TA Bordeaux, 14/02/2023, n°2203984

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 21 juillet 2022, la communauté de communes (CC) du pays Foyen demande au juge des référés, sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative de désigner un expert aux fins de déterminer :

- les causes et la nature des désordres qui affectent la maison d'accueil pour personnes âgées (MARPA) et un logement de fonction construits sur un terrain situé 5 rue de la Tuquette à Margueron ;

- de déterminer le coût des travaux propres à remédier à ces désordres ;

- les mesures conservatoires destinées à limiter leur aggravation ;

- l'étendue de l'ensemble des préjudices.

Elle soutient que :

- elle a entrepris la construction des bâtiments objets de la présente expertise en 2012 dans le cadre d'un marché public avec maîtrise d'œuvre confiée à un groupement et un contrôleur technique. Les travaux de construction ont été divisés en 14 lots ;

- elle a constaté l'apparition de multiples désordres et a fait réaliser un constat d'huissier le 26 janvier 2022, puis missionné un expert en bâtiment pour établir un rapport circonstancié des désordres qui affectent la MARPA et qui concernent la cuisine, les coursives en patios extérieurs, les enduits monocouches, le drainage extérieur, la chaudière à gaz, le stockage Pellets, les espaces verts extérieurs, les réseaux d'eaux (EU et EP) ;

- les désordres décrits sont de nature à affecter la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination ; ils sont susceptibles d'engager la responsabilité décennale des constructeurs.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 août 2022, la compagnie Allianz, représentée par Me Rivière déclare ne pas s'opposer à la requête mais formule toutes protestations et réserves d'usage utiles sur la mesure d'instruction sollicitée, en l'absence de reconnaissance de garantie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 août 2022, la SAS Apave International, l'association Assurance Lloyd's of London d'une part, la SAS Apave Sudeurope et la société Lloyds Insurance Company, intervenantes volontaires, toutes représentées par Me Sylvie Berthiaud, demandent :

- la mise hors de cause de la société Apave International et que soit admise l'intervention volontaire de la SAS Apave Sudeurope ;

- la mise hors de cause de l'association Assurance Lloyd's of London et que soit admise l'intervention de la société Lloyd's Insurance company ;

- qui leur soit donné acte de ce qu'elles ne s'opposent pas, sous les plus expresses réserves de recevabilité, responsabilité et garantie, à la mesure d'expertise judiciaire à leur contradictoire ;

- que la mission de l'expert soit limitée aux désordres mentionnés dans le constat d'huissier établi le 26 janvier 2022 et le rapport de M. C et que la mission soit complétée dans le sens qu'elle préconise au regard du coefficient de vétusté devant être appliqué et de l'éventuelle plus-value apportée par les travaux de réparation proposés.

Elles soutiennent que :

- l'activité de la société Cete Apave Sudeurope chargée du contrôle technique de l'opération de construction litigieuse a fait l'objet d'un apport partiel d'actif et de passif au profit de la société Apave Sudeurope SAS qui y est substituée dans toutes les actions judiciaires ;

- l'association Assurance Lloyd's of London n'exerce pas l'activité d'assurance et c'est la société Lloyd's Insurance company, venant aux droits des Souscripteurs du Lloyds de Londres, qui est concernée par le présent litige.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 août 2022, la société Maaf, ès qualité d'assureur de la Sarl Laval Carrelage, représentée par Me Loïc Champeaux, déclare ne pas s'opposer à la requête mais formule toutes protestations et réserves d'usage sur la mesure d'instruction sollicitée et demande que l'expertise ait lieu aux frais avancés de la demanderesse.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 septembre 2022, la SA Acte Iard, agissant ès qualité de la société Ingenierie représentée par Me Sammarcelli, déclare ne pas s'opposer à la demande d'expertise sous les plus expresses réserves de garantie et sans aucune reconnaissance de sa responsabilité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 septembre 2022, la Sarl Scapa Architectes Associés et la Sarl Zani Ingénierie Béton, représentées par le cabinet Aequo Selarl demandent au juge des référés de leur donner acte de ce que, sous les plus expresses réserves et sans aucune reconnaissance de responsabilité, elle ne s'opposent pas à la mesure d'expertise sollicité et demandent que la mission de l'expert soit limitée aux seuls désordres visés dans le procès-verbal de constat d'huissier et dans le rapport d'expertise amiable de M. C.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 septembre 2022, la SAS Eurovia Aquitaine et la SMA SA, son assureur, intervenante volontaire, représentées par Me Bertin, demandent au juge des référés :

