L’ordre de service dans toutes ses dimensions

Ordre de service

L'ordre de service dans les marchés de travaux

Article 3.8 du CCAG-Travaux

3.8.1. Les ordres de service sont écrits. Ils sont datés, numérotés et notifiés par le maître d'œuvre ou le maître d'ouvrage. Le titulaire en accuse réception datée.
Les ordres de service émis par le maître d'œuvre entraînant une modification des conditions d'exécution du marché, notamment en termes de délai d'exécution, de durée et de montants, font l'objet d'une validation préalable par le maître d'ouvrage.

3.8.2. Lorsque le titulaire estime que les prescriptions d'un ordre de service appellent des observations de sa part, il doit les notifier au maître d'œuvre et au maître d'ouvrage, dans un délai de quinze jours, à compter de la réception de l'ordre de service, sous peine de forclusion.
Si les observations, dûment motivées, notifiées par le titulaire visent à informer le maître d'ouvrage et le maître d'œuvre qu'un ordre de service présente un risque en termes de sécurité, de santé ou qu'il contrevient à une disposition législative ou réglementaire à laquelle le titulaire est soumis dans l'exécution des prestations objet du marché, le délai d'exécution de l'ordre de service est suspendu jusqu'à la notification de la réponse du maître d'ouvrage. En l'absence de réponse de ce dernier dans un délai de quinze jours, le titulaire n'est pas tenu d'exécuter l'ordre de service.
Les observations sont notifiées :

- au maître d'ouvrage, copie faite au maître d'œuvre, si l'ordre de service est émis par le maître d'ouvrage ;
- au maître d'œuvre, copie faite au maître d'ouvrage, si l'ordre de service est émis par le maître d'œuvre.

3.8.3. Sous réserve des articles 3.8.2, 13.6, 14.2.2 et 50.2.1, le titulaire se conforme aux ordres de service qui lui sont notifiés, que ceux-ci aient ou non fait l'objet d'observations de sa part.

3.8.4. Les ordres de service relatifs à des prestations sous-traitées sont adressés au titulaire, qui a seul qualité pour formuler des observations.

3.8.5. En cas de groupement d'opérateurs économiques, les ordres de service sont adressés au mandataire du groupement, qui a seul qualité pour formuler des observations.

3.8.6. Les ordres de service prescrivant des prestations supplémentaires ou modificatives qui ont une incidence financière sur le marché donnent lieu à une juste rémunération dans les conditions de l'article 13.

Article R. 2431-16 du Code de la commande publique

La direction de l'exécution des marchés publics de travaux a pour objet :
1° De s'assurer que les documents d'exécution ainsi que les ouvrages en cours de réalisation respectent les dispositions des études effectuées ;
2° De s'assurer que les documents qui doivent être produits par les opérateurs économiques chargés des travaux, ainsi que l'exécution des travaux sont conformes aux clauses de leur marché public ;
3° De délivrer tous ordres de service, d'établir tous procès-verbaux nécessaires à l'exécution du marché public de travaux, de procéder aux constats contradictoires et d'organiser et de diriger les réunions de chantier ;
4° De vérifier les projets de décomptes mensuels ou les demandes d'avances présentés par les opérateurs économiques chargés des travaux, d'établir les états d'acomptes, de vérifier le projet de décompte final et d'établir le décompte général ;
5° D'assister le maître d'ouvrage en cas de différend sur le règlement ou l'exécution des travaux.

Un ordre de service, appelé OS dans la pratique, est un acte unilatéral d'exécution d'un marché pris par le maître d'ouvrage, le maître d'œuvre ou par toute autre personne habilitée par le maître d'ouvrage, pour préciser les modalités d'exécution du marché.

Les conditions de forme et de fond de l'ordre de service sont prévues notamment par l'article 3.8.1 du CCAG-Travaux.

L'ordre de service est associé au pouvoir de direction et d'exécution du marché et au pouvoir de direction et d'exécution du chantier. Le premier pouvoir appartient au maître d'ouvrage et le second au maître d'œuvre (s'il y en a un). C'est en cela que l'ordre de service peut être pris par le maître d'ouvrage ou le maître d'œuvre.

Il appartient donc au maître d'ouvrage de prévoir dans les documents du marché les personnes compétentes pour émettre un OS. Une personne non désignée par le marché ne peut émettre un OS valable (CAA Paris, 13 février 2007, n° 04PA01640). À l'inverse, tout ordre de service émis par une personne habilitée par le marché est régulier et engage le maître d'ouvrage (CE. 25 juin 1975, n° 84979 - 93218, publiée au Recueil).

