TA Nantes, 01/02/2023, n°2001624
Vu la procédure suivante :
Par une requête et trois mémoires, enregistrés les 10 février, 7 août, 24 novembre 2020 et 17 mars 2021, la SARL Performance Environnement, représentée par Me Buffet, demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures :
1°) de dire que le mémoire en intervention présenté par la SAS Passenaud Henri
Récupération est irrecevable ;
2°) d'annuler le contrat de prestation de mise en balles des cartons issus des déchetteries et de collectes en porte à porte conclu entre la société publique locale (SPL) Saumur Agglopropreté et la société Passenaud Henri Récupération le 18 décembre 2019 ;
3°) de mettre à la charge de la société Passenaud Henri Récupération la somme de
3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est recevable sans condition de délai dès lors que la SPL Saumur Agglopropreté n'a pas accompli les mesures de publicité de l'avis d'attribution du contrat litigieux ; le juge administratif est compétent pour statuer sur la requête dès lors qu'il s'agit d'un contrat administratif conclu pour répondre à un service public administratif financé par la taxe d'enlèvement des ordures ménagères ;
- l'intervention à l'instance de la société Passenaud, qui présente des conclusions qui lui sont propres et qui ne motive pas son mémoire au soutien son intervention, est irrecevable ;
- la SPL Saumur Agglopropreté a commis un manquement à ses obligations de publicité et de mise en concurrence en utilisant une méthode de notation irrégulière qui justifie l'annulation du contrat attaqué :
* s'agissant de la méthode de notation du critère du prix, elle n'a pas respecté les principes fondamentaux de la commande publique et notamment celui de la transparence ;
- le règlement de la consultation ne faisait pas état du sous-critère lié à la distance entre les sites des producteurs de cartons et les sites de mise en balles, qui est de fait plus favorable à la société Passenaud ; cette dernière n'est pas fondée à soutenir que la requérante pouvait proposer plusieurs sites alors que le cahier des clauses particulières ne prévoit pas cette possibilité ;
- le critère du surcoût de tri des impuretés n'est pas mentionné dans le règlement de consultation et la SPL Saumur Agglopropreté, qui n'a pas répondu aux demandes de précisions formulées par la société Performance Environnement, ne pouvait la sanctionner sur ce critère ; sur ce critère, seul l'attributaire, candidat sortant, avait connaissance des informations de non-conformité rencontrées les années passées et se trouvait, de fait, dans une situation avantageuse pour définir son offre ;
- l'identité du prix proposé par la société Passenaud après négociation, révèle qu'elle a été informée par la SPL du prix proposé par la société requérante et par la société ROMI ;
* s'agissant de la méthode de notation du critère technique, elle disposait d'un matériel de pesée plus performant que l'attributaire et ne pouvait de ce fait se voir attribuer le même nombre de points ;
- en ce qui concerne le sous-critère de déchargement, sa note a été sous-évaluée au regard de la qualité de ses équipements ;
- s'agissant du critère " circulation sur site ", sa note a été sous-évaluée au regard des capacités de circulation permise dans son installation et de celles dont dispose l'attributaire ;
- concernant le critère de " mise en balles conformément aux PTM repreneur ", elle répond aux critères de notations mais ne s'est vu attribuer aucun point ; la notation est donc incomplète ;
- s'agissant du sous-critères des dimensions des balles, contrairement à l'offre présentée par l'attributaire, son offre répondait précisément aux exigences du cahier des clauses techniques particulières;
- pour ce qui concerne le sous critère du taux d'" humidité " des balles de carton, son offre a reçu le même nombre de points que celle de l'attributaire alors qu'elle expose stocker ses balles en intérieur et non en extérieur, contrairement à la société Passenaud ;
- s'agissant toujours du sous-critère " modèle de presse à balles ", alors qu'elle dispose d'une presse à balles beaucoup plus récente, il est inéquitable qu'elle se soit vue attribuer le même nombre de points que la société Passenaud qui dispose d'une presse ancienne qui ne permet pas le respect des prestations techniques minimales des repreneurs ;
- s'agissant de la gestion des stocks, la société Passenaud s'est vue attribuer la même note que la société Performance Environnement alors que la requérante dispose d'un bâtiment de stockage plus grand ;
- s'agissant du sous-critère de la procédure de demande d'enlèvement, elle ne peut se voir attribuer aucun point alors qu'elle a présenté un logigramme dans son mémoire technique précisant le déroulé de la prestation en développant une partie de son propos sur la procédure d'expédition des balles.;
Par des mémoires en défense, enregistrés les 24 avril et 9 octobre 2020, la SPL Saumur Agglopropreté représentée par Me Marchand conclut :
1°) A titre principal, au rejet de la requête comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
2°) A titre subsidiaire, au rejet au fond de la requête ;
3°) En tout état de cause, à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la Sarl Performance Environnement au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- le juge administratif n'est pas compétent dès lors que le marché conclu entre la SPL Agglopropreté et la société Passenaud est un contrat de droit privé ;
