CAA Paris, 14/04/2023, n°20PA01615
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par une requête, enregistrée le 13 décembre 2019, le haut-commissaire de la République en Polynésie française a demandé au tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler l'avenant n°190130 du 3 juin 2019 au marché n°180020 du 26 février 2018 ayant pour objet la construction d'une marina à Tevaitoa, sur l'île de Raiatea.
Par un jugement n° 1900460 du 19 mai 2020, le tribunal administratif de la Polynésie française a annulé cet avenant.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire récapitulatif et en réplique enregistrés les 3 juillet et 18 décembre 2020, la société Boyer, représentée par Me Dal Farra, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter le déféré du haut-commissaire de la République en Polynésie française devant le tribunal administratif de la Polynésie française ;
3°) de condamner l'Etat à payer à la société Boyer la somme de 2 400 000 francs CFP, au titre des frais irrépétibles, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
En ce qui concerne la régularité du jugement :
-le tribunal administratif a méconnu le caractère contradictoire de la procédure juridictionnelle en ne lui communiquant pas le mémoire du haut-commissaire de la République en Polynésie française enregistré le 6 mai 2020 ;
-il a entaché son jugement d'irrégularité en omettant de statuer sur plusieurs fins de non-recevoir : celle tirée de l'illégalité de la mesure demandée, celle tirée de ce que l'exception de recours parallèle pouvait s'appliquer à un recours dirigé contre un acte à caractère transactionnel, celle tirée de l'absence de motif imposant d'exercer le déféré à cette date, celle tirée de l'irrégularité de la délégation présentée comme couvrant le cas du déféré ;
-il n'a pas suffisamment motivé son jugement car il n'expose pas en quoi la qualification donnée par le représentant de l'Etat à l'avenant litigieux aurait une quelconque incidence sur la légalité de la mesure demandée ;
-il a omis de statuer sur les arguments relatifs à la portée du caractère transactionnel de l'acte sur sa légalité ;
-il a répondu de façon incomplète au moyen tiré de ce qu'il n'y avait pas lieu d'annuler l'avenant dès lors que cela impliquerait que la société retrouve son droit à indemnisation des préjudices subis ;
En ce qui concerne le bien-fondé du jugement :
S'agissant de la recevabilité du déféré
-la lettre du 23 août 2019 adressée par le haut-commissaire de la République en Polynésie française au président de la Polynésie française n'était pas suffisamment motivée, ne comportait ni la démonstration de l'illégalité commise ni celle de l'absence de faute du maître d'ouvrage, et demandait le retrait d'un avenant ce qui est juridiquement impossible, elle ne pouvait donc être qualifiée de recours gracieux susceptible de proroger le délai de recours contre l'avenant contesté, de sorte que le déféré était tardif ;
-le haut-commissaire de la République en Polynésie française, qui n'a pas contesté l'avis de la commission consultative des marchés de la Polynésie française sur le projet d'avenant, ne pouvait plus ensuite, du fait de l'exception de recours parallèle qui s'applique également dans le cadre d'un recours de pleine juridiction, déférer cet avenant devant le tribunal administratif ;
-le déféré a été exercé par une personne incompétente pour agir au nom du haut-commissaire ;
-en Polynésie française, le pouvoir de déférer un acte est attaché à la personne du haut-commissaire de la République en Polynésie française, il ne peut faire l'objet d'une délégation ;
-la délégation de signature du haut-commissaire de la République en Polynésie française à son secrétaire général ne comprenait pas le déféré ;
-l'arrêté de délégation du haut-commissaire de la République en Polynésie française à son secrétaire général était illégal ;
Sur la légalité de l'avenant
-l'avenant vise à réparer le préjudice subi par la société Boyer et ne constitue pas un nouveau marché dès lors qu'il n'a ni pour objet ni pour effet de modifier les prestations prévues au contrat initial ; il n'avait donc pas à être précédé de mesures de publicité et de mise en concurrence ; surtout, il ne constituait pas un détournement de pouvoir ;