Si le maître d'oeuvre peut prendre des OS, l'article 3.8.1 du CCAG-Travaux conditionne la validité des OS modifiant les conditions d'exécution du marché, pris par le maître d'œuvre, à la validation du maître d'ouvrage. Il s'agit des OS suivants :

  • OS de prolongation du délai (ou durée) d'exécution
  • OS de réduction du délai (ou durée) d'exécution
  • OS de modification du montant du marché

Toutefois, cette liste n'est pas exhaustive. Il incombe en conséquence au maître d'ouvrage de prévoir dans son cahier des clauses administratives particulières - CCAP - les domaines de compétence du maître d'œuvre pour émettre des OS.

En ce qui concerne spécifiquement le maître d'ouvrage, il peut toujours émettre des OS indépendamment des stipulations contractuelles, parce qu'il ne peut contractuellement renoncer à son pouvoir de direction du marché : CE, 2 février 1983, 34027, publié au recueil Lebon, CAA de Nantes, 31/10/2013, n°12NT01444.

En conclusion, la personne qui peut émet un OS est celle que les stipulations du marché donnent compétence pour le faire - sauf pour le maître d'ouvrage qui peut toujours émettre un OS. Celui-ci doit répartir cette compétence selon les exigences du besoin. En tant que personne de l'art, il est important pour le maître d'ouvrage d'impliquer le maître d'oeuvre dans l'émission de tous les OS et en particulier pour traiter les réserves émises par les participants à l'opération de construction. Et pour garder un contrôle sur l'évolution du chantier et la nécessité d'archiver tous les documents du marché, le maître d'ouvrage peut prévoir dans les documents du marché de maîtrise d'oeuvre (lorsqu'il est externalisé) que celui-ci transmettra des originaux des OS à intervalle de temps prédéfini ou à la fin du marché.

En référence à l'article 3.8.1 du CCAG-Travaux, un OS doit remplir les conditions suivantes :

  • Écriture
  • Datation
  • Numérotation
  • Notification

On peut ajouter une condition indispensable :

  • Compétence : un OS doit être pris par une personne compétente.

Toutefois, il peut s’agir de simples plans transmis (CE. SSR. 26 juillet 2006, Commune de Châteauponsac, n° 269052) ou validés par le maître d’œuvre ou l’architecte (CE. SSR. 25 juin 1975, Ville de Joigny, n° 84979 - 93218, publiée au Recueil).

En revanche, s’il n’y a pas d’écrit, il ne peut s’agir d’un ordre de service (voir, par exemple : CE, 8 mars 1895, Thouvenot, Rec. p. 234 ; CE, 9 juin 1981, n° 03822, mentionnée aux tables ; CE. SSR. 19 mars 1982, n° 18632, mentionnée aux tables).

D'où la nécessité de se poser la question de la validité d'un OS verbal (traité dans une autre partie ci-dessous).

La jurisprudence n'exige pas réellement un formaliste particulier pour la rédaction d'un OS. Quant aux CCAG, ils en prévoient trois conditions :

  • L'OS est écrit
  • L'OS est daté
  • L'OS est numéroté.

En pratique, un OS mentionne notamment les informations suivantes :

  1. Identité des parties
  2. Référence du marché
  3. Numérotation de l'OS
  4. Objet explicite
  5. Date d'exécution des ordres donnés
  6. Date d'émission de l'OS
  7. Rappel du droit du titulaire de faire des réserves dans un délai de 15 jours à compter de la réception de l'OS sous peine de forclusion,
  8. Signature (facultative)

Toutefois, tout OS ne comporte pas forcément ces précédentes informations. Parce qu'il y a OS, par exemple, dès lors que le titulaire peut prouver qu'il a reçu un ordre de la part du maître d'ouvrage ou du maître d'œuvre.

Ainsi, le juge administratif a donné des exemples d'OS qui s'écartent relativement des conditions ci-dessus. Il peut s'agir de :

Cependant, n'est pas un OS :

Au-delà des exigences rédactionnelles contractuelles, l’acheteur doit aussi penser à la lisibilité des OS. Parce qu’ils constituent des actes d’exécution du marché susceptibles de contrôles, par le comptable afin de payer les prestataires, mais également notamment par le contrôleur financier (chambre régionale des comptes ou cour des comptes).

En effet, il doit garder une cohérence dans la numérotation des OS et dans la mesure du possible garder un même formulaire d’OS par catégorie de marché. Ces points sont pratiquement importants en ce sens qu’ils peuvent illustrer la maturité de la fonction achat de l’acheteur.

La signature ne fait plus partie des conditions de validité d'un OS contrairement aux stipulations des versions antérieures des CCAG. Deux raisons pourraient expliquer cela.

