CAA Nantes, 16/12/2022, n°21NT03123

CAA Nantes, 16/12/2022, n°21NT03123

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SELARL Huissiers Partner Conseils a demandé au tribunal administratif d'Orléans, en premier lieu, d'annuler la décision du 3 avril 2017 par laquelle le directeur départemental des finances publiques du Cher a rejeté son offre pour l'obtention d'un marché public ayant pour objet l'intervention des huissiers de justice pour le recouvrement amiable des créances prises en charge par les comptables de la direction générale des finances publiques domiciliés dans le département du Cher et la décision par laquelle ce marché public a été attribué au groupement d'intérêt économique "Groupement des Poursuites Extérieures" (GIE GPE), en deuxième lieu, d'annuler le contrat conclu le 4 avril 2017 entre la DDFiP du Cher et le GIE GPE, en troisième lieu, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 207 526, 39 euros en réparation du préjudice résultant de son éviction irrégulière ainsi que la somme de 303 121,81 euros ou, à titre subsidiaire, la somme de 311 682,40 euros, en réparation de son préjudice résultant de la résiliation du précédent marché et du comportement de l'Etat.

Par un jugement n°1703019 du 18 octobre 2018 le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour avant cassation :

La SELARL Huissiers Partner Conseils a demandé à la cour :

1°) à titre principal, de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de la plainte pénale qu'elle a déposée ;

2°) à titre subsidiaire, d'annuler le jugement n° 1703019 du tribunal administratif d'Orléans du 18 octobre 2018 ;

3°) d'annuler la décision du 3 avril 2017 portant rejet de son offre, la décision du directeur départemental des finances publiques du Cher décidant l'attribution du marché au GIE "Groupement des Poursuites Extérieures" et d'annuler le marché conclu entre le directeur départemental des finances publiques du Cher et le GIE "Groupement des Poursuites Extérieures" ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 207 526,39 euros en réparation du préjudice résultant de son éviction illégale et la somme de 303 121,81 euros en réparation des préjudices résultant des fautes contractuelles commises par la DDFiP du Cher

Par un arrêt n° 18NT04492 du 17 juillet 2020, la cour a annulé ce jugement du 18 octobre 2018 en tant qu'il a rejeté la demande de la SELARL Huissiers Partner Conseil tendant à la condamnation de l'État à lui verser la somme de 207 526,39 euros en réparation des préjudices résultant de son éviction illégale du marché pour le recouvrement amiable des créances prises en charge par les comptables de la direction générale des finances publiques dans le département du Cher (article 1er). Elle a également condamné l'État à lui verser la somme de 207 526,39 euros (article 2), a rejeté le surplus des conclusions de la société (article 3) et a mis à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative (article 4).

Par une décision n° 444625 du 5 novembre 2021, le Conseil d'État statuant au contentieux a annulé les articles 1er, 2 et 4 de cet arrêt de la cour du 17 juillet 2020 et a renvoyé dans cette mesure devant la cour l'affaire, qui porte désormais le n° 21NT03123.

Procédure devant la cour après cassation :

Par des mémoires, enregistrés les 2 février et 26 septembre 2022, la SELARL Juriexcel, anciennement dénommée Huissiers Partner Conseil, représentée par Me Leroy, demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) de condamner l'État à lui verser la somme de 207 526,39 euros ;

2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 20 460 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les constatations de la cour d'appel de Bourges, dans son arrêt du 16 juin 2022, s'imposent au juge administratif ;

- ayant été irrégulièrement évincée de la procédure de passation du marché en litige, elle est fondée à solliciter la réparation de son préjudice ;

- la seule circonstance que le changement intervenu dans la composition du GIE candidat à l'attribution d'un marché public n'a pas été publié au registre du commerce et des sociétés ne faisait pas obstacle à ce que le pouvoir adjudicateur qui en a eu connaissance, en tienne compte ;

- l'administration doit supporter les conséquences de la fraude du GIE GPE.

La DDFIP devait vérifier que la candidature du GIE GPE n'était pas frauduleuse compte tenu notamment de la teneur du procès-verbal du conseil d'administration du 31 octobre 2016 ;

la SCP d'huissiers Richard, Lamagnère, Coudray et Chevalier ne faisait pas partie du GIE le

21 juillet 2017 ; un faux a été versé à la procédure par le GIE ; la DDFIP aurait dû demander un Kbis à jour lors du dépôt de la candidature ;

- elle est fondée à demander la réparation de son entier préjudice du fait de son éviction du marché ; elle avait des chances sérieuses de pouvoir obtenir le marché puisque la cause de son éviction réside dans la fraude commise par le GIE dont l'offre devait alors être écartée ; seules deux candidats ont soumissionné de sorte qu'elle aurait dû être classée première ;

- son préjudice est constitué par la perte de 3 années de bénéfice dont il convient de déduire les bénéfices perçus en 2016 et 2017.