- de prononcer la mise hors de cause de la société Sagena et d'admettre l'intervention de la SMA SA en qualité d'assureur de la société Eurovia Aquitaine ;

- de leur donner acte qu'elles ne s'opposent pas à la mesure d'expertise sollicitée sous les plus expresses réserves de responsabilité ;

- d'appeler en la cause la société Tremblay TP à laquelle elle a sous-traité une partie de ses prestations, plus précisément les travaux de terrassement et travaux préparatoires des voiries.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 septembre 2022, la société AXA France Iard, ès qualité d'assureur de la Sarl Alain Bernazeau, et la société Alain Bernazeau, représentées par Me Hounieu déclarent ne pas s'opposer à la mesure d'instruction sollicitée dans les strictes limites des désordres dénoncés dans la requête introductive d'instance, sous les expresses protestations et réserves d'usage quant à la recevabilité des actions susceptibles d'être engagées, aux responsabilités encourues et aux garanties assurantielles mobilisables.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 septembre 2022, la société AXA France Iard, ès qualité d'assureur de la Sarl Laval, représentée par Me Hounieu déclare ne pas s'opposer à la mesure d'instruction sollicitée dans les strictes limites des désordres dénoncés dans la requête introductive d'instance, sous les expresses protestations et réserves d'usage quant à la recevabilité des actions susceptibles d'être engagées, aux responsabilités encourues et aux garanties assurantielles mobilisables.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 octobre 2022, la société AXA France Iard, ès qualité d'assureur de la Société Générale de Menuiserie et la Société Générale de Menuiserie, représentées par Me Hounieu déclarent ne pas s'opposer à la mesure d'instruction sollicitée dans les strictes limites des désordres dénoncés dans la requête introductive d'instance, sous les expresses protestations et réserves d'usage quant à la recevabilité des actions susceptibles d'être engagées, aux responsabilités encourues et aux garanties assurantielles mobilisables.

Par un mémoire en défense enregistré le 18 janvier 2023, la SA MMA Iard, représentée par Me Xavier Schontz indique qu'elle ne s'oppose pas à la mesure sollicitée sous les plus expresses réserves et protestations d'usage

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction. () ".

Sur les demandes de mises hors de cause et d'intervention :

2. Les sociétés Apave International et Apave Sudeurope demandent, d'une part, la mise hors de cause de la société Apave International et, d'autre part, l'admission de l'intervention volontaire de la société Apave Sudeurope, au motif que si le marché de contrôle technique été passé et réalisé par le CETE Apave Sudeurope, dénommée aujourd'hui Apave International, l'activité de cette société a fait l'objet d'un apport partiel d'actif et de passif au profit de la société Apave Sudeurope prévoyant qu'elle se substituera à l'apporteuse dans les litiges et actions judiciaires, tant en demande qu'en défense. Dans ces conditions, il y a lieu de mettre hors de cause la société Apave International et d'admettre l'intervention volontaire de la société Apave Sudeurope.

3. L'association Assurance Lloyd's of London demande sa mise hors de cause, n'exerce pas l'activité d'assurance. Il résulte de l'instruction qu'il y a lieu de faire droit à cette demande et à la demande d'intervention volontaire de la société Lloyd's Insurance Company, venant aux droits des Souscripteurs du Lloyds de Londres, assureur de la société Cete Apave Europe qui a fait l'objet de l'apport partiel d'actif décrit au point précédent.

4. Il résulte de l'instruction qu'il y a lieu de mettre hors de cause la société d'assurance Sagena, devenue SMA SA et d'admettre l'intervention de cette société en qualité d'assureur de la société Eurovia Aquitaine.

