TA Strasbourg, 01/02/2023, n°2004118

Vu les procédures suivantes :

I. Par une requête et des mémoires, enregistrés sous le n° 2004118 le 16 juillet 2020, le 28 avril 2022 et, pour le mémoire récapitulatif, le 13 mai 2022, la société Séché Eco Industries et la société Allianz IARD, représentées par la SELARL Schreckenberg Parnière et associés, demandent au tribunal, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) de condamner in solidum le syndicat mixte de collecte et de traitement des ordures ménagères (SMICTOM) d'Alsace centrale et la société Endel à verser la somme de 50 000,00 euros à la société Séché Eco Industries et la somme de 380 976,41 euros à la société Allianz au titre du marché public d'exploitation de l'usine de compostage des ordures ménagères de Scherwiller conclu entre la société Séché Eco Industries et le SMICTOM d'Alsace centrale

le 17 août 2012 ;

2°) à titre subsidiaire, de condamner le SMICTOM d'Alsace centrale et la société Endel à verser la somme de 430 976,61 euros à la société Séché Eco Industries, à charge pour elle de restituer à la société Allianz la somme de 380 976,61 euros perçue en application du contrat d'assurance ;

3°) en tout état de cause, de rejeter les demandes du SMICTOM d'Alsace centrale, de la société Endel et de la compagnie MMA ;

4°) de condamner la société Endel à garantir les sociétés Séché Eco Industries et Allianz de toutes condamnations qui seraient prononcées à leur encontre au profit du SMICTOM d'Alsace centrale ;

5°) de mettre à la charge in solidum du SMICTOM d'Alsace centrale et de la société Endel la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- la requête est recevable au regard des stipulations de l'article 37.2 du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de fournitures courantes et de services en ce que le différend est apparu le 14 février 2020 et qu'un mémoire en réclamation a été adressé à la collectivité le 19 mars 2020 ;

- elle est recevable en ce que l'avenant n° 5 au contrat conclu entre la société Séché Eco Industries et le SMICTOM d'Alsace centrale ne comporte aucune renonciation à recours pour l'incident du 27 juillet 2014 ;

- elle est recevable en tant que la société Allianz est subrogée dans les droits de la société Séché Eco Industries à hauteur des sommes versées à cette dernière en exécution du contrat d'assurance ;

- elle est recevable en tant que la société Séché Eco Industries a conservé un intérêt à agir, la franchise contractuelle de 50 000 euros étant restée à sa charge ;

- leur demande indemnitaire n'est pas prescrite dès lors que le dommage dont la réparation est demandée n'est pas constitué par la chute du bouclier d'entrée du bioréacteur-stabilisateur (BRS) mais par le refus opposé par le SMICTOM d'Alsace centrale le 14 février 2020 de prendre en charge les frais avancés pour le compte du SMICTOM suite à la chute du bouclier d'entrée ;

- à tout le moins, le dommage n'a été caractérisé qu'à compter du 23 octobre 2015, date de la signature de l'avenant n° 5 au contrat conclu entre la société Séché Eco Industries et le SMICTOM d'Alsace centrale ;

- la société Séché Eco Industries a engagé d'importants frais pour assurer la continuité du service public le temps que le BRS soit réparé, ces frais appelant une indemnisation de la part du SMICTOM ;

- les requérantes ont subi un préjudice de 430 976,61 euros correspondant aux solutions alternatives que la société Séché Eco Industries a dû mettre en œuvre pour assurer la continuité du service public jusqu'à la réparation du BRS ;

- la clause limitative de responsabilité de la société Endel présente dans le marché conclu entre cette dernière et le SMICTOM n'est pas opposable aux requérantes ;

- les conclusions reconventionnelles du SMICTOM d'Alsace centrale ne sont pas fondées dans leur principe ni dans leur montant ;

- la faute contractuelle de la société Endel envers le SMICTOM constitue une faute quasi-délictuelle à l'égard des requérantes et justifie l'appel en garantie de la société Endel ;

- l'appel en garantie de la compagnie MMA contre les requérantes n'est pas fondé.