Par des mémoires enregistrés les 19 avril et 5 octobre 2022, le Groupement d'intérêt économique (GIE) Groupement des poursuites extérieures, représenté par Me Gravé, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à la condamnation de la SELARL Huissier Partner Conseils à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le contrat ayant été signé entre la DDFIP et Me Coudray, le procès-verbal du GIE GPE argué de faux du 2 août 2017 mais daté du 31 octobre 2016 est resté sans influence sur l'attribution du marché à Me Coudray ;

- la demande indemnitaire ne peut qu'être rejetée comme irrecevable faute de précision quant à son fondement ; Juriexcel ne démontre aucune atteinte à ses droits ni l'existence d'un préjudice.

Par un mémoire enregistré le 20 avril 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance, représenté par Me Foussard-Froger, conclut :

1°) à titre principal au rejet de la requête ;

2°) à titre subsidiaire, à la réduction à de plus justes proportions de la demande indemnitaire de la société Huissiers Partner Conseils ;

3) à ce que soit mis à la charge de la société Huissiers Partner Conseils le paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il ne peut être tenu à indemnisation dans la mesure où il n'est l'auteur d'aucune irrégularité et n'a ainsi commis aucune faute ; le procès-verbal du conseil d'administration daté du 31 octobre 2016 a en réalité été établi le 2 août 2017 et n'ayant pas été produit à l'appui du dossier de candidature du GIE est resté sans influence sur la procédure de passation ; il ne peut lui être reproché de ne pas avoir détecté que le procès-verbal du 31 octobre 2016 aurait constitué un faux ;

- la société appelant ne justifie pas d'une perte de chance sérieuse de se voir attribuer le marché et de prétendre par suite à l'octroi d'une indemnité correspondant à son manque à gagner ; le lien de causalité entre l'irrégularité et les préjudices invoqués n'est pas établi ;

- le quantum des préjudices n'est pas établi.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 ;

- l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 ;

- la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 ;

- le décret n° 56-222 du 29 février 1956 ;

- le décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A,

- les conclusions de M. Berthon, rapporteur public,

- les observations de Me Beaudouin, représentant la SELARL Juriexcel,

- et celles de Me Gravé, représentant le GIE GPE.

Des notes en délibéré, présentées pour le GIE GPE, ont été enregistrées les 17 novembre et 1er décembre 2022.

Une note en délibéré, présentée par la société Juriexcel, a été enregistrée le 29 novembre 2022.

Considérant ce qui suit :

1. Le 25 octobre 2016, la direction départementale des finances publiques (DDFiP) du Cher a publié un avis pour la conclusion, selon la procédure adaptée, d'un marché visant à confier à des huissiers de justice la phase amiable pour le recouvrement des créances prises en charge par les comptables de la direction générale des finances publiques dans le département en application de l'article 128 de la loi du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004. La SELARL Huissiers Partner Conseils a présenté une offre le 21 novembre 2016.

Par un message posté le 3 avril 2017 sur la plate-forme des achats de l'Etat, elle a été informée du rejet de son offre et de l'attribution du contrat au GIE "Groupement des Poursuites Extérieures" (GPE), représenté par la SCP Richard, Lamagnère, Coudray et Chevalier. Après avoir vainement saisi l'administration d'une demande indemnitaire préalable, la SELARL Huissiers Partner Conseils a saisi le tribunal administratif d'Orléans d'une demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision portant rejet de son offre et de la décision attribuant le marché en cause au GIE "Groupement des Poursuites Extérieures", d'autre part, à l'annulation du contrat conclu le 4 avril 2017 entre la DDFiP du Cher et le GIE GPE, enfin, à la condamnation de l'État à lui verser la somme de 207 526,39 euros en réparation du préjudice résultant de son éviction irrégulière ainsi que la somme de 303 121,81 euros ou celle de 311 682,40 euros, en réparation de son préjudice résultant de la résiliation du précédent marché et du comportement de l'État.

2. Par un jugement n° 1703019 du 18 octobre 2018 le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 18NT04492 du 17 juillet 2020, la cour administrative d'appel de Nantes, saisie par la SELARL Huissiers Partner Conseils, a annulé ce jugement en tant qu'il a, en son article 1er, rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'État à lui verser la somme de 207 526,39 euros en réparation du préjudice résultant de son éviction illégale du marché, a, en son article 2, condamné l'État à lui verser la somme de 207 526,39 euros ainsi que, en son article 4, a mis à sa charge la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par une décision n° 444625 du 5 novembre 2021, le Conseil d'État a annulé les articles 1er, 2 et 4 de cet arrêt de la cour et lui a, dans cette mesure, renvoyé l'affaire qui porte désormais le n° 21NT03123.

