Tribunal Administratif de Bordeaux, 29/07/2022, n°2202365

Vu la procédure suivante :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 19 avril et 30 mai 2022, la commune de Bordeaux, représentée par Me Heymans, demande au juge des référés :
1°) d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, aux sociétés X'TU Architecture, 8'18'' (huit minutes dix-huit secondes), Lavalin Services, Le Sommer Environnement, Casso et Associés, L'Autobus Imperial, Peutz et Associés, Casson Mann Limited, GTM Bâtiment Aquitaine, SMAC, Coveris, Guarrigues, Caillaud Lamelle Colle, Fargeot Lamelle Colle, Soletanche, Bachy Pieux, Hervé Thermique, Ineo Aquitaine (Cofely Ineo - Ineo Aquitaine), L'Atelier D'agencement, Les Ateliers Saint-André, Loison, Ouest Signaletiques Services, Navellier, Plafondecor, Segonzac, Miner, Entreprise Richard, Sodifra Agencement, Eiffage Travaux Publics Sud-Ouest Etablissement Aquitaine, Videlio-Iec, Mecascenic, Les Ateliers Lumiere, Matières à Penser, Multispe France, la communication de leurs attestations d'assurance de responsabilité décennale ainsi que celles de leurs sous-traitants, dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'ordonnance, sous peine d'une astreinte de 500 euros par jour de retard ;
2°) de mettre à la charge solidaire des sociétés X'TU Architecture, 8'18'' (huit minutes dix-huit secondes), Lavalin Services, Le Sommer Environnement, Casso et Associés, L'Autobus Imperial, Peutz et Associés, Casson Mann Limited, GTM Bâtiment Aquitaine, SMAC, Coveris, Guarrigues, Caillaud Lamelle Colle, Fargeot Lamelle Colle, Soletanche, Bachy Pieux, Hervé Thermique, Ineo Aquitaine, L'Atelier D'agencement, Les Ateliers Saint-André Loison, Ouest Signaletique Services), Navelier, Plafondecor, Segonzac, Miner, Entreprise Richard, Sodifra Agencement, Eiffage Travaux Publics Sud-Ouest Etablissement Aquitaine, Videlio-Iec, Mecascenic, Les Ateliers Lumiere, Matières à Penser, Multispe France une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La commune de Bordeaux soutient que :