Premièrement, l'avènement de la notification électronique (de plus en plus utilisée, et recommandée, dans les échanges entre les maîtres d'ouvrages et les titulaires des marchés). En effet, si le maître d'ouvrage notifie un OS notamment par le biais de son profil d'acheteur, on peut en déduire qu'il l'a signé dès lors que celui-ci est la seule personne qui gère sa plateforme.

En conséquence, la notification électronique de l'OS peut englober sa signature.

Secondement, l'un des objectifs de la réforme des CCAG en 2021 est la simplification des procédures de passation et d'exécution des marchés. À partir du moment où la notification dématérialisée identifie clairement le maître d'ouvrage comme émetteur de l'OS, imposer sa signature peut sembler être une formalité supplémentaire non nécessaire. On retrouve comparativement le même système sur Télérecours.

Toutefois, le maître d'ouvrage garde la liberté d'y déroger dans son CCAP notamment pour prévoir la signature de tous les OS. Alors se pose la question de l'opportunité de cette dérogation. On peut évoquer trois cas où la signature des OS pourrait être recommandée.

Le premier cas concerne les OS notifiés par un maître d'ouvre - en tant que prestataire externe. Dès lors que le CCAG-Travaux (article 3.8.1) exige, sauf dérogation, la validation des OS entraînant une modification des conditions d'exécution du marché par le maître d'ouvrage, celui-ci peut matérialiser cette validation par sa signature. Cela pourrait aviser le ou les titulaires, destinataires des OS précités, que le maître d'ouvrage consent aux demandes manifestées par le maître d'ouvre dans ces OS et évite ainsi à toutes les parties une perte de temps en faisant des demandes de précisions, des craintes ou des contentieux.

Le deuxième cas concerne les notifications non dématérialisées. En ce cas, la signature des OS est fortement recommandée lorsque la notification est faite par voie postale. En effet, rien ne peut garantir au destinataire d'un OS, non signé, que le maître d'ouvrage est l'émetteur de l’OS reçu. Toutefois, si la notification est faite en main propre, lors de la première réunion de chantier par exemple, on peut en conclure que, au même moment, les parties ont valablement donné leur consentement. Mais la signature des OS est recommandée ici également pour au moins deux raisons. Faciliter le paiement des factures au niveau de la comptabilité et faciliter les contrôles notamment de la Chambre régionale des comptes ou de la Cour des comptes. Car, la signature peut en même temps certifier la volonté des parties, mais également l'authenticité de l'OS.

Le dernier cas porte sur les notifications électroniques qui ne présentent pas toutes les garanties techniques requises. L'exemple le plus illustratif est la notification d'un OS par message électronique - mail. Le maître d'ouvrage gagnerait en sécurité juridique s'il ne réserve la transmission d'un OS non signé à un titulaire que par voie de notification dématérialisée permettant de déterminer de façon certaine la date et l'heure de sa réception

Le maître d'ouvrage doit donc accorder une grande importance à la phase de notification lorsqu'il envisage d'utiliser des OS non signés.

"La notification est l'action consistant à porter une information ou une décision à la connaissance de la ou des parties contractantes par tout moyen matériel ou dématérialisé, par le biais d'un profil d'acheteur ou par tout autre moyen de communication électronique permettant de déterminer de façon certaine la date et, le cas échéant, l'heure de sa réception" : article 3 CCAG-Travaux.

Le contrat doit donc prévoir les règles applicables à la notification des OS.

Le maître d'ouvrage a le choix entre la notification dématérialisée d'un OS et celle faite par tout moyen matériel permettant de déterminer de façon certaine la date et, le cas échéant, l'heure de sa réception. Si la notification au format papier d'un OS est (idéalement) assortie de signature, celle effectuée par le biais du profil d'acheteur ne requiert pas de signature.

Deux précisions sont importantes sur ce point.

D'une part, le maître d'ouvrage doit s'assurer que son profil d'acheteur remplit les conditions exigées par la notification électronique et en particulier celles prévues par l'arrêté du 22 mars 2019 relatif aux fonctionnalités et exigences minimales des profils d'acheteurs. Il doit être capable de générer un accusé de réception électronique mentionnant notamment l'identité du destinataire, la date et l'heure de réception. Si c'est conditions sont remplies (et normalement, c'est le cas pour tous les profils d'acheteurs), l'acheteur peut décider de notifier un OS non signé.

Ainsi, une notification par message électronique - mail - peut être considérée (au sens littéral) comme une notification dématérialisée ou électronique. Toutefois, à l'évidence, elle ne remplit pas les conditions d'une notification dématérialisée au sens de l'arrêté précité et de l'article 3.1 du CCAG-Travaux .

La notification dématérialisée par le biais du profil d'acheteur a, en plus, un intérêt formel. Il permet au maître d'ouvrage d'obtenir un accusé de réception électronique tacite à défaut de consultation, par le destinataire, dans un délai de huit jours à compter de la date de mise à disposition du document sur le profil d'acheteur (article 3.1.2). Cependant, l'acheteur pourrait assortir cette notification d'une information téléphonique pour se prémunir d'un problème technique en particulier lors de la première notification.