3. Lorsqu'un candidat à l'attribution d'un contrat public demande la réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de l'irrégularité ayant, selon lui, affecté la procédure ayant conduit à son éviction, il appartient au juge, si cette irrégularité est établie, de vérifier qu'il existe un lien direct de causalité entre la faute en résultant et les préjudices dont le candidat demande l'indemnisation. Si tel est le cas, il appartient au juge de vérifier d'abord si l'entreprise était ou non dépourvue de toute chance de remporter ce marché. Dans l'affirmative, l'entreprise n'a droit à aucune indemnité. Dans la négative, elle a droit, en principe, au remboursement des frais qu'elle a engagés pour présenter son offre. Il convient ensuite de rechercher si l'entreprise avait des chances sérieuses d'emporter le marché. Dans un tel cas, l'entreprise a droit à être indemnisée de son manque à gagner qui doit être déterminé en prenant en compte le bénéfice net qu'aurait procuré ce marché à l'entreprise.

4. En premier lieu, aux termes du I de l'article 128 de la loi du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004 : "Lorsque le comptable du Trésor public est autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires à procéder au recouvrement forcé d'une créance ou d'une condamnation pécuniaire, il peut, préalablement à la mise en œuvre de toute procédure coercitive, demander à un huissier de justice d'obtenir du débiteur ou du condamné qu'il s'acquitte entre ses mains du montant de sa dette ou de sa condamnation pécuniaire. / Les frais de recouvrement sont versés directement par le débiteur ou le condamné à l'huissier de justice ()". Selon l'article 1er de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers : "Les huissiers de justice peuvent () procéder au recouvrement amiable () de toutes créances".

5. Aux termes de l'article L. 251-2 du code de commerce : "Les personnes exerçant une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire () peuvent constituer un groupement d'intérêt économique ou y participer ". Selon l'article L. 123-9 du même code : " La personne assujettie à immatriculation ne peut, dans l'exercice de son activité, opposer ni aux tiers ni aux administrations publiques, qui peuvent toutefois s'en prévaloir, les faits et actes sujets à mention que si ces derniers ont été publiés au registre. () / Les dispositions des alinéas précédents sont applicables aux faits ou actes sujets à mention ou à dépôt même s'ils ont fait l'objet d'une autre publicité légale. Ne peuvent toutefois s'en prévaloir les tiers et administrations qui avaient personnellement connaissance de ces faits et actes () ". Aux termes de l'article L. 251-8 du même code : "I. - Le contrat de groupement d'intérêt économique détermine l'organisation du groupement, sous réserve des dispositions du présent chapitre. Il est établi par écrit et publié selon les modalités fixées par décret en Conseil d'Etat. / II. - Le contrat contient notamment les indications suivantes : / () / III. - Toutes les modifications du contrat sont établies et publiées dans les mêmes conditions que le contrat lui-même. Elles ne sont opposables aux tiers qu'à dater de cette publicité ". L'article R. 123-36 du même code prévoit que les groupements d'intérêt économique sont tenus à l'obligation d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés. L'article R. 123-66 de ce code fait obligation à toute personne morale immatriculée de procéder à une inscription modificative dans le mois de tout fait ou acte rendant nécessaire la rectification ou le complément des mentions de l'immatriculation.

6. Il résulte de ces dispositions que si les groupements d'intérêt économique, constitués entre plusieurs personnes physiques ou morales titulaires d'offices d'huissier de justice, ne peuvent eux-mêmes procéder au recouvrement amiable de créances ou de condamnations pécuniaires préalablement à la mise en œuvre de toute procédure coercitive, ils peuvent se porter candidat à l'obtention d'une commande publique pour le compte de leurs membres, dans le cadre de l'article 128 de la loi du 30 décembre 2004, dès lors que seuls ces derniers exécutent les prestations objet du contrat et à la condition de préciser dans l'acte de candidature quels sont les huissiers membres du groupement qui s'engagent ainsi à exécuter les prestations dans les conditions prévues par l'ordonnance du 2 novembre 1945 et le décret du 29 février 1956, notamment celles relatives à la compétence territoriale des huissiers de justice.

7. L'autorité de la chose jugée appartenant aux décisions des juges répressifs devenues définitives qui s'impose aux juridictions administratives s'attache à la constatation matérielle des faits mentionnés dans le jugement et qui sont le support nécessaire du dispositif. Il s'ensuit que le moyen tiré par la société Juriexcel, antérieurement dénommée Huissiers Partner Conseils, de la méconnaissance de l'autorité de la chose jugée par le juge répressif, qui présente un caractère absolu et est d'ordre public, peut être invoqué par la requérante même après la cassation prononcée par le Conseil d'État.