  • le juge des référés est compétent pour ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, au cocontractant de l'administration dans le cadre d'un marché public, la transmission des attestations d'assurance obligatoire ;
  • les attestations de responsabilité décennale sont nécessaires pour assurer la prise en charge rapide des éventuels désordres affectant la cité des civilisations du vin par les assureurs ;
  • dans le cadre du contrat collectif de responsabilité décennale qu'elle a conclu avec la société SMABTP, elle s'est engagée, à l'article 1.6 de l'annexe, à communiquer à cette dernière les attestations d'assurance de responsabilité décennale de chaque constructeur ; en l'absence de communication de ces documents, elle s'expose, soit à un refus de garantie en cas de sinistre, soit à une majoration de cotisation d'un montant de 513 113,42 euros TTC, si bien que les conditions d'urgence et d'utilité de la mesure demandée sont caractérisées ;
  • le refus des sociétés méconnaît les articles L. 241-1 et L. 243-2 du code des assurances, 9 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicable au marchés de travaux, 9 du CCAG applicable au marchés de prestations intellectuelles, 1.6 de l'annexe au contrat qu'elle a conclu avec la SMABTP, 26.3 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) du marché de maîtrise d'œuvre, et les CCAP des marchés de travaux des lots 1, 2, 3, 4, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 13, 14, 15, 16.
    Par un mémoire, enregistré le 13 mai 2022, la société Soletanche Bachy Fondations Spéciales expose avoir transmis l'attestation de responsabilité décennale dès le 9 août 2016.
    Par un mémoire, enregistré le 19 mai 2022, la société Ateliers Saint-André expose avoir transmis l'attestation de responsabilité décennale le 22 septembre 2016.
    Par un mémoire, enregistré le 19 mai 2022, la société Edeis, venant aux droits de la société Lavalin Services, expose qu'elle n'a jamais reçu de demande d'attestation de la part de la commune de Bordeaux, et qu'elle transmet son attestation de responsabilité décennale au titre de l'année 2013.
    Par un mémoire, enregistré le 19 mai 2022, la société par actions simplifiée Etablissements Miner expose transmettre son attestation de responsabilité décennale ainsi que celle de ses sous-traitants, dont la société Arkaïa, créée en 2015.
    Par un mémoire, enregistré le 20 mai 2022, la société par actions simplifiée Matières à Penser expose qu'elle n'a reçu qu'une demande d'attestation de responsabilité décennale par courriel en 2016 et qu'elle y a fait droit ; en outre, elle n'est pas constructeur puisqu'elle s'est bornée à réaliser des maquettes et des manipulations interactives.
    Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mai 2022, la société par actions simplifiée Coveris, représentée par Me Belleville, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 000 euros soit mise à la charge de la commune de Bordeaux en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
    La société Coveris soutient que :
  • elle a transmis une copie de son attestation d'assurance dès le 26 juillet 2016, propre au chantier et conforme aux dispositions légales et contractuelles, et n'a reçu depuis aucune relance ;
  • la condition d'urgence n'est pas remplie dès lors que la commune a fait preuve de carence dans le suivi du dossier ; par ailleurs, le lien avec le surcoût de son assurance n'est pas établi ; enfin, l'assurance collective de responsabilité décennale n'est pas une assurance de préfinancement, au contraire de son assurance dommage-ouvrage, si bien que la détention de ces attestations n'est pas une garantie de bon fonctionnement du service public.
    Par un mémoire, enregistré le 24 mai 2022, la société par actions simplifiée à associé unique Segonzac, représentée par Me A, conclut au rejet de la requête, à titre subsidiaire à ce que soit prononcé un non-lieu à statuer, et à ce que soit mise en toute hypothèse à la charge de la commune de Bordeaux une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
    La société Segonzac soutient qu'elle a transmis l'attestation sollicitée et complète le 3 août 2016 et n'a reçu aucune relance.
    Par des mémoires en défense, enregistrés les 24 et 30 mai 2022, la société Richard, représentée par Me Dirou, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Bordeaux la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
    La société Richard soutient que les documents demandés par la commune de Bordeaux ont été transmis le 9 septembre 2016, ainsi que dans le cadre de la présente instance.
    Par un mémoire, enregistré le 24 mai 2022, la société par actions simplifiée Hervé Thermique, représentée par Me Belleville, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 000 euros soit mise à la charge de la commune de Bordeaux en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
    La société Hervé Thermique soutient que :
    -elle a transmis une copie de son attestation d'assurance en 2016, propre au chantier et conforme aux dispositions légales et contractuelles, et n'a reçu depuis aucune relance ;
    -la condition d'urgence n'est pas remplie dès lors que la commune a fait preuve de carence dans le suivi du dossier ; par ailleurs, le lien avec le surcoût de son assurance n'est pas établi ; enfin, l'assurance collective de responsabilité décennale n'est pas une assurance de préfinancement, au contraire de son assurance dommage-ouvrage, si bien que la détention de ces attestations n'est pas une garantie de bon fonctionnement du service public.
    Par un mémoire en défense, enregistré le 25 mai 2022, la société Atelier d'Agencement, représentée par la SCP Laydeker-Sammarcelli-Mousseau conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Bordeaux une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
    Elle soutient qu'elle a transmis les attestations d'assurance nominatives les 2 septembre et 3 octobre 2016.
    Par un mémoire, enregistré le 27 mai 2022, la société Loison expose qu'elle transmet au tribunal son attestation de responsabilité décennale, ainsi que celles de ses sous-traitants les sociétés Portafeu, Artibat SPISP, Antoine Espaces Verts, Chateauret, Hoermann, Hormann, SMPZ, Automatic Systems, Richard, Facing, Teinte et Protection, Fil de Faire, déjà communiquées en cours d'exécution des travaux.
    Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mai 2022, la société Le Sommer Environnement, représentée par Me Dirou, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la commune de Bordeaux en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
    Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mai 2022, la société Casson Mann, représentée par Me Crespelle, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de Bordeaux en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
    La société Casson Mann soutient que :
  • la commune de Bordeaux, qui s'est rendue coupable de carence fautive dans l'usage des pouvoirs qu'elle tenait du contrat, est seule responsable de l'urgence alléguée ; il n'existe aucun sinistre rendant urgente la communication de l'attestation ; enfin, les risques invoqués par la commune ne sont pas établis ;
  • la commune de Bordeaux aurait pu mettre en œuvre les clauses contractuelles contenues dans les cahier des clauses administratives particulières (CCAP) des différents constructeurs pour obtenir communication des différentes attestations ; la commune ne démontre pas que l'absence de communication de ces documents pourrait entraver la continuité du service public ; par suite, la condition d'utilité n'est pas davantage remplie ;
  • scénographe-muséographe, elle n'a pas la qualité de constructeur, si bien qu'elle n'avait pas à souscrire de contrat d'assurance de responsabilité décennale ; il en va de même de ses sous-traitants ; la mesure sollicitée se heurte ainsi à une contestation sérieuse ; en tout état de cause, l'obligation de produire une attestation d'assurance n'existait que durant l'exécution des prestations, selon l'article 26.3 du CCAP du marché de maîtrise d'œuvre ; la réception des travaux a mis fin aux obligations contractuelles ;