Enfin, la notification par le biais du profil d'acheteur présente un autre intérêt pratique. Elle pourrait faciliter la transmission des ordres de service notamment aux comptables, dont les échanges sont de plus en plus dématérialisés (en évitant aux agents de scanner chaque accusé de réception des OS et de l'associé au bon OS ou de ne plus retrouver l'accusé de réception en format papier), et surtout garder une bonne lisibilité des ordres de service électroniques en comparaison aux ordres de service notifiés par voie postale puis scannés.

En conséquence, le maître d'ouvrage peut analyser l'opportunité de notifier tous les OS sur son profil d'acheteur pour gagner en rapidité, en traçabilité, contrôle et également centraliser tous les OS. Ce procédé garde une importante particulière pour les marchés formalisés.

L'ordre de service verbal, à l'opposé de l'ordre de service écrit, est un ordre de service qui a été prescrit uniquement de vive voix.

Si on se réfère aux conditions prévues par le CCAG-Travaux, l’OS est un acte écrit. Ainsi, un OS verbal n’est en principe pas admis. Toutefois, en pratique, les parties peuvent valablement faire naître un OS verbal. 

La validité d’un ordre de service verbal pose un problème de preuve. Il révient donc à la personne qui s’en prévaut de justifier son existence. Et si l’autre partie au marché nie l’existence de l’ordre de service verbal, la possibilité d’établir un tel OS est très difficile. 

Le juge admet qu’une commande verbale non justifiée par le titulaire d’un marché public n’est pas un ordre de service : CE, 5 novembre 1980, n°15345. Le titulaire qui exécute des travaux supplémentaires en application d’un ordre de service verbal peut obtenir l’indemnisation de ceux qui ont été utiles au maître d’ouvrage : CAA de Paris, 03/07/2007, n°04PA02056

En revanche, l’ordre de service verbal, même si le titulaire arrive à l’établir, comporte des inconvénients. Le juge considère que l’acceptation d’un OS verbal pour exécuter des travaux supplémentaires comme une négligence de nature à diminuer le montant de ses indemnités : CAA de Paris, 06 mars 2007, n°04PA02356

De surcroît, l’exécution de travaux supplémentaires fondée sur un ordre de service verbal prive le titulaire de la possibilité d’obtenir une indemnité intégrant le bénéfice : CAA de Paris, 03/07/2007, n°04PA02056

Les cas dans lesquels le maître d'ouvrage peut émettre un ordre de service ne sont pas en principe limité. Il peut prévoir dans les documents du marché les champs d'intervention des ordres de service. Cette étape peut être clarifiée au stade de la préparation du marché en tenant compte des exigences du besoin.

Le maître d'ouvrage ne bénéficie pas toutefois d'une liberté absolue. Il ne peut par exemple émettre un OS à la place d'un avenant. De plus, le maître d'ouvrage gagnerait en intelligibilité en suivant les pratiques des OS déjà connues par les entreprises.

Voici quelques OS utilisés dans la pratique :

  1. OS de démarrage de la période de préparation : article 18.1.1 CCAG-Travaux
  2. OS de démarrage de l'exécution des travaux : articles 18.1.1, 29.1.5 CCAG-Travaux
  3. OS d'arrêt des travaux : article 14.4.2
  4. OS d'ajournement des travaux : article 53.1.2 CCAG-Travaux
  5. OS de reprise de chantier (ou des travaux) : articles 50.3.1.c), 52.3
  6. OS de reprise des travaux à la suite d'une découverte d'un engin de guerre ou de produits toxiques : article 32.1
  7. OS de prolongation du délai d'exécution : article 18.2.2
  8. OS d'affermissement d'une tranche : articles 18.3, 10.6 du CCAG-Travaux
  9. OS de reconstruction des travaux inconformes : article 30
  10. OS de mise en demeure de reprendre l'exécution des travaux
  11. OS de mise en demeure de se conformer aux stipulations du marché ou aux ordres de service : article 52.1
  12. OS prescrivant des prestations supplémentaires ou modificatives : article 13.1
  13. OS fixant des prix provisoires : articles 13.4, 21.2, 21.3 CCAG-Travaux
  14. OS fixant l'état d'acompte mensuel : article 12.2.1 CCAG-Travaux
  15. OS de poursuite de l'exécution des travaux : article 14.4 CCAG-Travaux
  16. OS permettant de déceler un vice de construction : article 39 CCAG-Travaux
  17. OS de prise de possession anticipée de l'ouvrage : article 42
  18. OS portant notification du plan général d'implantation des ouvrages : article 42
  19. OS de notification d'une réfaction de prix
  20. OS ordonnant la production d'un document : exemple : article 9.3.4
  21. OS de notification du décompte général : CAA de Bordeaux, 21 décembre 2004, n°01BX02180

L'OS est un acte exécutoire. Il incombe au titulaire - ou à tout autre participant à l'exécution des travaux - de se conformer aux ordres prescrits par un OS dès la notification de celui-ci. L'inexécution d'un OS est une faute contractuelle engageant la responsabilité du destinataire.