Par des mémoires, enregistrés le 9 février 2021, le 22 avril 2022 et, pour le mémoire récapitulatif, le 16 mai 2022, le syndicat mixte de collecte et de traitement des ordures ménagères (SMICTOM) d'Alsace centrale, représenté par la SELARL Soler-Couteaux et associés, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à titre subsidiaire, à la condamnation in solidum de la société Endel et de la compagnie MMA à le garantir de l'intégralité des condamnations à intervenir ;

3°) à titre reconventionnel et indemnitaire, à la condamnation in solidum de la société Endel, de la société Séché Eco Industries et de la compagnie MMA à verser au SMICTOM la somme de 969 012,00 euros toutes taxes comprises ;

4)° en tout état de cause, à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge in solidum de la société Séché Eco Industries et de la société Allianz en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

5°) à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la société Endel en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

6°) à ce que les dépens de l'instance soient mis à la charge in solidum de la société Séché Eco Industries, de la société Allianz et de la société Endel.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable comme forclose, le mémoire en réclamation ayant été présenté plus de deux mois après la naissance du différend ;

- elle est irrecevable dès lors que le préjudice dont l'indemnisation est demandée a fait l'objet d'une transaction ;

- elle est irrecevable en tant qu'elle est présentée par Allianz, qui n'a pas la qualité pour agir faute d'être subrogée dans les droits de la société Séché Eco Industries ;

- la demande principale est prescrite ;

- les prétentions des requérantes ne sont pas fondées dans leur principe et dans leur montant ;

- la société Endel a mal exécuté les travaux et doit le garantir de l'ensemble de ses condamnations sur un fondement contractuel ;

- la compagnie MMA est tenue de le garantir des condamnations prononcées en vertu du contrat d'assurance garantissant les dommages aux biens ;

- l'appel en garantie de la société Endel à son encontre est irrecevable faute pour la société de préciser le fondement de son action ;

- il n'est pas fondé ;

- les prétentions présentées à titre reconventionnel contre la compagnie MMA ne sont pas prescrites et le contrat d'assurance est applicable ;

- les prétentions présentées à titre reconventionnel contre la société Endel sont fondées sur sa responsabilité décennale ou à défaut sur sa responsabilité contractuelle ;

- les prétentions présentées à titre reconventionnel contre la société Séché Eco Industries sont fondées sur sa responsabilité contractuelle ;

- le préjudice du SMICTOM est constitué des travaux de réparation provisoire du bouclier d'entrée du BRS et de la fissure du BRS, des coûts de détournement des ordures ménagères issus de l'avenant n° 5 au contrat entre le SMICTOM et la société Séché Eco Industries, des travaux de réparation définitive du bouclier d'entrée du BRS ;

- ce préjudice se monte à la somme totale de 969 012 euros toutes taxes comprises.

Par des mémoires, enregistrés le 28 juin 2021, le 25 janvier 2022, le 25 avril 2022 et, pour le mémoire récapitulatif, le 16 juin 2022, la société Endel, représentée par la SCP Preel Hecquet Payet-Godel, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) au rejet des demandes du SMICTOM d'Alsace centrale ;

3°) à titre subsidiaire, à la condamnation du SMICTOM d'Alsace centrale à la garantir de l'intégralité des sommes mises à sa charge ;

4°) à la condamnation de la société Séché Eco Industries et de la société Allianz à la garantir d'une partie des sommes mises à sa charge ;

5°) en tout état de cause, à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge des parties succombantes en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la juridiction administrative est incompétente pour connaître du litige ;

- la requête est irrecevable ;

- les demandes des requérantes sont prescrites ;

- les prétentions des requérantes ne sont pas fondées dans leur principe et dans leur montant ;

- le SMICTOM est responsable de l'incident et a à ce titre engagé sa responsabilité contractuelle vis-à-vis de la société Endel, et il doit ainsi la garantir d'une éventuelle condamnation ;

- la société Séché Eco Industries est en partie responsable de l'incident et doit garder à sa charge une partie des sommes qu'elle réclame ;

- les conclusions reconventionnelles du SMICTOM ne sont pas fondées dans leur principe et dans leur montant ;

- la société Séché Eco Industries a participé à la décision de remettre en route le BRS de sorte qu'elle et son assureur doivent garantir la société Endel de ses condamnations .