  • elle n'a pas souscrit d'assurance de responsabilité décennale et est dans l'impossibilité de produire une attestation.
    Par un mémoire en défense, enregistré le 31 mai 2022, la société GTM Bâtiment Aquitaine et la société Arbonis, venant aux droits des sociétés Caillaud Lamelle Colle et Fargeaud Lamelle Colle, représentées par Me Coronat, concluent au rejet de la requête.
    Les sociétés GTM Bâtiment Aquitaine et Arbonis soutiennent qu'elles ont transmis dès le 3 mars 2016 les attestations demandées.
    Vu les autres pièces du dossier ;
    Vu :
  • le code des assurances ;
  • le code civil :
  • l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;
    -l'arrêté du 16 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles ;
  • l'arrêté du 5 janvier 2016 fixant un modèle d'attestation d'assurance comprenant des mentions minimales prévu par l'article L. 243-2 du code des assurances ;
  • le code de justice administrative.
    Vu la décision du 1er octobre 2021 par laquelle la présidente du tribunal a désigné M. B pour exercer les fonctions de juge des référés.
    Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
    Au cours de l'audience publique tenue le 31 mai 2022 à 10h en présence de Mme Gioffré, greffière d'audience, M. B a lu son rapport, informé les parties l'ordonnance était susceptible d'être fondée sur les moyens, relevés d'office, tirés de ce que si les attestations d'assurance ont été transmises avant l'introduction de la requête, les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative seront rejetées comme irrecevables, que si les attestations d'assurance ont été transmises pendant l'instruction de l'affaire, il n'y aura pas lieu de statuer sur ces conclusions, et entendu :
    -les observations de Me Platel, représentant la commune de Bordeaux, qui reprend ses écritures sans soulever de nouveau moyen ;
    -les observations de Me Coronat, représentant les sociétés GTM Bâtiment Aquitaine et Arbonis, qui reprennent leurs écritures sans soulever de nouveau moyen ;
  • les observations de Me Suffran, représentant les sociétés Coveris et Hervé Thermique, qui reprennent leurs écritures sans soulever de nouveau moyen ;
  • les observations de Me Davous, représentant la société l'Atelier d'agencement, qui reprend ses écritures sans soulever de nouveau moyen;
  • les observations de Me Dirou, représentant les sociétés Le sommer environnement et Entreprise Richard, qui reprennent leurs écritures sans soulever de nouveau moyen;
  • les observations de Mme A, représentant la société Segonzac, qui reprend ses écritures sans soulever de nouveau moyen.
    La clôture de l'instruction a été reportée au 7 juin 2022 à 12h, en application de l'article R. 522-8 du code de justice administrative.
    Par un mémoire en défense, enregistré le 31 mai 2022, la société Hervé Thermique conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures, et soutient que la production des attestations d'assurance en garantie décennale de ses sous-traitants ne repose sur aucun fondement légal ni contractuel, et que ces attestations ne sont pas réclamées par la SMABTP à la commune de Bordeaux et ne lui ont jamais été réclamées par la commune ; elle produit néanmoins les éléments en sa possession.
    Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juin 2022, la société Soletanhe Bachy Fondations Spéciales expose n'avoir fait appel à aucun sous-traitant.
    Par un mémoire en défense, enregistré le 2 juin 2022, la société Mecascenic expose avoir transmis les documents demandés le 17 mai 2022.
    Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juin 2022, la société Segonzac conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire, et soutient que la commune de Bordeaux n'a jamais réclamé les attestations de responsabilité décennale de ses sous-traitants, que ceux-ci ne sont pas des constructeurs au sens de l'article 1792 du code civil, l'assurance décennale du titulaire couvrant sa responsabilité décennale du fait de ses sous-traitants, que les attestations d'assurance n'ont de sens que dans des cas très exceptionnels, et que les sous-traitants ne sont intervenus qu'en 2015 et 2016 et non dès 2013 ; elle produit néanmoins les éléments en sa possession, mais les deux sous-traitants n'ont plus d'existence légale.
    Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juin 2022, la société Ineo Aquitaine, représentée par Me Hounieu, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de la commune de Bordeaux en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
    La société Ineo Aquitaine soutient que :
  • il appartiendra au tribunal d'apprécier le respect de la condition d'urgence au regard du risque potentiel de refus d'assurance et de majoration de prime invoqué par la commune de Bordeaux ; celle-ci ne démontre pas lui avoir adressé une réclamation ;
  • elle a adressé son attestation de responsabilité décennale complète le 7 juillet 2014 ;
  • l'article 14.3 du cahier des clauses administratives particulières des lots techniques n'impose pas la communication des attestations de responsabilité décennale des sous-traitants.
    Par un mémoire enregistré le 6 juin 2022, la commune de Bordeaux conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures.
    La commune de Bordeaux soutient que :
  • le contenu de l'attestation de responsabilité est précisé par l'article A. 243-3 du code des assurances ; les attestations doivent être nominatives, dès lors qu'elles concernent une opération de construction particulière ;
  • cette obligation concerne les titulaires des marchés comme leurs sous-traitants ;
  • la fédération française des sociétés d'assurance a informé les sociétés et leurs assureurs des montants de garantie des police de première ligne, dans ses préconisations du 18 décembre 2008 ; les attestations doivent préciser ce montant.
    Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juin 2022, la société Atelier d'agencement conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire, et soutient que les attestations d'assurance transmises étaient complètes.
    Par un mémoire en défense, enregistré le 9 juin 2022, la société Richard expose qu'elle n'est pas attributaire du lot n°6, et qu'elle n'a fait intervenir aucun sous-traitant pour le lot 9A.
    Par une ordonnance du 15 juin 2022, l'instruction a été rouverte et une nouvelle clôture fixée au 30 juin 2022 à 12h.
    Par des mémoires, enregistrés les 28 et 30 juin 2022, la commune de Bordeaux conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures, et par les mêmes moyens.
    Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juin 2022, la société Eiffage Route Sud-Ouest conclut au rejet de la requête.
    Elle soutient que :
  • les attestations d'assurance de responsabilité civile, responsabilité décennale bâtiment ainsi que responsabilité décennale génie civil ont été transmises le 29 février 2016 aux services de Bordeaux Métropole, et aucun courrier de relance ne lui a été adressé par la commune de Bordeaux ;
  • une attestation de responsabilité décennale de première ligne nominative en présence d'un contrat collectif de responsabilité décennale a été transmise le 17 octobre 2016.
    Par un mémoire en défense, enregistrée le 13 juillet 2022, la société Matières à Penser expose que ses prestations ne relèvent pas de la garantie obligatoire.
    Par un mémoire en défense, enregistrée le 13 juillet 2022, la société Multispe transmet une attestation d'assurance de responsabilité décennale.
    Par un mémoire en défense, enregistré le 25 juillet 2022, la société SMAC conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de Bordeaux en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
    La société SMAC soutient que :
  • elle a transmis une attestation d'assurance nominative le 1er décembre 2016 ;
  • cette attestation vaut également pour ses sous-traitants.