Sur le bien-fondé de la demande d'expertise :

5. La communauté de communes (CC) du Pays Foyen a fait procéder au cours de l'année 2012 à la construction d'une maison d'accueil pour personnes âgées (MARPA) et d'un logement de fonction sur un terrain situé 5 rue de la Tuquette à Margueron. Elle a constaté depuis la réception des travaux intervenue le 15 avril 2013, l'apparition de nombreux désordres qu'elle a fait constater par un huissier le 26 janvier 2022, puis a missionné un expert en bâtiment, Monsieur D C, afin d'établir le 16 juin 2022 un rapport circonstancié des désordres affectant la MARPA.

6. La CC du Pays Foyen sollicite, par la présente requête, l'organisation d'une expertise au contradictoire du groupement de maîtrise d'œuvre, des constructeurs et de l'ensemble des assureurs des participants aux travaux, aux fins de déterminer les causes et la nature des désordres affectant la MARPA, le coût des travaux propres à remédier à ces désordres et demande que l'expert se prononce sur l'étendue des préjudices. Contrairement à ce que demandent les défendeurs, il n'y a pas lieu de limiter la mission de l'expert judiciaire aux seuls désordres décrits par Monsieur C. Il appartiendra au contraire à l'expert de faire état de l'ensemble des désordres qu'il constatera, tant sur la MARPA que la maison de gardien et, conformément aux demandes reconventionnelles des sociétés Apave Sudeurope et Lloyd's Insurance Company, dans le cadre de son avis sur les mesures réparatoires, de donner son avis sur la vétusté des locaux et l'existence d'une plus-value. La mesure d'expertise sollicitée, qui ne préjuge en rien des responsabilités encourues, est utile et entre dans le champ d'application des dispositions précitées de l'article R. 532-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, dès lors, d'y faire droit et de fixer la mission de l'expert comme il est précisé à l'article 1er de la présente ordonnance.

Sur la charge des frais de l'expertise :

7. En vertu de l'article R. 621-13 du code de justice administrative, la ou les parties qui assumeront la charge des frais d'expertise sont désignées par le président du tribunal aux termes de l'ordonnance qui fixera, après le dépôt du rapport, les frais et honoraires des experts, sans préjudice de l'attribution préalable d'une allocation provisionnelle, en application de l'article R. 621-12 de ce code. Il n'appartient donc pas au juge des référés de se prononcer sur la charge des frais d'expertise et de leur consignation.

O R D O N N E

Article 1er : La société Apave International, l'association Assurance Lloyd's of London et la société Sagena sont mises hors de cause.

Article 2 : M. A B est désigné en qualité d'expert et aura pour mission :

1°) de se rendre sur les lieux ; d'entendre les parties et tous sachants ; de prendre connaissance de tous documents utiles, notamment les pièces contractuelles, à la bonne fin de l'expertise ; prendre connaissance du constat d'huissier dressé le 26 janvier 2022 et du rapport rédigé par M. C le 16 juin 2022.

2°) de rechercher et préciser les liens contractuels unissant les parties, décrire les missions confiées par le maître de l'ouvrage au groupement de maîtrise d'œuvre ainsi qu'à chacun des constructeurs attraits à la présente instance, et si possible, annexer à son rapport les marchés, avenants, ordres de service et tous autres documents utiles ;

3°) de dresser un état descriptif technique et qualitatif précis des travaux réalisés et dire si ces travaux présentent des dégradations, vices ou désordres et s'ils compromettent la solidité de l'ouvrage ou le rendent impropre à sa destination ; indiquer la date d'apparition des désordres et évaluer leur degré de gravité pour la pérennité des ouvrages ;

4°) de déterminer les causes de chacun des désordres constatés, en précisant si et, le cas échéant, dans quelle mesure ils sont imputables à des erreurs de conception, de direction ou de surveillance, à des déficiences dans l'exécution ou le contrôle des travaux ou à toute autre cause ; de dire si les travaux ont été conduits conformément aux documents contractuels et aux règles de l'art ; en cas de pluralité des causes, préciser le pourcentage d'imputabilité à chacune d'elle ;