Par des mémoires, enregistrés le 27 avril 2022 et, pour le mémoire récapitulatif,

le 6 juin 2022, la compagnie MMA, représentée par la SELARL Centaure avocats, conclut :

1°) au rejet des demandes du SMICTOM d'Alsace centrale ;

2°) à titre subsidiaire, à la condamnation de la société Séché Eco Industries, de la société Allianz et de la société Endel à la garantir des condamnations qui seraient prononcées à son encontre ;

3°) en tout état de cause, à ce que la somme de 8 000 euros soit mise à la charge des parties succombantes en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'action du SMICTOM d'Alsace centrale à son encontre est prescrite ;

- les demandes du SMICTOM ne sont pas fondées dans leur principe et dans leur montant.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que le jugement était susceptible d'être fondé sur des moyens relevés d'office, tirés de ce que :

1. Dans l'hypothèse où les conclusions des sociétés Séché Eco Industries et Allianz d'une part, et celles du SMICTOM d'Alsace centrale, d'autre part, seraient rejetées, il n'y aurait pas lieu de statuer sur les appels en garantie formés par les parties.

2. Dans l'hypothèse où les conclusions principales des sociétés Séché Eco Industries et Allianz seraient déclarées irrecevables, seraient également irrecevables, par voie de conséquence, les conclusions reconventionnelles formées par le SMICTOM.

3. Dans l'hypothèse où les conclusions principales des sociétés Séché Eco Industries et Allianz seraient déclarées recevables, seraient irrecevables les conclusions reconventionnelles formées par le SMICTOM contre la société Endel et contre les MMA en tant qu'elles portent sur un litige distinct de celui soulevé par les conclusions principales (conclusions reconventionnelles dirigées contre des parties autres que le requérant, tendant à la réparation de dommages distincts en exécution de contrats distincts).

4. Les conclusions présentées contre la société Endel, qui n'est pas partie au contrat conclu entre le SMICTOM d'Alsace centrale et la société Séché Eco Industries, sont irrecevables.

L'instruction a été close le 16 juin 2022, par une ordonnance du même jour, en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative.

Le 1er juillet 2022, la société Endel a été invitée à produire des pièces en vue de compléter l'instruction, en application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative.

Une réponse a été enregistrée le 5 juillet 2022 et communiquée le 17 août 2022.

II. Par une requête et des mémoires, enregistrés sous le n° 2006535 le 21 octobre 2020, le 28 avril 2022, non-communiqué, et, pour le mémoire récapitulatif, le 13 mai 2022, la société Séché Eco Industries et la société Allianz IARD, représentées par la SELARL Schreckenberg Parnière et associés, demandent au tribunal, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) de condamner in solidum le SMICTOM d'Alsace centrale et la société Endel à verser la somme de 50 000,00 euros à la société Séché Eco Industries et la somme de 380 976,41 euros à la société Allianz au titre du marché public d'exploitation de l'usine de compostage des ordures ménagères de Scherwiller conclu entre la société Séché Eco Industries et le SMICTOM d'Alsace centrale le 17 août 2012 ;

2°) à titre subsidiaire, de condamner le SMICTOM d'Alsace centrale et la société Endel à verser la somme de 430 976,61 euros à la société Séché Eco Industries, à charge pour elle de restituer à la société Allianz la somme de 380 976,61 euros perçue en application du contrat d'assurance ;

3°) en tout état de cause, de rejeter les demandes du SMICTOM d'Alsace centrale, de la société Endel et de la compagnie MMA ;

4°) de condamner la société Endel à garantir les sociétés Séché Eco Industries et Allianz de toutes condamnations qui seraient prononcées à leur encontre au profit du SMICTOM d'Alsace centrale ;

5°) de mettre à la charge in solidum du SMICTOM d'Alsace centrale et de la société Endel la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- la requête est recevable au regard des stipulations de l'article 37.2 du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de fournitures courantes et de services en ce que le différend est apparu le 14 février 2020 et qu'un mémoire en réclamation a été adressé à la collectivité le 19 mars 2020 ;

- elle est recevable en ce que l'avenant n° 5 au contrat conclu entre la société Séché Eco Industries et le SMICTOM d'Alsace centrale ne comporte aucune renonciation à recours pour l'incident du 27 juillet 2014 ;

- elle est recevable en tant que la société Allianz est subrogée dans les droits de la société Séché Eco Industries à hauteur des sommes versées à cette dernière en exécution du contrat d'assurance ;

- elle est recevable en tant que la société Séché Eco Industries a conservé un intérêt à agir, la franchise contractuelle de 50 000 euros étant restée à sa charge ;

- leur demande indemnitaire n'est pas prescrite dès lors que le dommage dont la réparation est demandée n'est pas constitué par la chute du bouclier d'entrée du BRS mais par le refus opposé par le SMICTOM d'Alsace centrale

le 14 février 2020 de prendre en charge les frais avancés pour le compte du SMICTOM suite à la chute du bouclier d'entrée ;