Considérant ce qui suit :

1. Par acte d'engagement du 18 juillet 2011, la commune de Bordeaux a confié à un groupement constitué notamment des sociétés X'TU, mandataire, Lavalin Services, Le Sommer Environnement, Casso et Associés, 8'18'', Peutz et Associés, Casson Mann et l'Autobus Imperial, la maîtrise d'œuvre de la construction d'un centre culturel et touristique du vin. Une mission de conception et de direction artistique des productions audiovisuelles et multimedia du parcours permanent de ce centre a également été confiée à la société Casson Mann par acte d'engagement du 3 avril 2012. Un groupement solidaire composé des sociétés GTM Bâtiment Aquitaine, mandataire, SMAC, Coveris, Garrigues, Caillaud Lamelle Colle, Fargeot Lamelle Colle et Soletanche Bachy Pieux a été chargé le 18 août 2013 du lot n°1 " fondations/gros œuvre/charpente/couverture/étanchéité/vêture/menuiseries extérieures ". Le lot n°2 " fluides " a été attribué à la société Hervé Thermique, et le lot n°4 " électricité " à la société Ineo Aquitaine le 9 octobre 2013. Un groupement solidaire constitué des sociétés L'Atelier d'Agencement et Ateliers Saint-André a été chargé du lot n°5 " agencement mobilier " par acte d'engagement du 21 août 2015, la société Loison a été chargée du lot n°6 " métallerie-serrurerie " le 7 novembre 2013, la société Ouest Signalétique Services a été chargée du lot n°6B " signalétique directionnelle " le 8 octobre 2015, la société Navellier a été chargée du lot n°7A " plâtrerie-cloisons-doublage " le 4 septembre 2014, la société Plafondecor a été chargée du lot n°7B " faux plafonds tendus/isolant " le 8 avril 2015, la société Segonzac a été chargée du lot n°7C " plafonds en plaques de plâtre non démontables " le 4 septembre 2014, la société Miner a été chargée du lot n°8 " revêtements " le 7 novembre 2013. Le lot n°9A " menuiseries bois intérieures-blocs-portes et ouvrages associés " a été attribué à un groupement constitué des sociétés Entreprise Richard, mandataire solidaire, et L'Atelier d'Agencement par acte d'engagement du 30 avril 2014, le lot n°9C " plancher technique " a été attribué à la société Sodifra Agencement par acte d'engagement du 4 septembre 2014, et le lot n°11 " VRD-terrassements-voirie et réseaux d'assainissement " a été attribué à la société Eiffage Travaux Publics Sud-Ouest par acte d'engagement du 8 octobre 2013. Le lot n°12 " équipement multimédia " a été confié à la société Videlio-Iec le 21 août 2015, le lot n°13 " auditorium machinerie et tenture scénique " a été confié à la société Mecascenic le 9 octobre 2013. Enfin, la société Matières à Penser a été chargée du lot n°19 " conception, fabrication et installation des manips " le 12 mars 2015, et la société Multispé France du lot n°21 " nacelle de nettoyage " le 8 avril 2015. Le chantier a été ouvert le 2 septembre 2013 et les travaux, dont le coût définitif s'élève à 87 298 901 euros toutes taxes comprises (TTC), ont été réceptionnés le 9 mai 2016, les réserves étant levées dans le courant de l'année 2016. Le 31 mai 2016, la commune de Bordeaux a souscrit auprès de la SMABTP une assurance dommage ouvrage, une assurance constructeur non réalisateur et un contrat collectif de responsabilité décennale, pour un montant total toutes taxes comprises, après avenant lié au rehaussement du coût des travaux, de 1 028 348,76 euros. La SMABTP réclamant au maître d'ouvrage, dans le cadre de l'exécution de ce contrat, les attestations de responsabilité décennale des constructeurs intervenus sur le chantier de la " Cité des civilisations du vin ", la commune de Bordeaux demande au juge des référés d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, aux sociétés précitées la communication de leurs attestations d'assurance de responsabilité décennale ainsi que celles de leurs sous-traitants.