Le refus d'exécuter un ordre de service est une faute justifiant la résiliation d'un marché public : CE, Section, du 25 juin 1971, 70874, 70875, 70942, publié au recueil Lebon.

Toutefois, il existe des cas dans lesquels un titulaire peut s'opposer à l'exécution d'un ordre de service :

Le titulaire doit, au préalable, transmettre au maître d'ouvrage des observations ou des justificatifs fondant son refus d'exécuter l'OS.

Qu’est-ce qu’un ordre de service tardif ? 

Fait naître un ordre de service tardif, le maître d’ouvrage qui ordonne un commencement d’exécution des travaux après l’expiration du délai qui lui était contractuellement imparti pour le faire. 

Il est régis par l’article 50.2.1 du CCAG-travaux 2021. A noter que le CCAG-Travaux ancien prévoyait un délai de 6 mois pour faire naître un ordre de service tardif. L’article 1 de l’arrêté 29 décembre 2022 (NOR : ECOM2234957A) a réduit ce délai de 6 à 4 mois. 

Donc, sauf dérogation, le maître d'ouvrage, qui ne notifie pas l'OS de démarrage des travaux 4 mois à compter la notification du marché, fait naître un ordre de service tardif. A préciser également que le maître d'ouvrage ne peut notifier cet OS dans ce délai de 4 mois pour un commencement d'exécution des travaux après l'expiration de ce délai.

Quels sont les effets d’un ordre de service tardif ? 

Un ordre de service tardif a essentiellement trois effets : 

  • Il crée un droit au profit du titulaire de proposer au maître d’ouvrage une nouvelle date d’exécution ou de demander la résiliation du marché public. 
  • L’acheteur ne peut refuser une demande de résiliation pour ordre de service tardif.
  • Le titulaire peut demander l’indemnisation des frais et investissements éventuellement engagés pour le marché et nécessaires à son exécution.

La résiliation d’un marché public pour ordre de service tardif est-elle automatique ? 

Non. 

Le titulaire ayant reçu un ordre de service tardif de commencement d’exécution des travaux a 15 jours à compter de sa notification pour soit, proposer au maître d’ouvrage une nouvelle date d’exécution des travaux, soit demander par écrit la résiliation du marché. 

S’il garde le silence jusqu’à l’expiration de ce délai, « il est réputé, par son silence, avoir accepté d'exécuter les prestations aux conditions initiales du marché » : article 50-2-1 du CCAG-Travaux 2021. 

La résiliation d’un marché pour ordre de service tardif ouvre-t-elle automatiquement droit au versement des indemnités ? 

Non. 

Le titulaire doit accompagner sa demande de résiliation du marché public pour ordre de service tardif d’une demande indemnitaire assortie des justificatifs des frais et investissements engagés pour le marché et nécessaires à son exécution. 

Il est important pour le titulaire de chiffrer le montant des frais engagés. Ainsi, soit le maître d’ouvrage accepte le montant qu'il a évalué, soit le maître d'ouvrage refuse totalement ou partiellement ce montant.

Si le maître d'ouvrage rejette sa demande, cela fait naître un différend obligeant le titulaire à lui adresser un mémoire en réclamation dans un délai de 2 mois à compter de la naissance du différend : CE, 03 février 2021, n°442844

A défaut de mémoire en réclamation, le titulaire ne sera pas recevable à demander au juge la condamnation de l’acheteur à lui verser le montant réclamé. 

Le maître d’ouvrage peut-il prolonger le délai d’émission de l’ordre de service de démarrage des travaux ? 

On est dans l’hypothèse où le maître d’ouvrage envisage d’émettre un ordre de service de commencement d’exécution au-delà du délai contractuellement prévu. 

À partir du moment où, même après l’expiration du délai imparti au maître d’ouvrage pour émettre l’OS de démarrage des travaux, le titulaire peut décider de proposer au maître d’ouvrage une nouvelle date, on peut estimer que les parties peuvent proroger ce délai. 