- à tout le moins, le dommage n'a été caractérisé qu'à compter du 23 octobre 2015, date de la signature de l'avenant n° 5 au contrat conclu entre la société Séché Eco Industries et le SMICTOM d'Alsace centrale ;

- la société Séché Eco Industries a engagé d'importants frais pour assurer la continuité du service public le temps que le BRS soit réparé, ces frais appelant une indemnisation de la part du SMICTOM ;

- les requérantes ont subi un préjudice de 430 976,61 euros correspondant aux solutions alternatives que la société Séché Eco Industries a dû mettre en œuvre pour assurer la continuité du service public jusqu'à la réparation du BRS ;

- la clause limitative de responsabilité de la société Endel présente dans le marché conclu entre cette dernière et le SMICTOM n'est pas opposable aux requérantes ;

- les conclusions reconventionnelles du SMICTOM d'Alsace centrale ne sont pas fondées dans leur principe ni dans leur montant ;

- la faute contractuelle de la société Endel envers le SMICTOM constitue une faute quasi-délictuelle à l'égard des requérantes et justifie l'appel en garantie de la société Endel ;

- l'appel en garantie de la compagnie MMA contre les requérantes n'est pas fondé.

Par des mémoires, enregistrés le 9 février 2021, le 22 avril 2022 et, pour le mémoire récapitulatif, le 16 mai 2022, le syndicat mixte de collecte et de traitement des ordures ménagères (SMICTOM) d'Alsace centrale, représenté par la SELARL Soler-Couteaux et associés, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à titre subsidiaire, à la condamnation in solidum de la société Endel et de la compagnie MMA à le garantir de l'intégralité des condamnations à intervenir ;

3°) à titre reconventionnel et indemnitaire, à la condamnation in solidum de la société Endel, de la société Séché Eco Industries et de la compagnie MMA à verser au SMICTOM la somme de 969 012,00 euros toutes taxes comprises ;

4)° en tout état de cause, à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge in solidum de la société Séché Eco Industries et de la société Allianz en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

5°) à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la société Endel en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

6°) à ce que les dépens de l'instance soient mis à la charge in solidum de la société Séché Eco Industries, de la société Allianz et de la société Endel.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable en tant qu'elle est présentée par Allianz, qui n'a pas la qualité pour agir faute d'être subrogée dans les droits de la société Séché Eco Industries ;

- elle est irrecevable comme forclose, le mémoire en réclamation ayant été présenté plus de deux mois après la naissance du différend ;

- elle est irrecevable dès lors que le préjudice dont l'indemnisation est demandée a fait l'objet d'une transaction ;

- la demande principale est prescrite ;

- les prétentions des requérantes ne sont pas fondées dans leur principe et dans leur montant ;

- la société Endel a mal exécuté les travaux et doit le garantir de l'ensemble de ses condamnations sur un fondement contractuel ;

- la compagnie MMA est tenue de la garantir des condamnations prononcées en vertu du contrat d'assurance garantissant les dommages aux biens ;

- l'appel en garantie de la société Endel à son encontre est irrecevable faute pour la société de préciser le fondement de son action ;

- il n'est pas fondé ;

- les prétentions présentées à titre reconventionnel contre la compagnie MMA ne sont pas prescrites et le contrat d'assurance est applicable ;

- les prétentions présentées à titre reconventionnel contre la société Endel sont fondées sur sa responsabilité décennale ou à défaut sur sa responsabilité contractuelle ;

- les prétentions présentées à titre reconventionnel contre la société Séché Eco Industries sont fondées sur sa responsabilité contractuelle ;

- le préjudice du SMICTOM est constitué des travaux de réparation provisoire du bouclier d'entrée du BRS et de la fissure du BRS, des coûts de détournement des ordures ménagères issus de l'avenant n° 5 au contrat entre le SMICTOM et la société Séché Eco Industries, des travaux de réparation définitive du bouclier d'entrée du BRS ;

- ce préjudice se monte à la somme totale de 969 012 euros toutes taxes comprises.