- dès lors que l'avenant a pour objet de mettre un terme à des difficultés liées à l'exécution du marché initial avec lequel il est en lien, le ministre de l'équipement et des transports terrestres était bien compétent pour le signer, quand bien même celui-ci présentait un caractère transactionnel ;
-le tribunal administratif n'a pas tenu compte du caractère transactionnel de l'avenant, dont le contrôle doit s'apprécier de façon globale ;
-à titre principal, la Polynésie française a manqué à son obligation de mise à disposition du terrain d'assiette de l'ouvrage que devait réaliser la société Boyer causant ainsi de manière directe un préjudice financier pour cette dernière qui de fait s'est trouvée empêchée de poursuivre les travaux ; à titre subsidiaire, la responsabilité sans faute de la Polynésie française aurait également pu être engagée ;
- la société Boyer a fait des concessions en limitant à soixante-six jours la période d'indemnisation et en renonçant à toute réserve ou réclamation concernant l'exécution du marché pour des faits antérieurs à la signature de l'avenant ;
- l'avenant contesté, dont l'objet est de prévenir un litige futur, ne constitue pas une libéralité compte tenu des concessions réciproques consenties et dès lors qu'il ne met pas à la charge de la Polynésie française une obligation dépourvue de fondement et manifestement disproportionnée ;
- à supposer que l'avenant constituât une libéralité, le tribunal administratif aurait dû apprécier les conséquences de son annulation au regard de l'intérêt général avant de prononcer son annulation.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 octobre 2020, le haut-commissaire de la République en Polynésie française conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Une ordonnance du 20 mai 2022 fixe la clôture de l'instruction au 22 juin 2022 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics applicable en Polynésie française,
- le code civil,
- le décret n° 2007- 422 du 23 mars 2007 relatif aux pouvoirs du haut-commissaire de la République en Polynésie française,
- l'arrêté n° 835 CG du 3 mai 1984 portant établissement du cahier des clauses administratives générales concernant les marchés publics passés au nom du territoire de la Polynésie française et de ses établissements publics,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme d'Argenlieu, première conseillère,
- les conclusions de Mme Jayer, rapporteure publique,
- et les observations de Me Nicolas représentant la société Boyer.
Considérant ce qui suit :
1. Le marché public n°180020 relatif aux travaux de construction d'une marina à Tevaitoa, sur l'île de Raiatea, a été conclu le 19 mars 2018 entre la Polynésie française et la société Boyer. Le 27 août 2018, des opposants au projet de marina ont occupé les abords du chantier et une partie du site en limitant les manœuvres de la drague. Par une ordonnance n°1800365 du 29 octobre 2018, le juge des référés a enjoint aux manifestants de libérer l'accès à la parcelle domaniale. Les travaux ont alors été suspendus le 16 novembre 2018 par ordre de service, puis ajournés, avec effet rétroactif, le 14 décembre 2018. Par un jugement du 26 mars 2019, le tribunal administratif de la Polynésie française a annulé l'arrêté du 6 août 2018 portant déclaration d'utilité publique de ces travaux en raison de l'insuffisance de l'étude d'impact. Le 3 juin 2019, un avenant n°190130 au marché public de travaux était conclu, d'un montant de 49 342 348 F CFP, introduisant trois " prix unitaires nouveaux " au profit du titulaire du marché, correspondant d'une part, à des frais d'immobilisation du chantier à compter du 3 septembre 2018 et, d'autre part, à des frais de réparation et de remise en état de la clôture de chantier. L'avenant a été transmis au haut-commissaire de la République en Polynésie Française le 27 juin 2019. Par une lettre du 23 août 2019, le haut-commissaire de la République en Polynésie française a sollicité du président de la Polynésie française qu'il procède au retrait de cet avenant. Par une lettre du 24 octobre 2019, le président de la Polynésie française a refusé de faire droit à cette demande. Par un déféré enregistré le 13 décembre 2019 au greffe du tribunal administratif de Polynésie française, le haut-commissaire de la République en Polynésie française a sollicité l'annulation de l'avenant n° 1901130 du 3 juin 2019. Par un jugement n° 1900460 du 19 mai 2020, dont la société Boyer fait appel, le tribunal administratif de la Polynésie française a annulé cet avenant.