Sur le non-lieu à statuer :

2. Il résulte de l'instruction qu'en cours d'instruction, les sociétés Le Sommer Environnement, Garrigues et Soletanche Bachy Pieux ont produit une attestation d'assurance de responsabilité décennale conforme aux exigences de la commune de Bordeaux. Il en va de même de la société Eiffage Travaux Publics Sud-Ouest, devenue Eiffage Route Sud-Ouest qui, contrairement à ce que soutient la commune requérante, était la société titulaire du lot n°11. Dès lors, les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative à l'encontre de ces sociétés sont devenues sans objet. Il n'y a pas lieu d'y statuer.

Sur la recevabilité :

3. Il résulte de l'instruction que la société SMAC avait transmis dès avant l'introduction de la requête une attestation d'assurance de responsabilité décennale conforme aux exigences de la commune de Bordeaux. Le 3 mars 2016, la société GTM Bâtiment Aquitaine en avait fait de même, ainsi que les sociétés Caillaud Lamelle Colle et Fargeot Lamelle Colle, devenues Arbonis. Dès lors, les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative à l'encontre de ces sociétés étaient dépourvues d'objet et, ainsi, irrecevables.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative :

4. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. ". Saisi sur le fondement de ces dispositions d'une demande qui n'est pas manifestement insusceptible de se rattacher à un litige relevant de la compétence du juge administratif, le juge des référés peut prescrire, à des fins conservatoires ou à titre provisoire, toutes mesures que l'urgence justifie, notamment sous forme d'injonctions adressées à l'administration, à la condition que ces mesures soient utiles et ne se heurtent à aucune contestation sérieuse.

En ce qui concerne les conditions d'utilité et d'urgence :

5. Il résulte de l'instruction qu'en vertu de l'annexe 1.6 de l'acte d'engagement conclu le 31 mai 2016 entre la SMABTP et la commune de Bordeaux, cette dernière s'est engagée, au titre des conditions de garantie, à communiquer à l'assureur l'attestation d'assurance de responsabilité décennale de chaque constructeur au sens de l'article 1792-1 du code civil ainsi que du contrôleur technique. L'attestation d'assurance doit viser le chantier, la date de déclaration d'ouverture, préciser les missions ou activités garanties, pour les entreprises mettant en œuvre des techniques non courantes les produits mis en œuvre et leurs références techniques, et que la garantie délivrée est conforme à la règlementation concernant l'assurance obligatoire de la responsabilité décennale. L'annexe à l'acte d'engagement expose ensuite que les constructeurs doivent disposer au minimum d'un montant de garantie indexé, exclusif de la règle proportionnelle d'indemnité, au moins égal à dix millions d'euros par sinistre s'agissant des lots structure/gros œuvre/fondations, trois millions d'euros par sinistre s'agissant des lots concepteurs (architecte, maître d'œuvre, bureau d'études techniques spécialisé) et contrôleur technique, et six millions d'euros par sinistre s'agissant des autres lots. Se prévalant de l'article 4.2.2 des conditions générales " Delta Chantier " applicables à ce contrat d'assurance en vertu du préambule de l'annexe à l'acte d'engagement, la SMABTP a appelé une cotisation supplémentaire en raison du non-respect de cette obligation par la commune de Bordeaux, qui correspondrait à 50% de la cotisation " DOGO " par attestation manquante en gros œuvre, fondation, structure, concepteur et contrôle technique, et 20% de la cotisation " DOGO " par attestation s'agissant des autres constructeurs, dans la limite de 100% de la cotisation " DOGO ". Par décompte du 10 septembre 2021, l'assureur a réclamé à la commune de Bordeaux le versement d'une somme de 513 113,42 euros. Des relances ont été effectuées les 16 septembre, 28 septembre 2021 et 7 février 2022. Même si le risque, invoqué par la requérante, d'une couverture partielle des dommages, ou encore d'une résiliation de la convention, n'est pas établie, la commune démontre que l'obtention des attestations de responsabilité décennale des constructeurs conforme aux exigences de son contrat d'assurance revêt, compte tenu de l'importance de la somme réclamée par la SMABTP, un caractère d'utilité et d'urgence.