Par des mémoires, enregistrés le 23 mars 2022, le 20 avril 2022, le 25 avril 2022 et, pour le mémoire récapitulatif, le 16 juin 2022, la société Endel, représentée par la SCP Preel Hecquet Payet-Godel, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) au rejet des demandes du SMICTOM d'Alsace centrale ;

3°) à titre subsidiaire, à la condamnation du SMICTOM d'Alsace centrale à la garantir de l'intégralité des sommes mises à sa charge ;

4°) à la condamnation de la société Séché Eco Industries et de la société Allianz à la garantir d'une partie des sommes mises à sa charge ;

5°) en tout état de cause, à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge des parties succombantes en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la juridiction administrative est incompétente pour connaître du litige ;

- la requête est irrecevable ;

- les demandes des requérantes sont prescrites ;

- les prétentions des requérantes ne sont pas fondées dans leur principe et dans leur montant ;

- le SMICTOM est responsable de l'incident et a à ce titre engagé sa responsabilité contractuelle vis-à-vis de la société Endel, et il doit ainsi la garantir d'une éventuelle condamnation ;

- la société Séché Eco Industries est en partie responsable de l'incident et doit garder à sa charge une partie des sommes qu'elle réclame ;

- les conclusions reconventionnelles du SMICTOM ne sont pas fondées dans leur principe et dans leur montant ;

- la société Séché Eco Industries a participé à la décision de remettre en route le BRS de sorte qu'elle et son assureur doivent garantir la société Endel de ses condamnations .

Par des mémoires, enregistrés le 27 avril 2022 et, pour le mémoire récapitulatif,

le 6 juin 2022, la compagnie MMA, représentée par la SELARL Centaure avocats, conclut :

1°) au rejet des demandes du SMICTOM d'Alsace centrale ;

2°) à titre subsidiaire, à la condamnation de la société Séché Eco Industries, de la société Allianz et de la société Endel à la garantir des condamnations qui seraient prononcées à son encontre ;

3°) en tout état de cause, à ce que la somme de 8 000 euros soit mise à la charge des parties succombantes en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'action du SMICTOM d'Alsace centrale à son encontre est prescrite ;

- les demandes du SMICTOM ne sont pas fondées dans leur principe et dans leur montant.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que le jugement était susceptible d'être fondé sur des moyens relevés d'office, tirés de ce que :

1. Dans l'hypothèse où les conclusions des sociétés Séché Eco Industries et Allianz d'une part, et celles du SMICTOM d'Alsace centrale d'autre part, seraient rejetées, il n'y aurait pas lieu de statuer sur les appels en garantie formés par les parties.

2. Dans l'hypothèse où les conclusions principales des sociétés Séché Eco Industries et Allianz seraient déclarées irrecevables, seraient également irrecevables, par voie de conséquence, les conclusions reconventionnelles formées par le SMICTOM.

3. Dans l'hypothèse où les conclusions principales des sociétés Séché Eco Industries et Allianz seraient déclarées recevables, seraient irrecevables les conclusions reconventionnelles formées par le SMICTOM contre la société Endel et contre les MMA en tant qu'elles portent sur un litige distinct de celui soulevé par les conclusions principales (conclusions reconventionnelles dirigées contre des parties autres que le requérant, tendant à la réparation de dommages distincts en exécution de contrats distincts).

4. Les conclusions présentées contre la société Endel, qui n'est pas partie au contrat conclu entre le SMICTOM d'Alsace centrale et la société Séché Eco Industries, sont irrecevables.

L'instruction a été close le 16 juin 2022, par une ordonnance du même jour, en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative.

Le 1er juillet 2022, la société Endel a été invitée à produire des pièces en vue de compléter l'instruction, en application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative.

Une réponse a été enregistrée le 5 juillet 2022 et communiquée le 17 août 2022.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- l'ordonnance du 6 novembre 2019, par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a taxé les frais de l'expertise réalisée par M. B ;

- l'arrêt du 22 juin 2022, par lequel la cour d'appel de Colmar a déclaré irrecevables comme prescrites les demandes formées par la société Séché Eco Industries et par la société Allianz.

Vu :

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- l'arrêté du 19 janvier 2009 approuvant le cahier des clauses administratives générales des marchés publics de fournitures courantes et de services ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A,

- les conclusions de M. Boutot, rapporteur public,

- et les observations de :

' Me Kappler, représentant la société Séché Eco Industries et la société Allianz,

' Me Schultz, représentant le SMICTOM d'Alsace centrale,

' Me Bruillard, représentant la société Endel,

' Me Rannou, représentant la compagnie MMA.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes susvisées n° 2004118 et n° 2006535, présentées pour les mêmes requérants, sur le même fondement et contre les mêmes parties, présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement.