Toutefois, la signature d’un avenant pourrait être l’acte le plus adapté pour prolonger ce délai. Si le maître d’ouvrage le fait au moyen d’un ordre de service, le titulaire pourrait se prévaloir du délai initial d’émission de l’OS, parce qu’un marché public travaux comme tout contrat est soumis aux principes posés par le Code civil selon lesquels « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise » : article 1134 du Code civil

Le maître d’ouvrage peut-il prévoir un délai d’émission de l’ordre de service de démarrage des travaux supérieur à celui prévu par le CCAG-Travaux ?

Autrement dit, le maître d’ouvrage peut-il déroger à l’article 50.2.1 stipulant que : 

« Dans le cas où le marché prévoit que son exécution doit commencer sur un ordre de service intervenant après la notification du marché, si cet ordre de service n'a pas été notifié dans le délai fixé par le marché ou, à défaut d'un tel délai, dans les six mois suivant la notification du marché […] ». 

Il résulte même de cette clause que le maître d’ouvrage peut fixer un délai d’émission de l’ordre de service de démarrage des travaux. La dérogation à cette stipulation est donc possible. 

Il convient toutefois au maître d'ouvrage d'évaluer l'opportunité de fixer un délai de commencement des travaux très long et d'y recourir de manière exceptionnelle.

Le marché lie le maître d'ouvrage et le titulaire. En conséquence, le maître d'ouvrage (ou le maître d'oeuvre) adresse au titulaire les ordres de service y compris ceux destinés aux sous-traitants.

Ce principe emporte plusieurs conséquences pratiques.

D'abord, il est de la responsabilité du titulaire de s'assurer que ses sous-traitants exécutent les prescriptions édictées par le maître d'ouvrage (article 3.8.4 du CCAG-Travaux), parce qu'une carence d'un ou plusieurs de ses sous-traitants est susceptible d'engager sa responsabilité à l'égard du maître d'ouvrage.

Ensuite, il est le seul à pouvoir faire des réserves aux ordres de service.

En outre, dans la pratique, tous les participants à l'acte de construire sont soumis au pouvoir de direction et d'exécution du marché y compris les sous-traitants, il n'est donc pas impossible qu'ils reçoivent (de manière exceptionnelle) directement des ordres de la part du maître d'ouvrage en cours de chantier notamment en cas d'urgence ou de défaillance du titulaire.

Enfin, même si l'entrepreneur principal reste le cocontractant du sous-traitant (et non le maître d'ouvrage), sa défaillance dans l'exécution de ses obligations contractuelles peut conduire le sous-traitant à se référer directement au maître d'ouvrage (à titre d'information). C'est le cas par exemple lorsque l'entrepreneur principal refuse de porter à la connaissance du maître d'ouvrage une réserve concernant la bonne exécution des prestations sous-traitées.

Si le titulaire du marché est un groupement, le mandataire des opérateurs économiques reçoit les ordres de service adressés aux membres du groupement par le maître d'ouvrage (article 3.8.5 CCAG-Travaux). Ce groupement a également seule qualité pour formuler des observations.