Subsidiairement :
- elle n'a commis aucun manquement aux règles relatives à la passation du marché litigieux, tant en ce qui concerne l'analyse des offres au regard du critère du prix qu'au regard du critère de la valeur technique ; la circonstance que la société attributaire a, au cours des négociations, proposé un prix à la tonne identique à celui des deux autres candidats ne saurait, en tant que tel, révéler une méconnaissance du principe de transparence ; les éléments pris en compte pour noter le critère du prix ne sauraient être qualifiés de sous-critères de jugement des offres mais constituent de simples d'appréciation destinés à guider le pouvoir adjudicateur dans le jugement des offres ; c'est sans méconnaître le principe de transparence qu'elle a évalué le critère du prix au regard de la distance séparant les déchetteries du centre de tri des candidats ; aucun des candidats ne disposait d'informations précises sur le taux d'impureté des caissons, de sorte que la société requérante n'a pas été lésée par l'absence de réponse à ses interrogations ; eu égard à la très faible pondération de cet élément de jugement du critère prix (trois points sur un total de 85), l'absence de précision de cet élément dans le règlement de consultation ne saurait entacher d'irrégularité la procédure de passation du marché litigieux ;
- les moyens tirés de ce que les modalités selon lesquelles la SPL a mis en œuvre le critère lié à la valeur technique, motifs tirés de ce que la qualité de l'offre de la requérante justifiait qu'elle obtienne davantage de points sur la notation de certains éléments d'appréciation de la valeur technique ne sont pas fondés ; eu égard aux prescriptions imposées par le pouvoir adjudicateur et aux propositions formulées par les deux candidats quant au temps de déchargement, l'offre de la société Passenaud a été jugée équivalente à celle de la société Performance Environnement, la circonstance que cette dernière dispose d'une borne de pesage automatisée n'apportant pas de plus-value au regard des attentes de la SPL ; s'agissant du dimensionnement du site, il est apparu, lors de la visite du site, que l'entreprise Passenaud dispose de 15 950 m2 en extérieur, alors que la société Performance Environnement ne dispose que de 15 700 m2, ce qui justifie la différence de points attribués ; s'agissant de l'item " circulation sur site ", la circonstance tirée par la requérante de ce que seul son centre de tri permettrait l'entrée et la sortie d'ensemble articulés de 44 tonnes pour un vidage à l'intérieur du site est sans incidence sur la qualité de l'offre dès lors qu'il est sans importance que le déchargement puisse se faire à l'intérieur ou à l'extérieur du centre de stockage ; en ce qui concerne l'élément " mise en balles conformément au PTM repreneur ", faute pour la société requérante d'établir que la méthode de notation aboutirait à priver de leur portée les critères de sélection ou à neutraliser leur pondération en permettant que la meilleure note ne soit pas attribuée à la meilleure offre, le nombre de points attribués par le pouvoir adjudicateur ne saurait être remis en cause ; au regard des stipulations de l'article 5.3 du cahier des clauses particulières, la SPL a entendu apprécier de manière globale l'équipement proposé par les candidats, sans estimer nécessaire d'attribuer de points spécifiques pour chacune des caractéristiques techniques précisées dans ce document ; le constat d'huissier produit par la requérante ne permet pas d'établir le dimensionnement exact des balles de cartons, ni que les balles de cartons photographiées correspondraient aux balles de cartons issus des déchetteries objet du marché litigieux ; s'agissant de l'item " taux d'humidité " , il ressort des écritures de la société requérante que la société Passenaud dispose d'une " surface limitée de stockage en intérieur et un stockage de balles de cartons en extérieur ", de sorte que la société attributaire est parfaitement à même de stocker les balles issues du marché litigieux à l'intérieur ; s'agissant de l'item du " modèle de presse à balles ", c'est sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que le pouvoir adjudicateur a estimé, au regard des exigences posées par le cahier des charges, que les modèles de presse à balle proposés par les deux candidats répondaient de la même manière aux attentes de la SPL, sans que les caractéristiques techniques de la presse de la société Performance Environnement présentent un avantage déterminant pour l'exécution du marché ; les conditions de stockage ont été, à juste titre, jugées équivalentes pour les deux offres ; s'agissant de l'item " procédure de demande d'enlèvement ", elle n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que les informations transmises sur cet aspect de la prestation étaient nettement moins détaillées dans l'offre de la société Performance Environnement que dans l'offre de la société Passenaud ; à supposer même que la proposition de la société requérante justifiait l'attribution d'un point sur cet item, une telle modification ne permettait pas, même conjuguée avec une nouvelle notation du critère prix dans les conditions rappelées ci-dessus, d'attribuer le marché à la société requérante ; contrairement à ce que soutient celle-ci, en procédant de manière parfaitement artificielle à une nouvelle notation de son offre, le pouvoir adjudicateur n'a commis aucun manquement en rapport direct avec son éviction ;