2. La société Séché Eco Industries (SEI) est titulaire d'un marché d'exploitation de l'usine de compostage de Scherwiller conclu avec le syndicat mixte de collecte et de traitement des ordures ménagères (SMICTOM) d'Alsace centrale le 17 août 2012, auquel s'applique le cahier des clauses administratives générales des marchés publics de fournitures courantes et de services (CCAG FCS) approuvé par arrêté du 19 janvier 2009. La société Endel a effectué des travaux sur le bioréacteur-stabilisateur (BRS) de l'usine de compostage et notamment son bouclier d'entrée, pour le compte du SMICTOM d'Alsace centrale qui les a réceptionnés sans réserve le 17 juillet 2014. Le 27 juillet 2014, un incident est survenu, consistant dans la chute du bouclier d'entrée du BRS. La société SEI n'a pu utiliser à nouveau le BRS, après réparation, qu'à compter du 29 septembre 2014 et a dû, dans l'intervalle, mettre en place des solutions alternatives pour le traitement des déchets. Par ordonnance du 18 février 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg, saisi par le SMICTOM d'Alsace centrale, a ordonné une expertise. Le rapport d'expertise a été remis le 15 février 2019.

3. Par courriers réceptionnés le 20 décembre 2019, les requérantes ont demandé au SMICTOM d'Alsace centrale et à la société Endel de les indemniser du préjudice subi du fait du surcoût induit par la mise en place de solutions alternatives pour le traitement des déchets le temps que le bouclier d'entrée du BRS soit réparé. La société Endel a opposé un refus à cette demande par courrier du 17 janvier 2020, et le SMICTOM d'Alsace centrale par courrier

du 14 février 2020. Les requérantes ont enfin adressé un mémoire de réclamation au SMICTOM d'Alsace centrale, réceptionné le 19 mars 2020, auquel aucune suite n'a été donnée.

4. Par les présentes requêtes, qui font suite au mémoire de réclamation

du 19 mars 2020 et qui doivent être regardées comme dirigées contre la même décision implicite de rejet de la réclamation et comme portant sur les mêmes demandes d'indemnisation, la société SEI et son assureur la société Allianz demandent à être indemnisées par le SMICTOM d'Alsace centrale et par la société Endel, sur un fondement contractuel, pour le surcoût du traitement des déchets entre le 27 juillet 2014 et le 29 septembre 2014. Elles évaluent leur préjudice à un montant de 430 976,61 euros, dont 380 976,61 euros ont été versés par la société Allianz à la société SEI.

Sur la compétence de la juridiction administrative :

5. La société Endel conteste la compétence de la juridiction administrative pour connaître des demandes dirigées à son encontre par les requérantes. Les demandes des requérantes sont fondées sur le contrat conclu entre la société SEI et le SMICTOM, lequel a pour objet l'exécution même du service public et constitue, dès lors, un contrat administratif.

Par suite, le litige relatif à l'exécution de ce contrat relève de la compétence de la juridiction administrative.

Sur les conclusions indemnitaires présentées par la société SEI et par la société Allianz :

En ce qui concerne la recevabilité :

6. Les conclusions indemnitaires de la société Allianz et de la société SEI sont fondées sur le marché public conclu entre cette dernière et le SMICTOM d'Alsace centrale. La société Endel n'étant pas partie à ce contrat, les conclusions indemnitaires présentées par les requérantes sur ce fondement ne sont pas recevables en tant qu'elles sont dirigées à son encontre.

En ce qui concerne les conclusions dirigées contre le SMICTOM d'Alsace centrale :

7. Aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis./Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public. " En matière contractuelle, l'année d'acquisition des droits est, en l'absence de décompte général et définitif, celle au cours de laquelle les prestations ont été effectuées et leur montant a pu être évalué.

8. Au cas présent, les requérantes demandent l'indemnisation de prestations effectuées entre le 27 juillet 2014 et le 29 septembre 2014, consistant dans la mise en place de solutions alternatives pour le traitement des déchets pendant la période d'immobilisation du BRS. A la date du 29 septembre 2014, la société SEI a eu connaissance de manière suffisamment précise du montant des prestations effectuées, c'est-à-dire de la durée pendant laquelle elle a dû mettre en place des solutions alternatives et du coût de ces dernières, et elle a d'ailleurs été immédiatement en mesure d'obtenir une indemnisation auprès de sa compagnie d'assurance. Dès lors, les droits dont les requérantes se prévalent ont été acquis au cours de l'année 2014 et non, comme elles le soutiennent, au moment où le SMICTOM d'Alsace centrale leur a fait part de son refus de les indemniser. Le délai de quatre ans prévu par les dispositions précitées a ainsi commencé à courir le 1er janvier 2015.