En ce qui concerne le caractère non sérieusement contestable :

6. Aux termes de l'article L. 241-1 du code des assurances : " Toute personne physique ou morale, dont la responsabilité décennale peut être engagée sur le fondement de la présomption établie par les articles 1792 et suivants du code civil, doit être couverte par une assurance. / A l'ouverture de tout chantier, elle doit être en mesure de justifier qu'elle a souscrit un contrat d'assurance la couvrant pour cette responsabilité ". Aux termes de l'article L. 243-2 de ce code : " Les personnes soumises aux obligations prévues par les articles L. 241-1 à L. 242-1 du présent code doivent être en mesure de justifier qu'elles ont satisfait auxdites obligations. () ". Aux termes de son article R. 243-2 : " Les justifications prévues à l'article L. 243-2 doivent être apportées, lors de la déclaration d'ouverture du chantier, à l'autorité compétente pour recevoir cette déclaration. / Les justifications prévues au présent article précisent le montant des garanties apportées par chacun des contrats souscrits par ou pour le compte des personnes mentionnées aux articles L. 241-1, () ainsi que les modalités d'articulation de ces différentes garanties entre elles. / Lorsqu'il est recouru à un ou plusieurs contrats, auxquels s'appliquent les plafonds de garantie prévus à l'article R. 243-3, les justifications comportent en outre la mention du montant du coût de construction de l'ouvrage déclaré préalablement par le maître de l'ouvrage. / En outre, pendant l'exécution des travaux, le maître de l'ouvrage peut demander à tout intervenant à l'acte de construire de justifier qu'il satisfait aux obligations prévues par les articles L. 241-1 et L. 241-2 ".

S'agissant des entreprises concernées :

7. D'une part, il résulte des dispositions précitées que seules les personnes dont la responsabilité décennale peut être engagée sur le fondement de la présomption établie par les articles 1792 et suivants du code civil sont tenues par l'obligation d'assurance et, partant, d'en justifier auprès du maître de l'ouvrage.

8. D'autre part, aux termes de l'article 1792 du code civil : " Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination. () ". Et aux termes de l'article 1792-1 de ce code : " Est réputé constructeur de l'ouvrage : / 1° Tout architecte, entrepreneur, technicien ou autre personne liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage ; () ".

9. N'étant pas lié au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage, le sous-traitant n'est pas tenu des garanties légales prévues par les articles 1792 et suivants du code civil. Par ailleurs, ni les stipulations de l'article 26.3 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) du marché de maîtrise d'œuvre, ni celles de l'article 14.3 du CCAP du lot n°1, des lots techniques et des lots de second œuvre, ainsi que des lots 6B, 7B et 21, celles de l'article 12 du CCAP des lots n°5 et 12 pas plus que les dispositions des cahiers des clauses administratives générales (CCAG) applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles et aux marchés publics de travaux n'imposent au titulaire du marché de transmettre une attestation d'assurance de responsabilité décennale de son sous-traitant. Il s'ensuit que la commune de Bordeaux ne peut exiger de ses cocontractants qu'ils produisent les attestations de responsabilité décennale de leurs sous-traitants. Par suite, les conclusions dirigées contre les sociétés Hervé Thermique, Ineo Aquitaine, Loison, Navellier, Segonzac, Entreprise Richard et Les Ateliers Lumière, qui, pour elles-mêmes, ont produit une attestation conforme aux exigences du contrat d'assurance souscrit par la commune de Bordeaux, doivent être rejetées.

10. La société Casson Mann ne peut être regardée comme un constructeur au sens de l'article 1792-1 du code civil du fait de la mission de conception et de direction artistique des productions audiovisuelles et multimédia du centre culturel et touristique qui lui a été confiée par l'acte d'engagement du 3 avril 2012. En revanche, l'ensemble des membres du groupement de maîtrise d'œuvre, y compris cette société, étaient liés à la commune de Bordeaux par un contrat de louage d'ouvrage, et il ne ressort pas de l'instruction qu'un document de répartition des tâches opposable au maître d'ouvrage aurait exclu certains de ses membres de la participation à la conception ou à la réalisation de l'ouvrage. En tout état de cause, l'article 26.3 du CCAP imposait au maître d'œuvre, dans la personne de chacune de ses composantes, de justifier d'une assurance couvrant les responsabilités découlant des principes dont s'inspirent les articles 1792 et suivants du code civil.

11. De même, il ne résulte pas de l'instruction que les autres entrepreneurs liés à la commune de Bordeaux par un contrat de louage d'ouvrage, en particulier les sociétés titulaires des lots n° 5 et 12 relatifs au mobilier ou à la scénographie, n'auraient pas été contractuellement chargés de la conception ou de la réalisation de l'ouvrage ou de l'un de ses éléments d'équipement indissociables au sens de l'article 1792-2 du code civil.