- les conclusions aux fins d'annulation du contrat litigieux ne peuvent qu'être rejetées dès lors qu'aucun de moyens soulevés par la société Performance Environnement, à les supposer fondés, ne révèle l'existence d'une illégalité du contenu du contrat, d'un vice du consentement ou de toute autre illégalité susceptible d'être relevée d'office par le juge, la société requérante se bornant, pour l'essentiel à faire état des erreurs commises par le pouvoir adjudicateur sur l'appréciation de la qualité de son offre et qu'en tout état de cause, l'intérêt général qui s'attache à la continuité du service public de collecte et traitement des déchets fait obstacle à la disparition rétroactive du marché.
Par un mémoire en intervention volontaire, enregistré le 10 janvier 2021, la société Passenaud Henri Récupération, représentée par Me Collart, conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la Sarl Performance Environnement au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la requête doit être rejetée comme relevant de la compétence du seul juge judiciaire dès lors que le présent litige ne porte pas sur un contrat administratif ; il ne s'agit pas d'une opération de travaux publics, la SPL ne constitue pas un organisme transparent et ne s'est pas vue confier de mandat par la personne publique ;
- subsidiairement, les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés ;
* s'agissant de l'erreur d'analyse du critère prix, elle a proposé un prix de marché et la requérante ne procède que par allégations sans justifier des manquements aux règles de transparence qu'elle invoque ; s'agissant du sous-critère relatif à la distance, il figurait dans la méthode d'analyse du critère prix, notamment au travers de la prise en compte des coûts de transport ; s'agissant de la méthode de notation, elle peut librement être déterminée par l'acheteur public et la société requérante n'établit pas son irrégularité faute de démontrer qu'elle aurait pour conséquence directe de ne pas attribuer la meilleure note à la meilleure offre financière ; s'agissant du moyen tiré de la méconnaissance des clauses du cahier des clauses techniques particulières relatives au site de mise en balles, il est inopérant dès lors que le cahier des clauses techniques particulières invoqué ne figurait pas dans les documents de la consultation ; s'agissant de la gestion des sur-tri, la requérante n'établit même pas avoir interrogé le pouvoir adjudicateur ; la critique sur la modification des critères de notation en cours de procédure ne peut, elle non plus, être favorablement accueillie dès lors qu'il s'agit d'une méthode de notation du critère du prix ; ce supposé manquement n'a pas été susceptible de léser la requérante ;
* s'agissant de l'erreur d'analyse du critère technique, la société requérant ne démontre pas que la pondération choisie n'aurait pas permis de retenir au final l'offre économiquement la plus avantageuse ;
( sur l'item relatif à la réception des cartons : la société Passenaud a répondu aux prescriptions des articles 5.1 et 5.2 du cahier des clauses particulières ; le grief opposé par la société requérante n'est pas fondé ;
( sur l'item relatif au dimensionnement du site : son offre était meilleure dès lors qu'elle proposait une superficie d'accueil extérieure supérieure ; par ailleurs le moyen de la société requérante est inopérant ; elle ne démontre aucune lésion ;
( sur l'item relatif à la circulation : la société Passenaud offre une possibilité de circulation plus simple, plus sécurisée et plus rapide et elle était fondée à obtenir davantage de points sur sa note ;
( sur l'item relatif à la mise en balles conformément aux PTM du repreneur : la société requérante ne démontre pas en quoi la non attribution de notes sur certaines prescriptions techniques l'aurait lésée et aurait bouleversé le classement final ; ces prescriptions ne constituaient pas des critères servant à l'appréciation des offres ; les photographies produites par la société requérante quant au dimensionnement des balles de la société Passenaud ne sont pas probantes ; s'agissant du stockage des balles, elle a démontré dans son mémoire technique qu'elle pouvait entreposer les balles à l'intérieur et la SPL n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en lui accordant un point ; s'agissant de la presse utilisée, la société Passenaud dispose d'une presse conforme aux prescriptions techniques du CCP et à la norme ; la requérante ne démontre pas en quoi cette conformité ne serait pas établie ; s'agissant de la gestion des stocks, la SPL a pu régulièrement accorder un point à la société Passenaud dès lors que celle-ci présentait des moyens conformes à ses attentes ; s'agissant de l'item " procédure demande d'enlèvement ", elle se rapporte à l'analyse en défense faite par la SPL ;
-la demande d'annulation du contrat ne peut qu'être rejetée dès lors que la requérante ne démontre absolument pas l'existence d'un vice, encore moins présentant les critères de gravité requis par la jurisprudence ; le contrat porte sur le traitement de déchets et, eu égard aux conséquences sanitaires qu'une mesure d'annulation provoquerait, une telle mesure générerait une atteinte excessive à l'intérêt général.
