudice subi résultant pour lui de la résiliation anticipée du contrat et la commune a donc l'obligation de réparer les préjudices subis ;
- les travaux devaient commencer au mois juillet 2020, soit quelques jours avant la rupture du marché par la commune, la durée prévisible des travaux était de trois à quatre mois, son planning avait été établi en conséquence et la crise sanitaire ne lui a pas permis de compenser la perte du marché, elle s'était approvisionnée en matériaux nécessaires à la réalisation des travaux, en pure perte ;
- l'indemnisation doit compenser tant la perte subie que le gain manqué qu'elle évalue à 40 % du prix des marchés, soit la somme de 40 451,81 euros HT + 40 434,00 euros HT + 22 811,25 euros HT = 103 697,06 euros HT x 40 % = 41 478,82 euros HT.
Par un mémoire en défense enregistré le 19 janvier 2022, la commune de Saint-Péravy-la-Colombe, représentée par Me Tissier-Lotz conclut au rejet de la requête et demande au tribunal de mettre à la charge de la requérante la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- aucune rencontre des volontés n'étant intervenue, le contrat ne s'est pas formé ;
- il n'y a ni faute de la commune ni lien de causalité entre cette faute et les prétendus préjudices subis par la requérante ;
- la société requérante ne démontre pas l'existence et le quantum de son préjudice.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la commande publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lefebvre-Soppelsa, présidente-rapporteure ;
- les conclusions de Mme A de Gand, rapporteure publique ;
- et les observations de Me Barata, représentant la société Air 9 et de Me Hallé, représentant la commune de Saint-Péravy-la-Colombe.
Considérant ce qui suit :
1. La société AIR 9, entreprise de bâtiment spécialisée notamment dans les travaux d'isolation a émis trois devis de travaux à l'intention de la commune de Saint-Péravy-La-Colombe d'un montant total de 103 697,06 euros HT soit 111 821,58 euros TTC soit le devis n° DE00000001 en date du 9 janvier 2019 pour la rénovation de la salle de réunion de la commune et les devis n°s DE00000002 et DE00000003 en date du 14 janvier 2019 pour la
réhabilitation d'un logement communal situé 34 route d'Orléans. Par lettre du 26 juin 2020, le maire de la commune a informé la société AIR 9 que la commune souhaitait renoncer à la réhabilitation du logement. Par lettre du 30 juin 2020 présentée le 1er juillet 2020, la société AIR 9, faisant référence à un entretien intervenu le 22 juin 2020 avec le maire au cours duquel celui-ci l'avait informée de sa volonté de ne plus réaliser les travaux, objet des devis nos DE00000002 et DE00000003 mais aussi du devis n° DE00000001, a demandé à la commune d'honorer les contrats et, à défaut, de lui verser une indemnité équivalente à 40 % du prix des devis en réparation du préjudice subi. Par lettre du 3 juillet 2020, le maire de la commune a confirmé la volonté de la commune de " résilier unilatéralement " les trois devis nos DE00000001, DE00000002 et DE00000003, sans répondre à la demande indemnitaire. Par lettre du 7 septembre 2020 présentée le 10 septembre 2020, la société AIR9 a réitéré sa demande d'indemnisation, en vain. La société Air 9 demande au tribunal de condamner la commune de Saint-Péravy-La-Colombe à lui verser la somme de 41 478,82 euros correspondant à 40 % du prix HT des marchés en réparation des préjudices subis en raison de leurs résiliations.
Sur les conclusions indemnitaires :
2. Ainsi que le soutient la commune de Saint-Péravy-la-Colombe, la société requérante, qui se borne à soutenir que l'indemnisation doit compenser tant la perte subie que le gain manqué, qu'elle évalue à 40 % du prix des marchés, en indiquant que les travaux devaient commencer au mois juillet 2020, soit quelques jours avant la rupture du marché par la commune, la durée prévisible des travaux était de trois à quatre mois, son planning avait été établi en conséquence et la crise sanitaire ne lui a pas permis de compenser la perte du marché et qu'elle s'était approvisionnée en matériaux nécessaires à la réalisation des travaux, en pure perte, ne produit aucun élément de nature à établir les pertes alléguées notamment que des dépenses auraient été engagées pour la réalisation des travaux objets des devis.
3. Il résulte de ce qui précède que les conclusions indemnitaires présentées par la société Air 9 doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
4. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune de Saint-Péravy-la-Colombe qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
5. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Saint-Péravy-la-Colombe sur le fondement des mêmes dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société Air 9 est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Péravy-la-Colombe présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la société Air 9 et à la commune de Saint-Péravy-la-Colombe.
Délibéré après l'audience du 17 janvier 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Lefebvre-Soppelsa, présidente,
M. Joos, premier conseiller,
M. Nehring, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 février 2023.
La présidente-rapporteure,
Anne LEFEBVRE-SOPPELSA
L'assesseur le plus ancien,
Emmanuel JOOSLa greffière,
Nadine PENNETIER-MOINET
La République mande et ordonne à la préfète du Loiret en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.