8. Il résulte de l'instruction que le GIE GPE a produit un acte portant la date du 31 octobre 2016 aux termes duquel la SCP a été intégrée au sein du GIE à cette date à la suite d'une réunion du conseil d'administration de ce GIE.

9. Cependant, par un arrêt du 16 juin 2022, devenu définitif en l'absence de pourvoi en cassation, et revêtu de l'autorité absolue de la chose jugée par le juge répressif, la cour d'appel de Bourges a constaté que cette délibération du 31 octobre 2016, avait été confectionnée en août 2017 afin de répondre aux éclaircissements sollicités par la DGFIP et en vue de sa publication au greffe du tribunal de commerce de Bobigny et d'une communication à la direction départementale des finances publiques du Cher, de sorte qu'un tel document était nécessairement de nature à préjudicier à cette dernière au moins par méprise sur la régularité de la candidature au marché public. La cour d'appel de Bourges a, dès lors, constaté l'altération frauduleuse de la vérité d'un écrit destiné à établir la preuve d'un droit ou d'un fait ayant des conséquences juridiques.

10. Ainsi, à la date de conclusion du marché, le 29 mars 2017, la SCP Richard Lamagnère Coudray Chevalier n'était pas intégrée au GIE de sorte que ce dernier ne pouvait régulièrement candidater à la conclusion du marché.

11. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres vices invoqués par la requérante contre le marché, que cette dernière est fondée à soutenir que le marché public en litige a été attribué au GIE GPE à la suite d'une procédure irrégulière.

12. En l'espèce, la sélection de l'offre du GIE "Groupement des Poursuites Extérieures" est la cause directe de l'éviction de la SELARL Huissiers Partner Conseils dès lors que l'offre de celle-ci, dont il n'est pas allégué qu'elle aurait été irrégulière, a été classée en seconde position lors de l'analyse des offres. Dans ces conditions, d'une part, il existe un lien direct entre l'irrégularité commise dans l'attribution du marché et les préjudices subis par la société appelante du fait de son éviction irrégulière de l'attribution du nouveau marché. D'autre part, la SELARL Huissiers Partner Conseils doit être regardée comme ayant eu des chances sérieuses d'emporter le marché. Par suite, et alors qu'elle a suffisamment motivé sa demande indemnitaire sur le fondement de son éviction irrégulière contrairement à ce qu'oppose le GIE "Groupement des Poursuites Extérieures", elle est fondée à demander l'indemnisation de son manque à gagner.

13. La société Juriexcel, anciennement dénommée Huissiers Partner Conseils soutient, sans être contredite, avoir réalisé en 2016 un chiffre d'affaires de 199 254 euros en raison des dossiers confiés par le directeur départemental des finances publiques du Cher pour le recouvrement amiable des créances prises en charge par les comptables de la direction générale des finances publiques dans le département, ce chiffre d'affaires correspondant à un taux de 12,55 % des sommes recouvrées par la société. La société affirme qu'elle a un taux de charge de 48,38 % et justifie donc d'un taux de bénéfice net de 51,62 %. Le manque à gagner annuel de la requérante au titre du contrat dont elle a été évincée peut ainsi être évalué à la somme de 102 854,91 euros par an, soit un manque à gagner total, pour une période d'exécution contractuelle de trois ans, de 308 564,73 euros. La société limitant à 207 526,39 euros le montant demandé à ce titre, compte tenu des sommes qu'elle a perçues postérieurement à la fin du contrat qu'elle avait conclu pour le même objet en novembre 2012, il y a lieu de condamner l'État à lui verser la somme globale de 207 526,39 euros.

Sur les frais du litige :

14. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros qui sera versée à la société Juriexcel au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens.

15. En revanche, les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative ne permettent pas d'en faire bénéficier la partie perdante ou tenue aux dépens. Les conclusions présentées sur ce fondement par le GIE GPE et par l'État ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1703019 du tribunal administratif d'Orléans du 18 octobre 2018 est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de la SELARL Huissiers Partner Conseils tendant à la condamnation de l'État à l'indemniser du préjudice découlant de sa qualité de concurrent évincé.

Article 2 : L'État est condamné à verser à la société Juriexcel la somme de 207 526,39 euros.

Article 3 : L'État versera à la société Juriexcel la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative par le GIE GPE et par l'État sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la Selarl Juriexcel, au ministre de l'économie, des finances, de la souveraineté industrielle et numérique et au GIE "Groupement des poursuites extérieures".

Copie en sera adressée, pour information, au directeur départemental des finances publiques du Cher.

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Salvi président,

- Mme Brisson, présidente-assesseure,

- Mme Lellouch, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 décembre 2022.

La rapporteure,

C. A

Le président,

D. SALVI

La greffière,

A. MARTIN

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances, de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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