La clôture immédiate de l'instruction a été prononcée par une ordonnance du
21 février 2022 2022, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code la commande publique ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A,
- les conclusions de M. Dias, rapporteur public
- les observations de Me Cavalier, substituant Me Buffet, représentant la Sarl Performance Environnement,
- les observations de Me Couëtoux Du Tertre, substituant Me Marchand, représentant la SPL Saumur Agglopropreté,
- et les observations de Me Fouché, substituant Me Collart, représentant la société Passenaud Henri Récupération.
Une note en délibéré, enregistrée le 4 janvier 2023, a été présentée pour la société Performance Environnement.
Considérant ce qui suit :
1. Par un contrat conclu le 26 décembre 2019, la communauté d'agglomération Saumur Val de Loire a confié, à compter du 1er janvier 2020, à la société publique locale (SPL) Saumur Agglopropreté l'exploitation et l'animation du service de gestion des déchets ménagers et assimilés de la communauté d'agglomération. Afin d'assurer la mission de valorisation des cartons de déchèteries, la SPL Saumur Agglopropreté a lancé une procédure adaptée, sur le fondement de l'article R. 2123-1 du code de la commande publique, en vue de la mise en balles des cartons issus des déchèteries et de collectes en porte à porte. Ce marché a été scindé en deux lots, le premier portant sur la mise en balles des cartons issues des déchèteries de Saumur, Montreuil Bellay, Allonnes et la collecte en porte à porte de Saumur, le second portant sur la mise en balles des cartons issus des déchèteries de Vernantes et Longué-Jumelles. Trois candidats, parmi lesquels les sociétés Passenaud et Performance Environnement, ont remis une offre pour chacun des deux lots et ont été admis à négocier. Par courrier du 10 décembre 2019, la société Performance Environnement a été informée du rejet de son offre, classée en troisième position sur le lot un et en deuxième position sur le lot deux, les deux lots étant attribués à la société Passenaud. La société Performance Environnement demande au tribunal d'annuler le contrat signé entre la SPL et l'attributaire le 18 décembre 2019.
Sur l'intervention de la société Passenaud:
2. Toute personne qui justifie d'un intérêt suffisant eu égard à la nature et à l'objet du litige est recevable à former une intervention. Il résulte de l'instruction que la société Passenaud Henri Récupération intervient volontairement à la procédure en qualité d'attributaire du contrat attaqué. Dès lors, il y a lieu d'admettre l'intervention de la société Passenaud Henri Récupération.
Sur la compétence de la juridiction administrative :
3. Aux termes de l'article L. 1531-1 du code général des collectivités territoriales dans sa version applicable : " Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent créer, dans le cadre des compétences qui leur sont attribuées par la loi, des sociétés publiques locales dont ils détiennent la totalité du capital. / Ces sociétés sont compétentes pour réaliser des opérations d'aménagement au sens de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, des opérations de construction ou pour exploiter des services publics à caractère industriel ou commercial ou toutes autres activités d'intérêt général. / Ces sociétés exercent leurs activités exclusivement pour le compte de leurs actionnaires et sur le territoire des collectivités territoriales et des groupements de collectivités territoriales qui en sont membres. Elles peuvent également exercer leurs activités pour le compte d'une société publique locale d'aménagement d'intérêt national sur laquelle au moins un de leurs membres exerce un contrôle analogue à celui qu'il exerce sur ses propres services. /Ces sociétés revêtent la forme de société anonyme régie par le livre II du code de commerce () "
4. Les contrats conclus entre personnes privées sont, sauf dispositions législatives contraires, des contrats de droit privé, hormis le cas où l'une des parties agit pour le compte d'une personne publique ou celui dans lequel ils constituent l'accessoire d'un contrat de droit public.