  • CE,  5 mai 1971, n°77468 : Le maître d'ouvrage peut imposer par ordre de service des travaux utiles à l'ouvrage sans que le titulaire puisse utilement se prévaloir d'un ordre de service abusif.
  • CE, Section, du 25 juin 1971, 70874, 70875, 70942, publié au recueil Lebon : Refuser l'exécution d'un ordre de service ordonnant le déblaiement du chantier, au motif que l'assurance n'a pas confirmé la prise en charge de la partie de l'ouvrage incendié, est un manquement grave aux obligations contractuelles justifiant la résiliation du marché public aux frais et risques du titulaire.
  • CE, Section, du 24 novembre 1972, 84054, publié au recueil Lebon : Les mesures d'exécution d'un contrat ne peuvent faire l'objet d'un recours en annulation.
  • CE, 25 juin 1975, n°84979, 93218, publié au recueil Lebon : Des plans et fondations établis par l'entrepreneur, approuvés par le bureau d'études et exécutés à la demande des architectes, obligent le maître d'ouvrage à les payer.
  • CE, 5 novembre 1980, n°15345 : Une commande verbale de travaux supplémentaires, non démontrée par le titulaire, n'est pas un ordre de service pouvant engager une commune.
  • CE, 9 juin 1981, n° 03822, mentionnée aux tables : Exécuter des travaux en l'absence d'ordre de service écrit et sans réserves, ne donne suite à aucune indemnité des frais supporter à ce titre.
  • CE, 19 mars 1982, n°18632, mentionné aux tables du recueil Lebon : L'exécution d'un ordre de service verbal ordonnant la réalisation de travaux supplémentaires donne suite au remboursement des dépenses utiles exposés par le titulaire au profit du maître d'ouvrage, déduction faite du bénéfice compte tenu de l'imprudence que le titulaire a lui-même commise en acceptant d'obéir à un simple ordre de service verbal.
  • CE, 2 février 1983, 34027, publié au recueil Lebon : En vertu des règles générales applicable aux contrats administratifs, le maître d'ouvrage peut toujours modifier unilatéralement un contrat administratif.
  • CE, 5 décembre n°1984, 25060, 45132, mentionné aux tables du recueil Lebon : L'ordre de service ne peut faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir dès lors qu'il n'est pas détachable du contrat.
  • CE, 14 juin 2002, n°219874, mentionné aux tables du recueil Lebon : L'absence d'ordre de service ne s'oppose pas au paiement des travaux supplémentaires non prévus par les stipulations du marché, mais uniquement s'ils ont été indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art.
  • CE, 26 juillet 2006, n°269052 : Des plans modificatifs peuvent valoir ordre de service.
  • CE, 27 septembre 2006, n°269925 : Le titulaire qui exécute des travaux utiles exécutés sans ordre de service, mais sur ordre verbal du maître d'œuvre, peut prétendre au remboursement des dépenses utiles exposées, déduction faite de son bénéfice.
  • CE, 14 mai 2008, n°288622 : Un décompte général non signé et non notifié par ordre de service n'exige pas un mémoire en réclamation avant la saisine du juge.
  • CE, 22 février 2008, n°274669 : La modification unilatérale d'un marché public par ordres de service, prévoyant la réalisation de travaux autres que ceux prévus par le marché public, ouvre, au bénéfice du cocontractant, un droit à indemnisation du préjudice qui en est résulté.
  • CE, 08 juillet 2009, n°320143 : Le juge du référé mesures utiles ne peut suspendre l'exécution d'un ordre de service.
  • CE, 07 juin 2010, n°316528 : Le titulaire qui conteste utilement un ordre de service, en émettant des réserves portant contestation de la suspension du marché et précisant qu'il réclamera le versement du montant des prestations supplémentaires, dans le délai de 15 jours qui lui était imparti pour faire les réserves, a droit au versement de la part du maître de l'ouvrage des sommes réclamées.
  • CE. Sect. 21 mars 2011,n°304806, publiée au Recueil : Une mesure de résiliation d'un marché public peut faire l'objet d'un recours en annulation, contrairement au principe selon lequel une mesure d'exécution du contrat ne peut être annulé par le juge.
  • CE, 07 avril 2011, n°09BX01283 : Le titulaire, "en ne respectant pas l'ordre de service qui lui avait été donné et en suspendant les travaux, a gravement manqué à ses obligations contractuelles ; que, pour s'exonérer de la faute qu'elle a ainsi commise, elle ne peut utilement se prévaloir de la circonstance de ce qu'elle ne pouvait exécuter les travaux dans les règles de l'art". Ce manquement justifie la résiliation du marché aux frais et risques titulaire.
  • CE, 03 février 2021, n°442844 : A la suite d'un différend né d'une résiliation d'un marché public du fait d'un ordre de service tardif, le titulaire doit, sous peine d'irrecevabilité éventuelle de son action contentieuse, adresser au maître d'œuvre une copie du mémoire en réclamation envoyé au maître d'ouvrage.
  • CE, 29 décembre 2022, n°458678 : Un marché public résilié pour tardiveté de l'ordre de service portant commencement des travaux ne dispense pas le titulaire de présenter un mémoire en réclamation.
  • CAA de Bordeaux, 16 mai 1994, n°92BX00621: Le titulaire peut refuser d'exécuter un ordre de service prescrivant l'exécution de travaux qui ne sont pas de la nature de ceux qui relevaient du lot dont il était titulaire.
  • CAA de Bordeaux, 21 décembre 2004, n°01BX02180 : Le décompte général, signé par la personne responsable du marché, doit être notifié à l'entrepreneur par ordre de service conformément aux stipulations contractuelles.