9. La société SEI et la société Allianz ne se prévalant, dans le cadre des présentes requêtes, d'aucune cause d'interruption ou de suspension de la prescription quadriennale, le délai de cette prescription a expiré le 31 décembre 2018. Les requérantes n'ayant présenté de demande tendant à l'indemnisation des prestations effectuées en 2014 que le 20 décembre 2019, le SMICTOM d'Alsace centrale est fondé à soutenir que l'action indemnitaire des requérantes à son encontre est prescrite.

10. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres fins de

non-recevoir qui leur sont opposées, que les conclusions à fin d'indemnisation présentées par la société SEI et par la société Allianz doivent être rejetées.

Sur les conclusions reconventionnelles et indemnitaires présentées par le SMICTOM d'Alsace centrale :

11. En premier lieu, les conclusions indemnitaires du SMICTOM d'Alsace centrale, en ce qu'elles sont dirigées contre la société Endel et contre la compagnie MMA, se rattachent à l'exécution de contrats distincts de celui invoqué dans le cadre de la demande principale. Elles ont pour objet l'indemnisation de dommages autres que ceux invoqués par les requérantes dans la demande principale. Enfin elles sont dirigées contre des parties autres que les requérantes.

Par conséquent, les conclusions indemnitaires du SMICTOM contre la société Endel et contre la compagnie MMA sont irrecevables comme soulevant un litige distinct du litige principal.

12. En second lieu, en ce qui concerne les conclusions reconventionnelles dirigées contres la société SEI sur le fondement de la responsabilité contractuelle, il ne résulte pas de l'instruction que le forçage du bouclier d'entrée du BRS, à l'origine du sinistre, serait imputable à une faute de la société SEI. Par ailleurs, eu égard au très bref délai écoulé entre la réception des travaux et la survenance de l'incident, de dix jours, le SMICTOM d'Alsace centrale n'est pas fondé à soutenir que la société SEI aurait méconnu ses obligations de maintenance et d'entretien de l'ouvrage en ne prévenant pas la survenance du sinistre. Par conséquent, le SMICTOM d'Alsace centrale n'est pas fondé à rechercher la responsabilité contractuelle de la société SEI.

13. Il résulte de ce qui précède que les conclusions reconventionnelles et indemnitaires du SMICTOM d'Alsace centrale doivent être rejetées.

Sur les dépens de l'instance :

14. Par ordonnance du 6 novembre 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a taxé et liquidé les frais et honoraires d'expertise à la somme de 11 096,40 euros toutes taxes comprises, et les a mis à la charge du SMICTOM d'Alsace centrale. En application des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu de laisser ces frais et honoraires à la charge du SMICTOM, qui ne peut qu'être regardé, eu égard à ses propres conclusions reconventionnelles et indemnitaires, comme étant la partie perdante vis-à-vis des autres parties, puisque ses demandes indemnitaires sont intégralement rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge du SMICTOM d'Alsace centrale et de la société Endel, qui ne sont pas dans la présente instance, eu égard à la demande principale, les parties perdantes, les sommes demandées par la société SEI et par la société Allianz au titre des frais non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par le SMICTOM d'Alsace centrale et par la société Endel sur le même fondement. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du SMICTOM la somme de 1 200 euros à verser à la compagnie MMA sur ce fondement.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Séché Eco Industries et de la société Allianz est rejetée.

Article 2 : Le SMICTOM d'Alsace centrale versera à la compagnie MMA une somme

de 1 200 (mille-deux-cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à la société Séché Eco Industries, à la société Allianz IARD, au syndicat mixte de collecte et de traitement des ordures ménagères d'Alsace centrale, à la société Endel et à la compagnie MMA.

Délibéré après l'audience du 11 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

M. Rees, président,

Mme Merri, première conseillère,

Mme Dobry, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er février 2023.

La rapporteure,

S. A

Le président,

P. REES La greffière,

M.-C. SCHMIDT

La République mande et ordonne à la préfète du Bas-Rhin en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

Nos 2004118,

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