S'agissant du montant de la garantie :

12. Aux termes de l'article L. 243-9 du code des assurances : " Les contrats d'assurance souscrits par les personnes assujetties à l'obligation d'assurance de responsabilité ou de dommages en vertu du présent titre peuvent, pour des travaux de construction destinés à un usage autre que l'habitation, comporter des plafonds de garantie ". Aux termes de l'article R. 243-1 du code des assurances : " Les personnes mentionnées aux articles L. 241-1 et L. 241-2 peuvent satisfaire à l'obligation d'assurance leur incombant en vertu de ces articles en recourant à un contrat d'assurance collectif, en complément d'un ou plusieurs contrats d'assurance garantissant individuellement leur responsabilité dans la limite des plafonds fixés dans ce ou ces contrats. / Ce contrat d'assurance collectif peut être souscrit pour le compte de plusieurs personnes mentionnées à ces articles ".  Et aux termes de l'article R. 243-3 de ce code : " I.- Le montant de garantie du ou des contrats d'assurance mentionnés à l'article L. 243-9 doit couvrir les personnes mentionnées aux articles L. 241-1, L. 241-2, L. 242-1 et L. 242-2 à hauteur d'un montant minimum par ouvrage. Ce montant ne peut être inférieur, pour cet ouvrage, au coût total de construction déclaré par le maître de l'ouvrage, ou à 150 millions d'euros si ce coût est supérieur à 150 millions d'euros. / Lorsqu'il est recouru à un contrat d'assurance collectif mentionné à l'article R. 243-1, le total des garanties, tel qu'il résulte de ce contrat collectif et des contrats garantissant chacune des personnes assurées par le contrat collectif, doit couvrir le paiement des travaux de réparation des dommages engageant la responsabilité décennale d'une ou de plusieurs de ces personnes, à hauteur du coût total de construction déclaré par le maître de l'ouvrage, ou à 150 millions d'euros si ce coût est supérieur à 150 millions d'euros ". Il résulte de ces dispositions qu'en l'espèce le montant garanti par l'assurance obligatoire ne peut être inférieur au coût total de construction de la " cité des civilisations du vin ", soit 87 298 901 euros TTC. Toutefois, dans le cadre du contrat collectif de responsabilité décennale souscrit par la commune de Bordeaux, le montant de garantie peut être limité, comme notamment précisé à l'article 14.3 des CCAP des lots techniques et de second œuvre, au seuil de déclenchement de ce contrat d'assurance. Les montants fixés au 1.6 de l'annexe de l'acte d'engagement sont, ainsi qu'il a été dit, dix millions d'euros par sinistre s'agissant des lots structure/gros œuvre/fondations, trois millions d'euros par sinistre s'agissant des lots concepteurs (architecte, maître d'œuvre, bureau d'études techniques spécialisé) et contrôleur technique, et six millions d'euros par sinistre s'agissant des autres lots.

13. La commune de Bordeaux soutient, sans être contredite, que l'attestation fournie par la société Sodifra Agencement ne respecte pas ce niveau de garantie mais mentionne un plafond garanti limité à 10% du montant des travaux. Par suite, il y a lieu d'enjoindre à cette société de produire une attestation mentionnant un niveau de garantie conforme aux règles précédemment exposées.

S'agissant du contenu de l'attestation :

14. Il résulte des dispositions précitées du code des assurances qu'outre l'identification de l'assureur, de l'assuré et du contrat d'assurance de responsabilité décennale obligatoire, les justifications doivent concerner la ou les missions garanties, identifiées par leur nature, localisation et date, le montant du coût de construction de l'ouvrage et le montant de la garantie, y compris le cas échéant en présence d'un contrat collectif de responsabilité décennale. En revanche, ces dispositions n'imposent pas la mention d'une opération de construction particulière et de ses caractéristiques. A cet égard, la commune de Bordeaux ne peut se prévaloir des dispositions de l'article A 243-2 du code des assurances, introduites dans ce code par un arrêté du 5 janvier 2016 fixant un modèle d'attestation d'assurance comprenant des mentions minimales prévu par l'article L. 243-2 du code des assurances, qui ne sont applicables, selon son article 2, qu'aux opérations de construction dont la date d'ouverture de chantier est postérieure au 1er juillet 2016. Elle ne peut davantage se prévaloir des stipulations du contrat d'assurance qu'elle a conclu avec la SMABTP, qui ne s'imposent pas aux constructeurs, et il n'existe pas de stipulations équivalentes dans les marchés publics la liant à ces derniers.