5°) de donner un avis motivé sur l'évaluation du coût des travaux propres à mettre fin aux désordres, en tenant compte, le cas échéant, d'un coefficient de vétusté ; fixer la durée des travaux compte tenu des nécessités de leur conception, de la passation des marchés et de leur exécution ;

6°) de donner son avis sur la nature et le coût des éventuelles mesures conservatoires pour limiter l'aggravation des désordres et nécessaires à la protection des personnes et des biens ; de préciser les travaux qui, le cas échéant, doivent être réalisés en urgence ;

7°) d'évaluer les préjudices subis par la CC du Pays Foyen en conséquence directe et certaine des désordres relevés, en précisant, le cas échéant, la plus-value dont elle bénéficierait du fait de la réalisation des travaux réparatoires ;

8°) d'apporter tous éléments utiles à la détermination des responsabilités encourues et à la solution amiable ou contentieuse du litige opposant les parties ;

9°) d'une façon générale, recueillir tout élément et faire toutes autres constatations utiles de nature à éclairer le tribunal dans son appréciation des responsabilités éventuellement encourues et des préjudices subis.

Article 3 : L'expert accomplira sa mission dans les conditions prévues aux articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Il ne pourra recourir à un sapiteur sans l'autorisation préalable du président du tribunal administratif.

Article 4 : Préalablement à toute opération, l'expert prêtera serment dans les formes prévues à l'article R. 621-3 du code de justice administrative.

Article 5 : L'expertise aura lieu en présence de la CC du Pays de Foyen, de la société Scapa Architectes Associés, de la Mutuelle des Architectes Français, de la société Ingenierie 47, de la SA Acte Iard, de la société Zani Ingenierie Béton, de la société Apave Sudeurope, de la société Lloyd's Insurance Company, de la SAS Eurovia Aquitaine, de la société SMA SA, de la société Alain Bernazeau, de la société Axa France Iard, de la société Générale de Menuiserie, de la société Laval Carrelages, de la MAAF Assurances, de la Selarl Philae, es qualité de liquidateur de la Sarl Guennec et Fils, de la société Allianz Iard, de la Scp Odile Stutz, es qualité e liquidateur de la société Nouvelle Arhélec, de la MMA Iard, et de la société Tremblay TP.

Article 6 : L'expert avertira les parties conformément aux dispositions de l'article R. 621-7 du code de justice administrative.

Article 7 : L'expert qui communiquera aux parties un pré-rapport, s'il l'estime utile, avec un délai leur permettant de faire valoir leurs dires avant d'analyser leurs observations dans un rapport définitif, déposera le rapport définitif au greffe en deux exemplaires dans un délai de six mois à compter de la notification de la présente ordonnance. Des copies seront notifiées par l'expert aux parties intéressées. Avec leur accord, cette notification pourra s'opérer sous forme électronique. L'expert justifiera auprès du tribunal de la date de réception de son rapport par les parties.

Article 8 : Les frais et honoraires de l'expertise seront mis à la charge de la ou des parties désignées dans l'ordonnance par laquelle le président du tribunal liquidera et taxera ces frais et honoraires.

Article 9 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 10 : La présente ordonnance sera notifiée à la CC du Pays de Foyen, à la société Scapa Architectes Associés, à la Mutuelle des architectes français, à la société Ingenierie 47, à la SA Acte Iard, à la société Zani Ingenierie Béton, à la société Apave Sudeurope, à la société Apave International, à la société Lloyd's Insurance Company, à l'association Assurance Lloyd's of London, à la SAS Eurovia Aquitaine, à la société Sagena à la société SMA SA, à la société Alain Bernazeau, à la société Axa France Iard, à la société Générale de Menuiserie, à la société Laval Carrelages, de la MAAF Assurances, à la Selarl Philae, es qualité de liquidateur de la Sarl Guennec et Fils, à la société Allianz Iard, à la Scp Odile Stutz, es qualité e liquidateur de la société Nouvelle Arhélec, à la MMA Iard, à la société Tremblay TP et à M. A B, expert.

Fait à Bordeaux, le 14 février 2023.

La présidente du tribunal,

Juge des référés,

Cécile MARILLER

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

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