Sur la régularité du jugement du tribunal administratif de Polynésie française :
2. Aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " () La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (). / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ".
3. Il résulte de l'instruction qu'un mémoire en réplique du haut-commissaire de la République en Polynésie française a été enregistré au greffe du tribunal administratif de la Polynésie française le 7 mai 2020 mais n'a pas été communiqué, alors que l'instruction n'était pas close. Dans ce mémoire, le haut-commissaire de la République en Polynésie française répondait pour la première fois aux fins de non-recevoir soulevées en défense par la société Boyer. Par ailleurs, une pièce nouvelle y était jointe, laquelle permettait de répondre à l'une des fins de non-recevoir tirée de l'incompétence de la signataire du déféré, au soutien de laquelle la société Boyer avait apporté un commencement de preuve en produisant un extrait de l'agenda du secrétaire général. Pourtant, le tribunal s'est abstenu de communiquer ce mémoire et, par suite, la pièce jointe, alors qu'aucune autre pièce issue de l'instruction ne permettait d'écarter cette fin de non-recevoir. Les premiers juges ont donc méconnu les exigences qui découlent des dispositions précitées de l'article R. 611-1 du code de justice administrative et qui sont destinées à garantir le caractère contradictoire de l'instruction. Il suit de là que la société Boyer est fondée à soutenir que le jugement attaqué est intervenu à la suite d'une procédure irrégulière et à en demander, pour ce motif, l'annulation sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens d'irrégularité du jugement soulevés par l'appelante.
4. Il y a lieu, pour la Cour, de se prononcer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur le déféré présenté par le haut-commissaire de la République en Polynésie française devant le tribunal administratif de la Polynésie française.
Sur la recevabilité du déféré devant le tribunal administratif de Polynésie française :
5. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'avenant du 3 juin 2019 a été transmis au haut-commissaire de la République en Polynésie française, le 27 juin suivant. Par une lettre adressée le 23 août 2019, celui-ci a appelé l'attention du président de la Polynésie française, de façon suffisamment motivée, sur les illégalités qui entachaient selon lui l'avenant transmis, entendant ainsi qu'il soit procédé à son annulation, qu'il qualifie improprement de " retrait " sans toutefois que cela ait une incidence sur la portée de la demande. Cette dernière doit donc être regardée comme constituant un recours gracieux qui, ayant été formé dans le délai du recours contentieux, l'a interrompu. Le président de la Polynésie française a expressément rejeté cette demande par une lettre du 24 octobre 2019. Le déféré du haut-commissaire de la République en Polynésie française, enregistré au greffe du tribunal administratif le 13 décembre 2019, n'était par suite pas tardif.
6. En deuxième lieu, aucun principe régissant l'exception de recours parallèle ne faisait obstacle à ce que le haut-commissaire de la République en Polynésie française défère l'avenant litigieux avant d'avoir déféré les actes préparatoires, tels que l'avis favorable de la commission consultative des marchés de la Polynésie française, à supposer que ces actes " préparatoires " puissent faire l'objet d'un déféré.