  • CAA de nancy, 24 mars 2005, n°00NC00502 : L'ordre de service ordonnant des travaux supplémentaires nécessitant une nouvelle procédure de mise en concurrence est nul.
  • CAA de Versailles, 29 mars 2005, n°02VE01940 : Une société requérante, qui n'a pas émis des réserves dans le délai de quinze jours suivant les ordres de service en cause, ainsi que le prévoit l'article 2.52 du cahier des clauses administratives générales applicables, et n'a pas contesté les prix provisoires mentionnés dans ces ordres de service dans le délai d'un mois fixé par l'article 14.4 du même cahier, peut tout de même les contester si les surcoûts directs et indirects en résultant ne pouvaient être totalement appréhendés au moment où les ordres de service ont été émis.
  • CAA de Nancy, 6 avril 2006, n°03NC00382 : L'ordre de service produit ses effets à compter de la date de sa réception par le titulaire et il appartient au maître d'ouvrage (ou au maître d'œuvre) d'apporter la preuve de la date de réception de l'ordre de service.
  • CAA de Paris,13 février 2007, n°04PA01640 : Un ordre de service de poursuivre l'exécution des travaux supplémentaires ordonné par le maître d'ouvrage délégué n'engage pas le maître d'ouvrage déléguant - en l'absence d'accord préalable de celui-ci conformément au contrat de mandat. Ainsi, un ordre de service doit être pris par une personne compétente.
  • CAA de Paris, 06 mars 2007, n°04PA02356 : Le titulaire a droit à l'indemnisation des travaux supplémentaires, dont l'exécution a été utile à la bonne exécution du marché public, sur le fondement d'un ordre de service verbal, mais son imprudence liée à l'acceptation d'exécuter un ordre de service verbal doit être prise en compte dans la fixation de cette indemnité.
  • CAA de Paris, 03 avril 2007, n°04PA00843 : Le titulaire peut refuser l'exécution de travaux supplémentaires, d'un montant important, qui n'étaient pas prévus au marché.
  • CAA de Paris, 03/07/2007, n°04PA02056 : Les travaux exécutés sans ordre de service, mais sur ordre verbal du maître d'œuvre, l'entreprise peut prétendre au remboursement des dépenses utiles exposées, déduction faite de son bénéfice.
  • CAA Marseille, 20 octobre 2008, n°06MA02112 : La prolongation du délai d'exécution du marché par avenant (ou ordre de service) ne s'oppose pas à ce qu'une société requérante puisse obtenir l'indemnisation des conséquences financières induites par cette prolongation dès lors que l'avenant a pour seul objet la prise en compte de la prolongation du délai contractuel.
  • CAA d'appel de Bordeaux, 18 décembre 2008, n°07BX00872 : Des fiches d'intervention ne comportant aucune signature attestée de l'autorité compétente et relatives à des travaux de maintenance réalisés par le titulaire ne constituent pas un ordre de service pouvant engager la responsabilité indemnitaire du maître d'ouvrage.
  • CAA de Douai, 05 octobre 2010, n°09DA00271 : La mention dans un procès-verbal de chantier d'une demande de devis portant sur des travaux supplémentaires assortie d'une demande d'intervention, non corroborées par aucun autre élément, n'est pas un ordre de service.
  • CAA de Lyon, 03 février 2011, n°5LY01803 : Un accord sur devis, portant sur l'exécution de travaux supplémentaires, mentionné par le compte-rendu d'une réunion de chantier, équivaut à un ordre de service.
  • CAA de Douai, 19 juillet 2011, 08DA01278 : Le titulaire obtient indemnisation du préjudice subi du fait de la prolongation du délai d’exécution du marché par ordre de service.
  • CAA de Nantes, 31/10/2013, n°12NT01444 : Le maître d'ouvrage peut toujours émettre un ordre de service portant notification du décompte général du marché public alors même que les stipulations contractuelles attribuent cette compétence au maître d'œuvre, parce qu'il garde toujours son pouvoir de direction et de contrôle de l'exécution du marché qui lui permet d'émettre des ordres de service.
  • CAA de Nancy, 27 décembre 2016, n°15NC02562 : Si la société requérante "demande à être rémunérée de la présence sur le chantier de deux techniciens d'études et d'un coordonnateur "Hygiène Sécurité Environnement", elle ne produit aucun élément de nature à établir que ces prestations auraient été commandées par ordre de service, ou qu'elles auraient été indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art".
  • CAA de Lyon,18 octobre 2018, n°3LY01546 : L'inexécution d'un ordre de service est une faute justifiant la résiliation du marché public par le maître d'ouvrage.
  • CAA de NANTES, 29/11/2019, n°18NT00087 : L'acheteur ne peut appliquer au titulaire des pénalités de retard à la suite d'une réduction des délais d'exécution par ordre de service (contrairement aux stipulations contractuelles exigeant en ce cas l'accord du titulaire).
  • CAA de VERSAILLES, 28/04/2020, n°17VE01594 : En l'absence d'ordre de service, le titulaire doit établir que les travaux supplémentaires qu'il a réalisés étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art pour obtenir leur rémunération.
  • CAA de Nantes, 26 mars 2021, n°20NT00340 : Un ordre de service peut prolonger le délai d'exécution du marché public si cette possibilité est prévue par celui-ci.
  • TA Montpellier, 09/03/2023, n°1905583 : Le titulaire qui se prévaut de travaux supplémentaires exécutés en application d’un ordre de service doit produit l’OS. 
  • CE 31 octobre 1962, Société les Constructions de l’Ouest : Même dans le silence des stipulations contractuelles, le maître d’ouvrage peut toujours émettre des ordres de service.

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