15. Il s'ensuit que lorsque l'attestation présentée par les constructeurs de la " cité des civilisations du vin " justifie du respect de l'article L. 241-1 du code des assurances, l'obligation pour eux de produire une attestation " nominative " visant le chantier, la date de déclaration d'ouverture de celui-ci, les missions qu'ils y ont effectuées, le montant de leur prestation et celui du chantier, est sérieusement contestable. Dès lors, les conclusions dirigées contre les sociétés Casso et Associés, dont l'attestation couvre bien, contrairement à ce que soutient la commune de Bordeaux, la période d'ouverture du chantier, Coveris, et Ouest Signalétique Services doivent être rejetées.

16. En revanche, les attestations d'assurance produites par les sociétés 8'18'', Edéis venant aux droits de la société Lavalin Services, L'Atelier d'Agencement, Ateliers Saint-André, Miner, Mecascenic et Multispe excluent de leur couverture les chantiers, tel celui de la " cité des civilisations du vins " dont le coût s'élève à 87 298 901 euros TTC. L'attestation produite par la société Plafondecor ne couvre pas la période d'ouverture du chantier. Il en va de même de celle produite par la société Videlio Iec, qui ne correspond pas davantage au coût du chantier et ne couvre pas l'hypothèse de souscription d'un contrat collectif de responsabilité décennale, et de celle produite par la société Matière à Penser, qui ne couvre en outre que les chantiers dont le montant est inférieur à 40 millions d'euros hors taxe. Les sociétés X'TU, Peutz et Associés, Casson Mann et L'Autobus Imperial n'ont pas justifié avoir souscrit une assurance de responsabilité décennale obligatoire.

17. La circonstance que les travaux ont été réceptionnés est sans incidence sur l'obligation de justifier de la souscription d'un contrat d'assurance de responsabilité décennale lorsque les constructeurs n'ont pas respecté cette obligation antérieurement, et cela alors même que la commune de Bordeaux n'aurait pas effectué de demande en ce sens. Enfin, il ne résulte pas de l'instruction que la commune de Bordeaux pourrait user d'un autre moyen de contrainte pour sauvegarder ses droits.

18. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu d'enjoindre aux sociétés visées aux points 13 et 16 de la présente ordonnance de produire, dans un délai de deux mois à compter de sa notification, la justification de la souscription d'un contrat d'assurance de responsabilité obligatoire, conformément aux motifs de l'ordonnance. Il y a lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de l'expiration de ce délai.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Bordeaux, qui n'est pas, dans la présente instance de référé, la partie perdante à l'égard des sociétés Casson Mann et Atelier d'Agencement, le versement à ces sociétés des sommes qu'elles demandent au titre des frais exposés au cours de l'instance et non compris dans les dépens. Ces dispositions font également obstacle à ce que mise à la charge des sociétés Le Sommer Environnement, Casso et Associés, GTM Bâtiment Aquitaine, SMAC, Coveris, Guarrigues, Arbonis, Soletanche, Bachy Pieux, Hervé Thermique, Ineo Aquitaine, Loison, Ouest Signaletique Services, Navellier, Plafondecor, Segonzac, Entreprise Richard, Eiffage Route Sud-Ouest, Les Ateliers Lumiere, Matières à Penser, qui ne sont pas, dans la présente espèce, parties perdante, le versement à la commune de Bordeaux d'une somme au même titre. Par ailleurs, il n'y a pas lieu de faire droit, dans les circonstances de l'espèce, aux autres conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :
Article 1er : Il est enjoint aux sociétés X'TU, Peutz et Associés, Casson Mann, L'Autobus Imperial, Sodifra Agencement, 8'18'', Edéis, L'Atelier d'Agencement, Ateliers Saint-André, Miner, Mecascenic, Multispe, Plafondecor et Videlio Iec de justifier de la souscription d'une assurance de responsabilité décennale obligatoire conformément aux motifs de la présente ordonnance. Faute pour ces sociétés de s'exécuter dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente ordonnance, elles seront condamnées à verser une astreinte de 150 euros par jour de retard.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions présentées par les sociétés Coveris, Segonzac, Entreprise Richard, Hervé Thermique, Atelier d'Agencement, Le Sommer Environnement, Casson Mann, Ineo Aquitaine et SMAC sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la commune de Bordeaux et aux sociétés XTU, 8'18'' Edéis, Le Sommer Environnement, Casso et Associés, L'Autobus Imperial, Peutz et Associés, Casson Mann, GTM Bâtiment Aquitaine, SMAC, Coveris, Guarrigues, Arbonis, Soletanche, Bachy Pieux, Hervé Thermique, Ineo Aquitaine, L'Atelier D'agencement, Ateliers Saint-André, Loison, Ouest Signaletique Services, Navellier, Plafondecor, Segonzac, Miner, Entreprise Richard, Sodifra Agencement, Eiffage Route Sud-Ouest, Videlio-Iec, Mecascenic, Les Ateliers Lumiere, Matières à Penser, Multispe France.
Fait à Bordeaux, le 29 juillet 2022.
Le magistrat désigné,
J. BLa greffière,
C. GIOFFRE
La République mande et ordonne à la préfète de la Gironde en ce qui la concerne ou à
tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les
parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
N°2202365

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