7. En troisième lieu, l'article 34 du décret n° 2007-422 du 23 mars 2007 susvisé dispose que : " I. - En cas d'absence ou d'empêchement du haut-commissaire, sa suppléance est exercée de droit par le secrétaire général du haut-commissariat, sauf s'il a désigné par arrêté pour l'assurer le secrétaire général adjoint, le directeur de cabinet ou un chef de subdivision administrative. / En cas de vacance momentanée du poste de haut-commissaire, l'intérim est assuré par le secrétaire général du haut-commissariat ". Il ne résulte pas de l'instruction que le haut-commissaire n'était pas empêché au jour de la signature du déféré. Sa suppléance était donc exercée de droit par le secrétaire général du haut-commissariat, sans que puisse être utilement opposée la circonstance que l'arrêté n° HC 593 DDME/BRHT/jc du 2 décembre 2019 portant délégation de signature à M. Requet, secrétaire général, qui ne présentait pas un caractère général puisqu'il excluait le pouvoir de réquisition de l'administrateur général des finances publiques, ne visait pas les déférés. Il est par ailleurs attesté le 5 mai 2020 par le chef de bureau des ressources humaines du haut-commissariat que M. B était en congés du 2 au 15 décembre 2019. Aussi, Mme Zaplana, secrétaire générale adjointe du haut-commissariat, qui disposait d'une délégation de signature par arrêté du 4 décembre 2019 l'habilitant à assurer la suppléance du secrétaire général en l'absence de ce dernier, était compétente pour signer le déféré le 12 décembre 2019, la circonstance que le délai de recours n'expirait que le 25 décembre 2019 étant sans incidence.
Sur la légalité de l'avenant :
8. Aux termes de l'article 2044 du code civil : " La transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître ". Pour déterminer si une transaction constitue une libéralité consentie de façon illicite par une collectivité publique, les concessions réciproques consenties par les parties dans le cadre de cette transaction doivent être appréciées de manière globale, et non en recherchant si, pour chaque chef de préjudice pris isolément, les indemnités négociées ne sont pas manifestement disproportionnées.
9. En premier lieu, par un avenant n° 190130, signé le 3 juin 2019, le président de la Polynésie française et la société Boyer, titulaire du marché de travaux de construction d'une marina à Tevaitoa sur l'île de Raiatea, ont entendu mettre un terme aux réclamations concernant les préjudices financiers subis par la société du fait de l'interruption des travaux liée à l'impossibilité d'accéder au terrain, sur lequel les travaux devaient être réalisés, en raison de son occupation par des opposants au projet. Ainsi, dans la mesure où l'avenant, qui a la nature d'une transaction, s'inscrit dans le cadre de l'exécution du marché en litige, le ministre de l'équipement et des transports terrestres de la Polynésie française qui, en vertu des dispositions de l'arrêté n° 661 PR du 23 mai 2018, dispose d'une délégation " de pouvoir pour tous actes, décisions et pièces administratives et techniques liés à la préparation, à la mise en œuvre des procédures de passation, à l'exécution et au règlement des marchés publics passés en application de la réglementation applicable aux marchés publics de la Polynésie française " était compétent pour le signer.
10. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction, et notamment de deux constats d'huissier du 27 août 2018, qu'à cette date, des opposants au projet de marina ont fait obstacle au dépôt d'une drague et que, du fait de leur présence à proximité d'un conteneur de chantier et d'une grue de levage, les travaux ont dû être interrompus. La Polynésie française a toutefois attendu le 16 octobre 2018, soit deux mois après le commencement de ces travaux, pour saisir le juge d'une demande d'expulsion et, alors que le tribunal administratif avait, le 29 octobre 2018, ordonné aux occupants de libérer l'accès aux lieux, à défaut de quoi la Polynésie française pourrait requérir le concours de la force publique, celle-ci s'est abstenue de toute action. Ce faisant, les difficultés rencontrées par la société Boyer dans l'exécution du marché sont directement imputables à une faute du maître d'ouvrage, lequel était contractuellement tenu, en cette seule qualité, d'assurer à l'entreprise l'accès au terrain d'assiette des travaux, sans qu'il puisse s'exonérer de sa responsabilité en invoquant le fait des tiers opposants au projet.