5. En premier lieu, en vertu de l'article L. 1531-1 du code général des collectivités territoriales, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent créer des sociétés publiques locales dont elles détiennent le capital et qui revêtent la forme de société anonyme régie par le livre II du code de commerce. La SPL Saumur Agglopropreté a été créée sur le fondement de ces dispositions par communauté d'agglomération et la ville de Saumur en 2013. Ainsi créée dans le cadre institué par le législateur pour permettre à une collectivité territoriale de transférer certaines missions à une personne morale de droit privé contrôlée par elle, la SPL Saumur Agglopropreté ne peut être regardée comme une entité transparente. En concluant avec la société Passenaud Henri Récupération le contrat litigieux le 18 décembre 2019, la SPL Saumur Agglopropreté a agi en son nom et pour son propre compte.
6. En second lieu, aux termes de l'article L. 6 du code de la commande publique : " S'ils sont conclus par des personnes morales de droit public, les contrats relevant du présent code sont des contrats administratifs, sous réserve de ceux mentionnés au livre V de la deuxième partie et au livre II de la troisième partie ".
7. Il résulte de ce qui précède que le contrat litigieux ne peut être regardé comme ayant été passé par ou pour le compte d'une personne publique. Par suite, la circonstance que les sociétés publiques locales soient des pouvoirs adjudicateurs au sens de l'article L. 1211-1 du code de la commande publique ne permet pas de regarder le contrat conclu entre la SPL Saumur Agglopropreté et la société Passenaud Henri Récupération comme étant un contrat de droit public. De même, la circonstance tirée de ce que le contrat aurait pour objet l'exécution d'un service public administratif financé par la taxe d'enlèvement des ordures ménagères est sans incidence sur sa qualification dès lors qu'il n'a été conclu ni en vertu d'un mandat ni au nom et pour le compte d'une personne publique.
8. En dernier lieu, il ne résulte pas des termes du marché de quasi-régie attribué par la communauté d'agglomération Saumur Val de Loire à la SPL Saumur Agglopropreté que celle-ci conférerait un mandat explicite au bénéfice de cette dernière. Ce contrat confie à la SPL une mission d'exploitation, d'animation et de gestion du service public des déchets et la responsabilité de l'exécution du service en organisant, de la manière la plus pertinente, la mise en place des moyens nécessaires à l'accomplissement de ses missions. La SPL est responsable du bon fonctionnement du service dans le cadre des dispositions du contrat et se doit d'assurer la continuité du service public. Elle doit faire son affaire personnelle de tous les litiges pouvant provenir du fait de son exploitation et coordonner et contrôler l'ensemble des sous-traitants et intervenants associés à l'exploitation du service. Par ailleurs, il n'est pas établi ni même allégué que la communauté d'agglomération aurait participé au choix de l'attributaire du contrat attaqué. Enfin, les articles 1.9.1 et 1.9.2 du marché de quasi-régie prévoient que la SPL fait son affaire des contrats relatifs à la gestion du service. Dans ces conditions, la SPL Saumur Agglopropreté ne peut être regardée comme mandataire de la communauté d'agglomération Saumur Val de Loire alors qu'elle a contracté en qualité de titulaire d'un marché de quasi régie et de gestionnaire du service public dont la gestion et l'exploitation lui ont été confiées.
9. Il résulte de ce qui précède que le contrat conclu entre la SPL Saumur Agglopropreté, société publique locale ayant le statut de société anonyme de droit privé, et la société Passenaud Henri Récupération, société de droit privé, est un contrat de droit privé. Par suite, l'exception d'incompétence de la juridiction administrative pour connaître du présent recours en contestation de la validité de ce contrat, opposée par la SPL Saumur Agglopropreté et par la société Passenaud Henri Récupération, doit être accueillie.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Dans les circonstances de l'espèce, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais exposés par elles et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : L'intervention de la société Passenaud Henri Récupération est admise.
Article 2 : La requête de la société Performance Environnement est rejetée comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent jugement sera notifié à la société Performance Environnement, à la SPL Saumur Agglopropreté et à la société Passenaud Henri Récupération.
Délibéré après l'audience du 4 janvier 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Loirat, présidente,
M. Gauthier, premier conseiller,
M. Marowski, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er février 2023.
Le rapporteur,
Y. A
La présidente,
C. LOIRAT
La greffière,
P. LABOUREL
La République mande et ordonne au préfet de Maine-et-Loire en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
N°2001624