11. En troisième lieu, il résulte des stipulations de l'article 8.04 du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché que : " l'entrepreneur assurera sous sa responsabilité la protection et le gardiennage effectif de jour comme de nuit de ses installations de chantier. Il établira à ses frais, les barrières, les clôtures, signalisations et toutes les installations en vue d'assurer la sécurité et d'éviter tout accident ". Si les clôtures doivent être regardées comme faisant partie des installations de chantier, leur dégradation ne résulte pas d'un défaut de protection et de gardiennage mais de l'occupation même des lieux par des opposants au projet. Par suite, l'indemnisation de ce préjudice chiffré, dans l'avenant litigieux, à la somme de 282 195 francs CFP hors taxes, incombe au maitre d'ouvrage. Il en va de même des frais d'immobilisation du chantier pour un montant chiffré dans l'avenant à 43 383 600 francs CFP hors taxes. Le montant de la somme due par la Polynésie française, prise dans sa globalité, qui n'est pas manifestement disproportionné, s'élève ainsi à 43 665 795 francs CFP hors taxes. La société Boyer, quant à elle, a limité à soixante-neuf jours à compter du 3 septembre 2018 la période d'indemnisation relative aux frais d'immobilisation et a consenti à renoncer à toute réserve ou réclamation concernant l'exécution du marché pour des faits antérieurs à la signature de cet avenant, alors qu'elle aurait pu notamment engager la responsabilité de plein droit de la Polynésie française du fait de la décision d'ajournement des travaux à la date du 21 novembre 2018, signée le 14 décembre 2018.
12. En quatrième lieu, si l'avenant litigieux fait improprement référence, concernant l'estimation des préjudices financiers subis, à l'introduction de " trois prix nouveaux ", pour autant celui-ci, uniquement destiné à prévenir un litige à naître, n'avait ni pour objet ni pour effet de modifier les prestations prévues par le marché initial. Il n'avait pas davantage pour finalité de compenser une absence de résiliation qui, si elle avait été envisagée, n'aurait en tout état de cause pu être prononcée que pour un motif d'intérêt général, ouvrant ainsi un droit à indemnisation de la société titulaire. L'avenant n'avait donc pas, contrairement à ce que soutient le haut-commissaire de la République en Polynésie française, à être soumis à des mesures préalables de publicité et de mise en concurrence et n'était dès lors pas entaché d'un détournement de pouvoir.
13. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'illégalité fautive de la déclaration d'utilité publique relative au projet en litige et sur l'engagement éventuel de la responsabilité sans faute du maître d'ouvrage, il résulte de tout ce qui précède que la transaction contenue dans l'avenant contesté, eu égard aux concessions réciproques librement consenties, ne peut être regardée comme mettant à la charge de la Polynésie française une obligation dépourvue de fondement, ni même manifestement disproportionnée, constitutive d'une libéralité.
14. La société Boyer est donc fondée à soutenir que la demande du haut-commissaire de la République en Polynésie française tendant à l'annulation de l'avenant n° 90-130 au marché n° 180020 du 26 février 2018 relatif à la construction d'une marina à Tevaitoa, sur l'île de Raiatea doit être rejetée.
Sur les frais de l'instance :
15. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à la société Boyer en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1900460 du 19 mai 2020 du tribunal administratif de la Polynésie française est annulé.
Article 2 : La demande présentée par le haut-commissaire de la République en Polynésie française devant le tribunal administratif de la Polynésie française est rejetée.
Article 3 : L'Etat versera à la société Boyer la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêté est notifié à la société Boyer, à la Polynésie française et au haut-commissaire de la République en Polynésie française.
Délibéré après l'audience du 31 mars 2023 à laquelle siégeaient :
- Mme Heers, présidente,
- Mme Briançon, présidente-assesseure,
- Mme d'Argenlieu, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 avril 2023.
La rapporteure,
L. d'ARGENLIEU La présidente,
M. A La greffière,
O. BADOUX-GRARE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.